Nord-Sud: Amérique; Angleterre; Corse; Spitzberg. Rene Bazin

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Nord-Sud: Amérique; Angleterre; Corse; Spitzberg - Rene  Bazin

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qui nous reçoit a sûrement passé plusieurs années de son enfance dans un couvent, comme presque toutes les fermières qui prennent là un degré de culture et de civilisation que les hommes n'ont pas. Elle a un visage ovale, grave et bon, que la jeunesse n'a pas quitté. Plus jeune, elle a dû ressembler à un modèle du Pérugin. L'un après l'autre, elle me présente les grandes filles qui l'aident dans le ménage, les petits qui jouent autour de la table, puis, regardant le dernier, qui dort, elle me dit:

      – Je suis bien contente: je n'ai pas eu d'enfant cette année. C'est dur, voyez-vous, d'être toujours penchée sur le berbers et réveillée la nuit! A présent, on attend la récompense.

      De quelle récompense voulait-elle parler? De l'éternelle? De l'appui que prêtent aux parents les enfants devenus grands? Les deux pensées étaient sûrement dans son esprit.

      Que cela est admirable, divin et humain!

      A peine a-t-elle achevé, que le dernier-né se met à s'agiter dans le berceau. Elle fait un signe, du doigt. Et, aussitôt, une petite de six ans qui était là, jouant aux dés sur la table, mais attentive, et les yeux vers nous au moindre mouvement, saute à terre, court au berceau, s'assied sur un des bords d'osier, appuie sur l'autre sa main droite, et, prenant de l'élan, se balance en mesure, et rendort le nourrisson.

      Le père est d'origine écossaise. De la ferme des Coteaux à Saint-Joachim la distance est longue déjà. Je sais que, même dans le plus rude de l'hiver, quand il fait quinze ou vingt degrés de froid, les «habitants» ne manquent pas la messe du dimanche. «C'est du brave monde», comme l'a dit l'un d'eux. Plusieurs font deux ou trois lieues pour se rendre au village. Mais les enfants, comment vont-ils à l'école? Ceux des Coteaux? Le père répond:

      – N'y a-t-il pas les traîneaux à chiens? Le mien est grand: ils se fourrent cinq dedans, et youp! youp!

      Je vois en esprit, sur la neige fraîche encore, le chien qui tourne brusquement, et les écoliers qui roulent, poudrés comme des moineaux.

      Le soleil baisse. Il faut repartir. Un jeune homme, à la barrière du premier champ, nous regarde, debout près d'une paire de bœufs de labour. Il reconnaît en nous la nation.

      – Voyez, dit-il, nos bœufs sont enjugués à la française!

      En effet, tandis que, bien souvent, les bœufs ont un harnachement, collier ou bricole, ici, je retrouve le joug en bois d'érable et la courroie de cuir qui le lie aux quatre cornes.

      Les campagnes. Montmagny.– Nous sommes quatre qui partons pour Montmagny, deux Français et deux Canadiens-Français: Étienne Lamy, un sénateur, un médecin et moi. Le village étant situé sur la rive droite, il faut d'abord traverser le Saint-Laurent, de Québec à Lévis. Puis nous prenons un train, qui longe la côte. Les paroisses ont des noms qui, pour nous, sont plaisants: Saint-Vallier, Berthier, Saint-François. Un lac, le lac de Beaumont, fait une longue clairière dans une forêt pauvre, lande plutôt, où abonde la myrtille. Puis la terre ameublie succède aux étendues sauvages. Nous voyons nettement, car alors les arbres sont rares, les lignes successives d'habitations rurales et le dessin des propriétés. Celles-ci ont toutes la même largeur de cinq cents mètres, et la même longueur d'un kilomètre. A l'époque lointaine des concessions de terrains, les arpenteurs ont commencé à mesurer et borner les lots en partant du fleuve et remontant vers l'intérieur. Les colons de la première ligne ont bâti leurs maisons à la limite extrême de leur domaine, c'est-à-dire exactement à un kilomètre du Saint-Laurent. Mais les concessionnaires de la seconde ligne ont pu bâtir, de même, la ferme et les dépendances au commencement de leur concession, de l'autre côté du chemin. On cherchait à se rassembler, à se porter secours en cas d'incursion des sauvages, ou d'accident, ou de grand travail; de telle sorte que les campagnes sont sillonnées de rues parallèles, où les maisons, il est vrai, sont bâties à de longs intervalles, et que l'on vous dira, si vous demandez l'adresse d'un cultivateur: «Il habite dans le deuxième rang, ou dans le quatrième.»

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      La France, de la Compagnie Transatlantique, quittait Le Havre le 20 avril 1912; le 14, à dix heures du soir, au sud de Terre-Neuve, le Titanic, de la White Star, avait heurté un iceberg, et sombré, engloutissant 1,517 victimes.

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La France, de la Compagnie Transatlantique, quittait Le Havre le 20 avril 1912; le 14, à dix heures du soir, au sud de Terre-Neuve, le Titanic, de la White Star, avait heurté un iceberg, et sombré, engloutissant 1,517 victimes.

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