L'art russe. Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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L'art russe - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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d'art, comme certains auteurs l'ont prétendu.

      Il reste de ces monuments finnois primitifs des débris et, mieux que cela, des traditions tellement vivaces et caractérisées qu'on est forcément entraîné à les rattacher à un art fort ancien.

      Tels sont, par exemple, ces dessins de broderies dont on ne saurait déterminer la date exacte (fig. 17), mais dont la tradition remonte à une haute antiquité. Ce ne sont que des linéaments géométriques qu'il ne faut pas confondre avec d'autres combinaisons également anciennes, appartenant à d'autres races[30].

Fig. 17.

      Fig. 17.

      Dans ces ornements géométriques finnois que nous donnons ici, les méandres, par exemple, n'apparaissent pas, tandis qu'on les rencontre à l'origine de toutes les ornementations appartenant à l'extrême Orient central.

      Il n'est pas plus difficile de concevoir l'ornement A, de la figure 17, qu'il n'en coûte de composer les ornements géométriques de la figure 18, et dans ces broderies russes, dont il existe de si curieuses collections (voir les Musées de la Société géographique et de l'Académie des sciences de Russie), on rencontre très-rarement ces méandres, si fréquents dans l'ornementation de l'extrême Orient et notamment sur les monuments les plus anciens de l'Inde et de la Chine.

Fig. 18.

      Fig. 18.

      L'Iran n'est pas sans avoir également adopté le méandre dans son ornementation, non sur les monuments les plus anciens connus qui n'en présentent pas de traces, mais sous l'influence des civilisations grecques de l'Ionie et à l'époque des Arsacides.

      Les arts égyptiens anciens n'en montrent pas davantage. En un mot, la combinaison géométrique de l'ornement connu sous le nom de méandre n'appartient ni aux Iraniens, ni à la race sémitique, tandis qu'elle apparaît, soit dans l'extrême Orient, soit chez les peuplades grecques.

      Quoique rare dans la composition des broderies russes, le méandre se fait voir cependant et nous paraît dû à une influence slave (fig. 19).

Fig.

      Ces dessins sont brodés en coton rouge, sans envers, sur une toile[31]. Quant à l'harmonie des tons de ces étoffes populaires brodées, elle mérite d'être signalée.

Fig. 19.

      Fig. 19.

      Cette harmonie se rapproche parfois absolument des harmonies asiatiques de la Perse (pl. IV)[32]; d'autres se rapprochent des tonalités mongoles dures et heurtées.

      Mais, dans la composition des dessins de ces tissus, les figures géométriques ne dominent pas seules. Les fleurs, la figure humaine, les animaux entrent dans la décoration et se rapprochent intimement des compositions iraniennes anciennes; souvent ces figures sont affrontées, adossées ou juxtaposées, ayant entre elles un arbre ou un vase. On sait combien ce motif a été reproduit dans les étoffes et même dans la sculpture de la Perse; on sait également qu'on en trouve l'origine dans le culte de Mithra.

      Dans un récit du Boun-dehesch[33], il est dit comment Meschia naquit mâle et femelle d'un arbre produit par la portion de la semence de Kaïomorts qui avait été confiée à la terre, et comment le corps androgyne de Meschia se divisa en deux corps: l'un mâle qui retint le nom de Meschia[34], l'autre femelle qui s'appela Meschiané[35]. Voici la traduction de ce passage d'après Anquetil:

      «Il est dit dans la loi[36], au sujet des hommes, que Kaïomorts[37] ayant rendu de la semence en mourant, cette semence fut purifiée par la lumière du soleil, que Nério-Sengh[38] en garda deux portions et que Sapandomad[39] eut soin de la troisième. Au bout de quarante ans, le corps d'un Reivas, formant une colonne (un arbre) de quinze ans avec quinze feuilles, sortit de terre, le jour de Mithra du mois de Mithra. Cet arbre représentait deux corps disposés de manière que l'un avait la main dans l'oreille de l'autre, lui était uni, lié, faisant même un tout avec lui.... Ils étaient si bien unis tous les deux l'un à l'autre, qu'on ne voyait pas qui était le mâle, quelle était la femelle...»

      Des pierres intaillées et des cylindres assyriens représentent, en effet, l'arbre ou la colonne avec les deux figures humaines, ou encore deux lions ailés affrontés, séparés par un arbre avec quinze feuilles[40]. Ce sujet fut beaucoup plus tard conservé comme motif décoratif dans les monuments persans; on le retrouve partout, en Occident, dans l'architecture dite romane et aussi dans les étoffes d'Orient des premiers siècles du christianisme, et enfin dans ces broderies russes d'une époque récente.

      Il en est de même pour un certain nombre de ces compositions assyriennes et iraniennes, qui fournirent les éléments d'ornements persans de l'époque des Arsacides et des Sassanides que l'on retrouve parfois dans l'ornementation dite byzantine, mais plus prononcés encore dans celle des XIe et XIIe siècles, en Occident aussi bien qu'en Russie. Tels sont (fig. 20), par exemple, ces combats et entrelacements d'animaux fantastiques et réels, lions et griffons[41], ces torsades (fig. 21) si fréquentes sur les cylindres et terres cuites de l'époque des Perses[42], ces végétations toutes méridionales, fig. 22[43] et fig. 23[44].

Fig. 20.

      Fig. 20.

Fig. 21.

      Fig. 21.

Fig. 22.

      Fig. 22.

Fig. 23.

      Fig. 23.

      A coup sûr ce n'est pas sur les territoires russes, non plus que dans le nord occidental de l'Europe, que cette ornementation a pris naissance puisque, dans ces contrées, ces animaux et ces végétaux n'existaient pas; donc la transmission asiatique est évidente dans les sculptures et les manuscrits des XIe et XIIe siècles, en Russie comme en Occident. Leur ornementation rappelle ces motifs, ces animaux fabuleux que l'antiquité attribuait à l'Orient: tels que ces griffons, gardiens de l'or, ces dragons, serpents ailés.

Fig. 24.

      Fig. 24.

Fig. 25.

      Fig. 25.

      Dans les fouilles faites sous la direction de M. Samokvasov dans le gouvernement de Tchernigov (petite Russie au nord de Kiew), on a trouvé deux cornes de ces chèvres du Caucase appelées tours, cornes enrichies de garnitures d'argent, gravées, dont les figures 24 et 25 donnent une portion. Ces objets

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