Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 9 - (T - U - V - Y - Z). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 9 - (T - U - V - Y - Z) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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      Un tracé perspectif (fig. 25), en fera saisir l'effet du côté du collatéral. Deux thuriféraires entr'ouvrent un rideau qui laisse voir la statue couchée du prélat. La voûte de l'édicule est en berceau, et des bas-reliefs décorent ses pieds-droits. Devant le socle, des chanoines sont sculptés dans de petites niches. Ce monument date également du XIVe siècle. Cette disposition fut conservée jusqu'à l'époque de la renaissance, et nous possédons un grand nombre de représentations de tombeaux, avec dais plus ou moins riches, protégeant l'effigie du mort. On retrouve encore l'application de ce principe dans les célèbres tombeaux de Louis XII, de François Ier et de Henri II, érigés à Saint-Denis Cependant le programme des XIIIe et XIVe siècles est modifié sur un point capital. Dans ces derniers monuments, les personnages sont représentés avec les apparences de la mort sous le cénotaphe; vêtus, vivants et agenouillés au-dessus. Le monument recouvrant la sépulture de François Ier montre non-seulement les figures nues du roi et de la reine Claude sous le cénotaphe, mais encore, sur le couronnement, les mêmes figures agenouillées, vêtues et accompagnées du dauphin François, du prince Charles d'Orléans et de Charlotte de France, qui mourut âgée de huit ans. Disons, en passant, que ce tombeau, attribué par quelques-uns à des artistes italiens, est dû à Philibert de l'Orme, comme architecte; à Pierre Bontems, maître sculpteur, bourgeois de Paris, qui s'engagea, par un marché en date du 6 octobre 1552, moyennant 1699 livres, à faire une partie des célèbres bas-reliefs du stylobate, et une figure du couronnement; à Germain Pilon, qui exécuta pour 1100 livres les huit figures de Fortune (sous la voûte du cénotaphe); à Ambroise Perret, qui fit les quatre évangélistes; et enfin, pour l'ornementation, à Jacques Chantrel, Bastile Galles, Pierre Bigoigne et Jean de Bourgy. Les belles figures couchées appartiennent à l'école française, et paraissent être sorties des ateliers de Jean Goujon. Quant à la statuaire du tombeau de Henri II, elle est tout entière de la main de Germain Pilon 51.

      Depuis la fin du XVe siècle, beaucoup de monuments funéraires adoptèrent cette disposition, d'une représentation du mort sous le cénotaphe, et du même personnage vivant, agenouillé sur le couronnement; puis on en vint à supprimer parfois l'effigie du cadavre, et à ne plus montrer que les figures des personnages agenouillés sur un socle, ou sur le simulacre d'un sarcophage. Toutefois ces compositions n'apparaissent pas en France, que nous sachions, avant la seconde moitié du XVe siècle.

      Au XVIe, elles deviennent assez fréquentes. Le tombeau de Charles VIII, à Saint-Denis, présentait cette disposition.

      Charles VIII mourut le 7 avril 1498, par conséquent son tombeau appartient déjà au style dit de la renaissance française. Il était fort beau 52, et a été gravé plusieurs fois. Gagnières, dans sa collection 53, en a donné un bon dessin. Comme corollaire de ces tombeaux cénotaphes, il faut citer les monuments appliqués contre les murs, et qui présentent sur une surface verticale comme le développement de toutes les parties qui constituent le mausolée, avec soubassement, image du mort et dais.

      Ces sortes de monuments sont assez rares en France; le défaut d'espace et aussi le défaut d'argent faisaient parfois adopter ce parti. Nous en connaissons deux beaux exemples dans l'ancienne cathédrale de la cité de Carcassonne. L'un date du milieu du XIIIe siècle, c'est celui de l'évêque Radulphe. Le simulacre du sarcophage, qui persiste tard dans les provinces méridionales de la France, est posé sur trois colonnettes et paraît engagé dans la muraille. Des chanoines, sous une arcature, assistent aux obsèques. Sur le sarcophage se dresse debout, en bas-relief, la figure de l'évêque bénissant. Un gâble orné de fleurons et de crochets couronne le tout.

      L'autre tombeau (fig. 26) date du commencement du XIVe siècle: c'est celui de l'évêque Pierre de Roquefort, qui fit rebâtir le choeur de l'église et deux chapelles voisines du transsept 54. Ce monument, ainsi que le montre notre tracé, présente en rabattement, dirons-nous, la disposition des tombeaux cénotaphes; l'évêque n'est pas couché sur le socle, qui n'est qu'un placage, mais se dresse sur ce socle; il est couronné par un dais plaqué; un chanoine et un diacre accompagnent la figure principale dans deux arcatures latérales. Ainsi que nous le disions, cette disposition est rare en France, et nous n'en connaissons pas d'exemple, encore existant, dans les provinces du Nord.

      Il nous reste à parler des plates tombes, avec effigies en relief ou simplement gravées sur la pierre ou sur le métal. Ces tombes sont de deux sortes: ou les effigies des morts sont posées sur un socle très-bas présentant une faible saillie au-dessus du sol, ou elles sont au ras même du sol, de façon à permettre de marcher dessus comme sur un dallage. Nous ne doutons pas que les premiers de ces tombeaux étaient garnis d'un poêle d'étoffe aux anniversaires ou à certains jours solennels, et nous en donnerions comme preuve les attaches de tiges de métal ou les douilles dont on trouve fréquemment la trace le long des socles. Pour les seconds, ils n'étaient qu'un signe apparent indiquant la place de la sépulture.

      Il existe des plates-tombes d'une époque assez ancienne, c'est-à-dire remontant au XIIe siècle, mais qui, tout en présentant peu de relief, formaient cependant assez de saillie sur le sol pour qu'on ne pût marcher dessus, tandis que ce n'est que vers 1225 que l'on commence à voir des plates-tombes au ras du sol, et seulement gravées.

      Il faut cependant mentionner ici une tombe très-singulière, qui autrefois était placée dans le choeur de l'église Saint-Germain des Prés, à Paris, et qui est aujourd'hui déposée à Saint-Denis: c'est celle de Frédégonde. Dom Bouillard 55 prétend que cette princesse avait été enterrée dans la basilique de Sainte-Croix et de Saint-Vincent, du côté du nord, près du gros mur qui soutenait le clocher. La tombe actuelle ne remonte pas au delà de la première moitié du XIIe siècle. C'est une plaque de pierre de liais incrustée de fragments de pâtes de verre et de pierres dures, entremêlés de filets de cuivre. Des réserves laissées dans la pierre forment les linéaments du vêtement. La tête, les mains et les pieds, entièrement unis aujourd'hui, étaient très-probablement peints. Nous ne connaissons pas d'autre exemple de ce genre de monuments funéraires 56; et il est difficile de découvrir les motifs qui déterminèrent les religieux de Saint-Germain des Prés à faire exécuter ce monument suivant un procédé aussi peu usité. Était-ce pour imiter une mosaïque beaucoup plus ancienne qui aurait été faite par encloisonnements, sur des indications d'artistes byzantins? Était-ce l'essai d'un artiste occidental? Nous ne saurions le dire. D'autres plates-tombes en mosaïque existent en France, celle, entre autres, de l'évêque d'Arras, Frumaldus, mort en 1180 57, et celle trouvée dans les ruines de l'abbaye de Saint-Bertin, avec la date de 1109; mais ces tombes sont exécutées suivant le procédé ordinaire du mosaïste employé en Italie et en France au XIIe siècle, procédé qui ne ressemble en rien à celui adopté pour l'effigie de Frédégonde.

      Il nous reste deux belles tombes datant du XIIe siècle, qui représentent, en plat relief les effigies des rois Clovis Ier et Childebert Ier. Ces tombes, qui proviennent de l'abbaye Saint-Germain des Prés, sont maintenant déposées à Saint-Denis. Le relief de ces figures est trouvé aux dépens d'une cavité faite dans une épaisse dalle de pierre. Elles avaient remplacé, dans l'église Saint-Germain des Prés, des monuments beaucoup plus anciens, mais fort dégradés, lorsque l'abbaye fut prise par les Normands.

      Vers la fin du XIIe siècle et le commencement du XIIIe, on plaça dans les églises beaucoup de ces tombes avec effigie en demi-relief, peu élevées au-dessus du pavé. Elles étaient très-fréquemment exécutées en bronze coulé ou repoussé, émaillé, et consistaient en une plaque de métal posée aux quatre coins sur

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<p>51</p>

Voyez, pour de plus amples détails sur ces tombeaux, la Monographie de l'église royale de Saint-Denis, par M. le baron de Guilhermy, 1848.

<p>52</p>

Voici ce qu'en dit dom Doublet (Hist. de l'abb. de Saint-Denys en France), 1625, liv. IV. «Son effigie (du roi Charles VIII) revestue à la royalle, et de genoux au-dessus du tombeau, est représentée après le naturel, laquelle est de fonte; le haut du dit tombeau couvert de cuivre doré, et au devant de l'effigie il y a un oratoire, ou appuy, et couvert de cuivre doré, sur lequel est posée une couronne avec un livre ouvert, aussi de cuivre doré. Pareillement y a aux quatre coins quatre anges de fonte bien dorez et eslabourez, lesquels tiennent les armoiries des royaumes de Naples et Sicile, aussi de fonte, dorées et peintes. Aux costés du tombeau y a des niches rondes, et au dedans, des bassins de cuivre bien doré, et en iceux bassins de basses figures de fonte bien dorées.»

D. Millet, dans son Trésor sacré de l'abbaye royale de Saint-Denys en France, 1640, dit: «Son sepulchre (du roi Charles VIII) est le plus beau qui soit dans le choeur, sur lequel on voit son effigie représentée à genouil près le naturel, une couronne et un livre sur un oratoire (prie-Dieu), et quatre anges à genoux aux quatre coings du tombeau, le tout de cuivre doré, sauf l'effigie dont la robe est d'azur, semée de fleurs de lys d'or.»

<p>53</p>

De la Bibl. Bodléienne. Voyez la gravure de l'ouvrage de Félibien, Abbaye royale de Saint-Denis.

<p>54</p>

Voyez CATHÉDRALE, fig. 49. Le tombeau de Pierre de Roquefort est placé contre le mur occidental de la chapelle du nord. Ce prélat est mort en 1321.

<p>55</p>

Histoire de l'abbaye royale de Saint-Germain des Près. Paris, 1724.

<p>56</p>

Cette tombe a été souvent reproduite par la gravure et la chromolithographie (voyez la Statistique de Paris, par M. Alb. Lenoir; l'ouvrage de M. Gailhabaud, l'Architecture et les arts qui en dépendent; D. Bouillard, Hist. de l'abbaye de Saint-Germain des Près; Alex. Lenoir, Musée des monuments français; de Guilhermy, Monographie de l'église royale de Saint-Denis).

<p>57</p>

Voyez l'ouvrage cité de M. Gailhabaud.