Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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entendue, impossible à attaquer autrement que par des batteries de siége; or, au commencement du XVe siècle, on ne savait pas encore ce que c'était que l'artillerie de siége. Les bouches à feu étaient de petite dimension, portées en campagne sur des chevaux ou des chariots, et n'étaient guère employées que contre la formidable gendarmerie de l'époque. Examinons les dispositions du donjon de Pierrefonds, que nous avons déjà données dans le plan d'ensemble de ce château (voy. CHÂTEAU, fig. 24).

      Le donjon de Pierrefonds (41) 33 est voisin de l'entrée principale A du château, et flanque cette entrée de façon à en interdire complétement l'approche. Il possède, en outre, une poterne B, très-relevée au-dessus du sol extérieur. Ainsi remplit-il les conditions ordinaires qui voulaient que tout donjon eût deux issues, l'une apparente, l'autre dérobée. La porte A du château, défendue par un pont-levis, des vantaux, un corps-de-garde a, une herse et une seconde porte barrée, avait, comme annexe obligée à cette époque, une poterne pour les piétons, avec son pont-levis particulier b et entrée détournée le long du corps-de-garde; de plus, le couloir de la porte était enfilé par une échauguette posée sur le contre-fort C. Pour entrer dans le logis, on trouvait un beau perron D avec deux montoirs (voy. MONTOIR, PERRON), puis un large escalier à vis E montant aux étages supérieurs. Une porte bâtarde F donnait entrée dans le rez-de-chaussée voûté servant de magasin pour les approvisionnements. Par un degré assez large G, de ce rez-de-chaussée on descend dans une cave peu spacieuse, mais disposée avec des niches comme pour recevoir des vins de diverses sortes. Les murs de ce rez-de-chaussée, épais de trois à quatre mètres, sont percés de rares ouvertures, particulièrement du côté extérieur. Une petite porte H, masquée dans l'angle rentrant de la tour carrée, permet de pénétrer dans la salle voûtée I formant le rez-de-chaussée de cette tour, et de prendre un escalier à rampes droites montant seulement au premier étage. Nous allons y revenir tout à l'heure. La poterne B, munie d'une herse et de vantaux, surmontée de mâchicoulis qui règnent tout le long de la courtine, a son seuil posé à sept mètres environ au-dessus du sol extérieur qui, à cet endroit, ne présente qu'un chemin de six mètres de largeur; puis, au-dessous de ce chemin, est un escarpement prononcé, inaccessible, au bas duquel passe une des rampes qui montaient au château, rampe défendue par une traverse percée d'une porte; de l'autre côté de la porte, commandant le vallon, est une motte faite à main d'hommes qui était certainement couronnée d'un ouvrage détruit aujourd'hui. De la poterne B, on pouvait donc, soit par une trémie, soit par un pont volant, défendre la porte de la rampe du château, passer par-dessus cette porte et arriver à l'ouvrage avancé qui commande le vallon au loin. La poterne B servait ainsi de sortie à la garnison, pour prendre l'offensive contre un corps d'investissement, de porte de secours et d'approvisionnement. On observera que l'espace K est une cour dont le sol est au-dessous du sol de la cour principale du château, et que, pour s'introduire dans cette cour principale, il faut passer par une seconde poterne L, dont le seuil est relevé au-dessus du sol K, et qui est défendue par une herse, des vantaux et des mâchicoulis avec créneaux. L'escalier M, qui donne dans la chapelle N et dans la cour, monte de fond et permet d'arriver à la chambre de la herse.

      En continuant à monter par cet escalier à vis, on arrive (42) au-dessus de la chambre de la herse, dans l'étage percé de mâchicoulis; traversant un couloir; on descend une rampe O, qui vous conduit au premier étage de la tour carrée, d'où on peut pénétrer dans les grandes pièces du logis principal, lesquelles se composent d'une vaste salle P, en communication directe avec le grand escalier à vis E, de deux salons R avec logis S au-dessus de la porte d'entrée, et des chambres prises dans les deux grosses tours défendant l'extérieur. En T sont des garde-robes, latrines et cabinets. On voit encore en place la belle cheminée qui chauffait la grande salle P, bien éclairée par de grandes fenêtres à meneaux, avec doubles traverses. Un second étage était à peu près pareil à celui-ci, au moins quant aux dispositions générales; l'un et l'autre ne se défendaient que par l'épaisseur des murs et les flanquements des tours.

      Ce n'est qu'au troisième étage (43) que commencent à paraître les défenses. À la base des grands pignons qui ferment les couvertures du logis principal sont pratiqués des mâchicoulis avec crénelages en c et en d. Les deux grosses tours rondes et la tour carrée continuent à s'élever, se dégagent au-dessus des combles du logis, et sont toutes trois couronnées de mâchicoulis avec meurtrières et crénelages couverts; puis, au-dessus, d'un dernier parapet crénelé à ciel ouvert à la base des toits. La tour carrée possède en outre sur ses trois contre-forts trois échauguettes flanquantes. À la hauteur du second étage, en continuant à gravir l'escalier M de la poterne, on trouve un parapet crénelé au-dessus des mâchicoulis de cette poterne et une porte donnant entrée dans la tour carrée; de là on prend un petit escalier à vis V qui monte aux trois derniers étages de cette tour n'étant plus en communication avec l'intérieur du gros logis. Cependant, de l'étage des mâchicoulis de la tour carrée, on peut prendre un escalier rampant au-dessus de la couverture des grands pignons crénelés du logis principal, et aller rejoindre les mâchicoulis de la grosse tour d'angle, de même que, par l'escalier de l'échauguette C, on peut, en gravissant les degrés derrière les pignons crénelés de ce côté, arriver aux mâchicoulis de la grosse tour proche l'entrée. Sur le front extérieur, ces deux tours sont mises en communication par un parapet crénelé à la base des combles. Des dégagements et garde-robes T, on descendait sur le chemin de ronde X de la grande courtine défendant l'extérieur avec son échauguette X' au-dessus de la poterne. Ce chemin de ronde était aussi en communication avec les chemins de ronde inférieurs de la tour de la chapelle N. De la salle R ou de la tour R', on pouvait communiquer également aux défenses du château du côté sud par la pièce S située au troisième étage au-dessus de l'entrée en descendant l'escalier U.

      Si l'on a suivi notre description avec quelque attention, il sera facile de comprendre les dispositions d'ensemble et de détail du donjon de Pierrefonds, de se faire une idée exacte du programme rempli par l'architecte. Vastes magasins au rez-de-chaussée avec le moins d'issues possible. Sur le dehors, du côté de l'entrée, qui est le plus favorable à l'attaque, énormes et massives tours pleines dans la hauteur du talus, et pouvant résister à la sape. Du côté de la poterne, courtine de garde très-épaisse et haute avec cour intérieure entre cette courtine et le logis; seconde poterne pour passer de cette première cour dans la cour principale. Comme surcroît de précaution, de ce côté, très-haute tour carrée enfilant le logis sur deux de ses faces, commandant toute la cour K et aussi les dehors, avec échauguettes au sommet flanquant les faces mêmes de la tour carrée. D'ailleurs, possibilité d'isoler les deux tours rondes et la tour carrée en fermant les étroits passages donnant dans le logis, et de rendre ainsi la défense indépendante de l'habitation. Possibilité de communiquer d'une de ces tours aux deux autres par les chemins de ronde supérieurs, sans passer par les pièces destinées à l'habitation. Outre la porte du château et le grand escalier avec perron, issue particulière pour la tour carrée, soit par la petite porte de l'angle rentrant, soit par l'escalier de la chapelle. Issue particulière de la tour du coin par la courtine dans laquelle est percée la poterne et par les escaliers de la chapelle. Issue particulière de la tour de la porte d'entrée par les salles situées au-dessus de cette porte et l'escalier U qui descend de fond. Communication facile établie entre les tours et les défenses du château par les chemins de ronde. Logis d'habitation se défendant lui-même, soit du côté de la cour K, soit du côté de l'entrée du château, au moyen de crénelages et mâchicoulis à la base des pignons. Ce logis, bien protégé du côté du dehors, masqué, flanqué, n'ayant qu'une seule entrée pour les appartements, celle du perron, et cette entrée, placée dans la cour d'honneur, commandée par une des faces de la tour carrée. Impossibilité à toute personne n'étant pas familière avec les distributions du logis de se reconnaître à travers ces passages, ces escaliers, ces détours, ces issues secrètes; et pour celui

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<p>33</p>

On remarquera, entre ce plan et celui donné dans l'ensemble du château, quelques différences de détail, résultat des déblais exécutés en 1858 et 1859 dans ce domaine, d'après les ordres de l'Empereur. Ces déblais ont mis au jour certaines parties inférieures des bâtiments dont on ne pouvait prendre qu'une idée très-incomplète. Le plan que nous donnons aujourd'hui peut être regardé comme parfaitement exact.