Quentin Durward. Вальтер Скотт
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– Mon compère n'a rien oublié, dit le Français à Durward: vous devez avoir froid, voilà un bon feu; vous devez avoir faim, et vous allez avoir à déjeuner.
Maître Pierre siffla: l'aubergiste entra, et répondit à son bonjour par un salut respectueux; mais il ne montra nullement cette humeur babillarde, attribut caractéristique des maîtres d'auberge français de tous les siècles.
– Quelqu'un devait venir ordonner un déjeuner, dit maître Pierre; l'a-t-il fait?
L'aubergiste ne répondit que par une profonde inclination de tête; et tout en apportant les divers mets qui devaient composer le déjeuner et en les plaçant sur la table, il ne dit pas un seul mot pour en faire valoir le mérite. Le repas cependant était digne de tous les éloges que les aubergistes français sont dans l'usage de donner aux fruits de leur savoir-faire, comme les lecteurs pourront en juger dans le chapitre suivant.
CHAPITRE IV.
Le Déjeuner
«Juste ciel: quels coups de dents! – Que de pain!»
Nous avons laissé notre jeune étranger en France, dans une situation plus agréable qu'aucune de celles dans lesquelles il s'était trouvé depuis son arrivée sur le territoire des anciens Gaulois. Le déjeuner, comme nous l'avons donné à entendre en finissant le dernier chapitre, était admirable. Il y avait un pâté de Périgord, sur lequel un gastronome aurait voulu vivre et mourir, comme les mangeurs de lotus d'Homère, oubliant parens, patrie, et toutes les obligations sociales. Sa croûte magnifique s'élevait comme les remparts d'une grande capitale, emblème des richesses qu'ils sont chargés de protéger. Il y avait encore un ragoût exquis avec cette petite pointe d'ail que les Gascons aiment, et que les Écossais ne haïssent point; de plus, un jambon délicat qui avait naguère fait partie d'un noble sanglier de la forêt voisine de Montrichard. Le pain était aussi blanc que délicieux, et avait la forme de petites boules (d'où les Français ont tiré le nom de boulanger): la croûte en était si appétissante qu'avec de l'eau seule elle aurait pu passer pour une friandise. Mais il y avait autre chose que de l'eau pour l'assaisonner; car on voyait sur la table un de ces flacons de cuir qu'on appelait bottrines, et qui contenait environ deux pintes du meilleur vin de Beaune.
Tant de bonnes choses auraient, comme on dit, donné de l'appétit à un mort. Quel effet devaient-elles donc produire sur un jeune homme d'environ vingt ans, qui depuis deux jours (car il faut dire la vérité) n'avait presque vécu que des fruits à demi mûrs que le hasard lui avait fait trouver, et d'une ration assez modique de pain d'orge! il se jeta d'abord sur le ragoût, et le plat fut bientôt vide. Il attaqua ensuite le superbe pâté, y fit une entaille qui pénétra jusqu'à ses fondemens, et revint à la charge plus d'une fois, en l'arrosant de temps en temps d'un verre de vin, au grand étonnement de l'hôte, et au grand amusement de maître Pierre.
Celui-ci surtout, probablement parce qu'il se trouvait avoir fait une meilleure action qu'il ne l'avait cru, semblait enchanté de l'appétit du jeune Écossais; quand enfin il remarqua que son activité commençait à se ralentir, il chercha à lui faire faire de nouveaux efforts, en ordonnant que l'on apportât des fruits confits, des darioles, et toutes les autres friandises, qu'il put imaginer pour prolonger le repas. Tandis qu'il l'occupait ainsi, son visage exprimait une sorte de bonne humeur qui allait jusqu'à la bienveillance, et toute différente de sa physionomie ordinaire, qui était froide, sévère et caustique. Les gens âgés prennent toujours quelque plaisir à voir les jouissances et les exercices de la jeunesse, lorsque leur esprit, dans sa situation naturelle, n'est troublé ni par un sentiment secret d'envie, ni par une folle émulation.
De son côté, Quentin Durward, tout en employant son temps d'une manière si agréable, ne put s'empêcher de découvrir que les traits de l'homme qui le régalait si bien, et qu'il avait d'abord trouvés si repoussans, gagnaient beaucoup quand celui qui les considérait était sous l'influence de quelques verres de vin de Beaune; et ce fut avec un ton de cordialité qu'il reprocha à maître Pierre de rire de son appétit et de ne rien manger lui-même.
– Je fais, pénitence, répondit maître Pierre, et je ne puis prendre avant midi que quelques confitures et un verre d'eau; puis, se tournant vers l'hôte, il ajoutât. – Dites à la dame de là-haut de m'en apporter.
– Eh bien! continua maître Pierre quand l'aubergiste fut parti, vous ai-je tenu parole relativement au déjeuner que je vous avais promis?
– C'est le meilleur que j'aie fait; répondit l'Écossais, depuis que j'ai quitté Glen-Houlakin.
– Glen quoi? s'écria maître Pierre; avez-vous envie d'évoquer le diable en prononçant de pareils mots?
– Glen-Houlakin, mon bon monsieur, c'est-à-dire la vallée des moucherons. C'est le nom de notre ancien domaine. Vous avez acquis le droit d'en rire, si cela vous plaît.
– Je n'ai pas la moindre intention de vous offenser, mon jeune ami; mais je voulais vous dire que si le repas que vous venez de faire est de votre goût, les archers de la garde écossaise en font un aussi bon, et peut-être meilleur, tous les jours.
– Je n'en suis pas surpris. S'ils sont enfermés toute la nuit dans les nids d'hirondelles, ils doivent avoir le matin un terrible appétit.
– Et ils ont abondamment de quoi le satisfaire; ils n'ont pas besoin, comme les Bourguignons, d'aller le dos nu, afin de pouvoir se remplir le ventre. Ils sont vêtus comme des comtes, et font ripaille comme des abbés.
– J'en suis bien aise pour eux.
– Et pourquoi ne pas prendre du service parmi eux, jeune homme? Je suis sûr que votre oncle pourrait vous faire entrer dans la compagnie, dès qu'il y aura une place vacante; et, je vous le dirai tout bas, j'ai moi-même quelque crédit, et je puis vous être utile: je présume que vous savez monter à cheval aussi-bien que tirer de l'arc?
– Tous ceux qui ont porté le nom de Durward sont aussi bons écuyers que qui que ce soit qui ait jamais appuyé son soulier ferré sur l'étrier, et je ne sais trop pourquoi je n'accepterais pas votre offre obligeante. La vie et l'habit sont deux choses indispensables; mais cependant, voyez-vous, les hommes comme moi pensent à l'honneur, à l'avancement, à de hauts faits d'armes. Votre roi Louis, – que Dieu le protège, car il est ami et allié de l'écosse; – mais il reste toujours dans ce château, ou ne fait qu'aller d'une ville fortifiée à une autre. Il gagne des cités et des provinces par des ambassades politiques, et non à la pointe de l'épée. Or, quant à moi, je suis de l'avis des Douglas, qui ont toujours tenu la campagne parce qu'ils aiment mieux entendre le chant de l'alouette que le cri de la souris.
– Jeune homme, ne jugez pas témérairement des actions des souverains. Louis cherche à épargner le sang de ses sujets, mais il n'est pas avare du sien. Il a fait ses preuves de courage à Montlhéri.
– Oui, mais il y a de cela une douzaine d'années ou davantage. Or, j'aimerais à suivre un maître qui voudrait conserver son honneur aussi brillant que son écusson, et qui serait toujours le premier au milieu de la mêlée.
– Pourquoi donc n'êtes-vous pas resté à Bruxelles avec le duc de Bourgogne? Il vous mettrait à même d'avoir les os brisés tous les jours; et de peur que l'occasion ne vous en manquât, il se chargerait de vous les rompre lui-même, surtout s'il apprenait que vous avez battu un de ses forestiers.
– C'est la vérité. Ma mauvaise étoile m'a fermé cette porte.
– Mais il ne manque pas de chefs qui braveraient