Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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autre chose qu'un fort destiné à conserver un point d'une grande ligne de défenses très-bien choisie. Peut-être n'a-t-on pas encore assez observé la corrélation qui existe presque toujours, au moyen âge, entre les diverses forteresses d'un territoire; on les étudie isolément, mais on ne se rend pas compte généralement de leur importance et de leur utilité relative. À ce point de vue, il nous paraît que les fortifications du moyen âge ouvrent aux études un champ nouveau.

      Telle est l'influence persistante des traditions, même aux époques où on a la prétention de s'y soustraire, que nous voyons les derniers vestiges du donjon féodal pénétrer jusque dans les châteaux bâtis pendant le XVIIe siècle, alors que l'on ne songeait plus aux demeures fortifiées des châtelains féodaux. La plupart de nos châteaux des XVIe et XVIIe siècles conservent encore, au centre des corps de logis, un gros pavillon, qui certes n'était pas une importation étrangère, mais bien plutôt un dernier souvenir du donjon du moyen âge. Nous retrouvons encore ce logis dominant à Chambord, à Saint-Germain-en-Laye, aux Tuileries, et plus tard aux châteaux de Richelieu en Poitou, de Maisons, de Vaux près Paris, de Coulommiers, etc.

       DORMANT, s. m. (Bâtis-dormant). C'est le nom que l'on donne au châssis fixe, en menuiserie, sur lequel est ferrée une porte ou une croisée. Dans les premiers temps du moyen âge, les portes et fenêtres étaient ferrées dans les feuillures en pierre sans dormants; mais ce moyen primitif, tradition de l'antiquité, avait l'inconvénient de laisser passer l'air par ces feuillures et de rendre les intérieurs très-froids en hiver. Lorsque les habitudes de la vie ordinaire commencèrent à devenir plus molles, on prétendit avoir des pièces bien closes, et on ferra les portes et croisées sur des dormants ou bâtis-dormants en bois, scellés au fond des feuillures réservées dans la pierre. Les dormants n'apparaissent dans l'architecture privée que vers le XVe siècle.

       DORTOIR, s. m. Dortouoir. Naturellement, les dortoirs occupent, dans les anciens établissements religieux, une place importante. Ils sont le plus souvent bâtis dans le prolongement de l'un des bras du transsept de l'église, de manière à mettre les religieux en communication facile avec le choeur, et sans sortir dans les cloîtres, pour les offices de nuit. Quand la saison était rude ou le temps mauvais, les religieux descendaient à couvert dans le transsept et de là se répandaient dans le choeur. Les dortoirs sont établis au premier étage, sur des celliers, ou des services du couvent qui ne peuvent donner ni odeur, ni humidité, ni trop de chaleur. Les dortoirs des monastères sont ordinairement divisés longitudinalement par une rangée de colonnes formant deux nefs voûtées ou tout au moins lambrissées; ils prennent du jour et de l'air à l'ouest et à l'est, par suite de la position du bâtiment imposée par l'orientation invariable de l'église. Les grandes abbayes possédaient des dortoirs bâtis avec magnificence et présentant un aspect vraiment monumental. La science moderne a reconnu qu'il fallait pour chaque dormeur, pendant le temps du sommeil, 32m cubes d'air respirable au moins. Les poumons des moines des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, pouvaient consommer un beaucoup plus volumineux cube d'air, si bon leur semblait, et encore se levaient-ils à minuit passé, pour chanter matines.

      Lebeuf 38 décrit ainsi le dortoir des religieux de l'abbaye du Val-Notre-Dame, dépendant du doyenné de Montmorency: «Le réfectoir est un assez petit quarré; il est au-dessous du dortoir, qui est très-clair, et dont la voûte est soutenue par des colonnes ou piliers anciens délicatement travaillés, ainsi qu'on en voit dans plusieurs autres dortoirs de l'ordre de Cîteaux construits au XIIIe siècle ou au XIVe.» Il ne faut pas croire que les dortoirs des religieux fussent disposés comme les dortoirs de nos casernes ou de nos lycées. Ces grandes salles étaient divisées, au moyen de cloisons peu élevées, en autant de cellules qu'il y avait de religieux; ces cellules ou stalles contenaient un lit et les meubles les plus indispensables; elles devaient rester ouvertes, ou fermées seulement par une courtine.

      Au XVIe siècle, tous les ordres religieux voulurent avoir des cellules ou chambres particulières pour chaque moine, ainsi que cela se pratique dans nos séminaires. Les mêmes habitudes furent observées dans les couvents de femmes. Dès le XIIe siècle cependant, les clunisiens, qui étaient des gens aimant leurs aises, avaient déjà établi des chambres ou cellules distinctes pour chaque religieux, et parfois même ces cellules étaient richement meublées. Pierre le Vénérable s'en plaignait de son temps, et saint Bernard s'élevait avec son énergie habituelle contre ces abus qu'il regardait comme opposés à l'humilité monastique. Aussi les premiers dortoirs des cisterciens semblent avoir été des salles communes garnies de lits, mais sans séparations entre eux.

      Voici (1) l'aspect extérieur d'un de ces dortoirs communs: c'est le dortoir du monastère de Chelles (abbaye de femmes); il avait été construit au commencement du XIIIe siècle 39; le rez-de-chaussée était occupé par des celliers et un chauffoir; une épine de colonnes supportait la charpente formant deux berceaux lambrissés avec entraits apparents. Dans l'article ARCHITECTURE MONASTIQUE, nous avons eu l'occasion de donner un certain nombre de ces bâtiments; il paraît inutile de s'étendre ici sur leurs dispositions générales, leur forme et les détails de leur architecture fort simple, mais parfaitement appropriée à l'objet. Ainsi, par exemple, les fenêtres étaient habituellement composées d'une partie supérieure dormante, percée surtout pour éclairer la salle, et d'une partie inférieure pouvant s'ouvrir pour l'aérer (voy. FENÊTRE). Si les religieux possédaient chacun une chambre, on n'en donnait pas moins le nom de dortoir au bâtiment ou à l'étage qui les contenait, et particulièrement au large couloir central qui donnait entrée à droite et à gauche dans chaque cellule. Cependant il existait encore, au XVIe siècle, des dortoirs de couvents de femmes disposés comme les chambrées de nos casernes, c'est-à-dire consistant en plusieurs grandes chambres contenant chacune quelques lits. Nous en trouvons la preuve dans le Pantagruel de Rabelais 40. «Mais, dist l'abbesse, meschante que tu es, pourquoy ne faisois-tu signe à tes voisines de chambre?»

       DOSSERET, s. m. C'est un bout de mur en retour d'équerre sur un autre, portant un linteau de porte ou un arc. AA (1) sont les dosserets d'une baie.

       DOUELLE, s. f. C'est le parement intérieur d'un arc, qu'on désigne aussi sous le nom d'intrados. Dans une voûte, chaque claveau possède sa douelle. A est la douelle du claveau représenté fig. 1.

      E

       ÉBRASEMENT, s. m. Indique l'ouverture comprise entre le tableau d'une fenêtre et le parement du mur intérieur d'une salle. L'ébrasement s'élargit du dehors au dedans, afin de faciliter l'introduction du jour et aussi de dégager les vantaux d'une croisée ouvrante (voy. FENÊTRE).

       ÉCAILLES, s. f. S'emploie seulement au pluriel, et désigne une sorte d'ornementation fort usitée dans les édifices, au moyen âge, pour décorer des rampants de contre-forts, des talus de chéneaux, des couronnements de pinacles, des flèches en pierre, etc. Les écailles sont évidemment une imitation de la couverture en bardeaux de bois ou essentes (voy. BARDEAU); aussi est-ce particulièrement dans les provinces où cette sorte de couverture était employée, c'est-à-dire en Normandie, en Picardie, dans le Soissonnais et dans l'Île-de-France, que les écailles apparaissent sur les constructions de pierre à dater du XIIe siècle. En Normandie même, il n'est pas rare, dès le commencement de ce siècle, de voir certains parements verticaux, des fonds d'arcatures aveugles, par exemple, décorés d'écailles sculptées sur la pierre et présentant une très-faible saillie. C'était un moyen de distinguer ces fonds au milieu des parties solides de la construction, de les colorer,

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<p>38</p>

Hist. du dioc. de Paris, t. IV, p. 213.

<p>39</p>

Voy. la Monog. d'abbayes. Bib. Sainte-Geneviève.

<p>40</p>

Liv. III, chap. XIX.