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de l'importance relative que doit prendre chacun de ces tons, comme surface. Dans le cas de l'adoption des trois couleurs et de leurs dérivés, l'or devient un appoint indispensable, c'est lui qui est chargé de compléter ou même de rétablir l'harmonie. Revenant aux principes les plus simples, on peut obtenir une harmonie parfaite avec le jaune et le rouge (ocre rouge), surtout à l'aide de l'appoint blanc; il est impossible d'obtenir une harmonie avec le jaune, et le bleu, ni même avec le rouge et le bleu, sans l'appoint de tons intermédiaires. Voudriez-vous décorer une salle toute blanche comme fond, avec des ornements rouges et bleus ou jaunes et bleus, même clairsemés, que l'harmonie serait impossible. Le rouge (ocre rouge) et le jaune (ocre jaune) étant les deux seules couleurs qui puissent, sans l'appoint d'autres tons, se trouver ensemble.

      L'observation d'autres principes aussi élémentaires n'était pas moins familière à ces artistes. Ils avaient reconnu, par exemple, qu'une même forme d'ornement blanc ou d'un ton clair sur un fond noir, ou noir sur un fond clair, changeait de dimension. Pour nous faire bien comprendre, soient (fig. 6), en A, des billettes brun rouge sur fond blanc, ou B, blanches sur fond brun rouge: les billettes brunes paraîtront, plus on s'éloignera de la surface peinte, plus petites que les billettes blanches, et la surface occupée par le fond blanc paraîtra plus étendue que celle occupée par le fond brun. Soient deux pilastres de même largeur et de même hauteur: si l'un des deux, celui C, est décoré de lignes verticales, il paraîtra, à distance, plus long et plus étroit que celui D orné de bandes horizontales. Et pour en revenir aux observations précédentes sur la valeur harmonique des couleurs, le rouge étant supposé 2 et le bleu 3, le rouge devant alors occuper une surface plus grande que le bleu pour obtenir une harmonie entre ces deux couleurs, si (fig. 6) les billettes A sont bleues sur un fond rouge, il sera possible d'avoir une surface harmonique; mais si au contraire c'est le fond qui est bleu et les billettes qui sont rouges, l'oeil sera tellement offensé, qu'il ne pourra s'attacher un instant sur cette surface: l'assemblage des deux couleurs, dans cette dernière condition, fera vaciller les contours au point de causer le vertige. Chacun peut faire cette expérience en employant du vermillon pur pour le rouge et un bleu d'outre-mer pour le bleu. Non-seulement les couleurs ont une valeur absolue, mais aussi une valeur relative quant à la place qu'elles occupent et à l'étendue qu'elles couvrent; de plus elles modifient, en raison de la forme de l'ornement qu'elles colorent, l'étendue réelle des surfaces. Dans la tonalité la plus simple, celle où le jaune (ocre) et le rouge (ocre) sont employés, il est clair que l'une des deux couleurs, l'ocre rouge, a plus d'intensité que le jaune; mais si à ces deux couleurs nous ajoutons le bleu, il faut que la valeur du rouge et du bleu soit différente, que le rouge le cède au bleu, ou ce qui est plus naturel, que le bleu le cède au rouge. Alors c'est le brun rouge qu'il faut admettre et le bleu clair; si nous ajoutons (presque forcément d'ailleurs) des tons dérivés à ces trois couleurs, comme le vert et le pourpre, il faudra également établir ces tons et ces couleurs suivant une valeur différente, c'est-à-dire n'avoir jamais deux tons de valeur égale. Il ne s'agit plus ici de surface occupée, mais d'intensité; or cette intensité est facultative. Si, quand nous n'employons que les trois couleurs, le rouge doit être brun rouge et prendre la plus grande intensité, employant avec ces trois couleurs les dérivés, le rouge doit redevenir franc, c'est-à-dire vermillon, parce que le brun rouge ne pourrait s'harmonier ni avec le vert ni avec le pourpre; l'adjonction des tons dérivés exige que les couleurs soient pures si on les emploie. Toutefois il est bon que la première valeur soit laissée à une couleur plutôt qu'à un ton; cette première valeur ne pouvant être donnée au jaune, ce sera le ton rouge (vermillon) ou le bleu qui la prendra (habituellement le bleu). Supposons que ce soit le bleu intense qui soit la première valeur: les peintres du moyen âge se sont gardés de donner la seconde valeur à une autre couleur, c'est-à-dire au rouge; ils l'ont accordée à un ton, le plus souvent au vert, parfois au pourpre. Vient alors la troisième valeur, qui sera le rouge (vermillon); puis entre cette couleur et le jaune, un autre ton, habituellement le pourpre, parfois le vert. Après le jaune viennent les valeurs inférieures, les pourpres très-clairs (roses), les bleus clairs, les verts turquoise, les jaune-paille, blanc laiteux et gris. Car au-dessous de la dernière valeur couleur, qui est forcément le jaune ocre, il faut des tons, jamais la gamme des valeurs ne finissant par une couleur, comme rarement elle ne commence par un ton 78. Ces principes connus, il reste encore une quantité de règles d'un ordre secondaire que ces artistes du moyen âge ont scrupuleusement observées. Nous en citerons quelques-unes. Le bleu intense étant dur et froid, les peintres l'ont souvent un peu verdi, et l'ont relevé par des semis d'or; puis ils y ont presque toujours accolé un rouge vif (vermillon), puis après le rouge un vert clair ou même un blanc bleui ou verdi, des traits noirs séparant d'ailleurs chaque ton et chaque couleur. Le bleu en contact direct avec le jaune produit un effet louche, le rouge ou le pourpre a été interposé. Le bleu gris ardoise peut seul se coucher sur une surface jaune. Le vert est souvent mis en contact direct avec le bleu, et c'est une dissonance dont on a tiré parti avec une adresse rare, mais alors le vert incline au jaune ou au bleu, il n'est pas franchement vert; si le vert est en contact avec le jaune, cette dernière couleur est orangée et le vert est clair, ou le jaune est limpide et le vert est sombre. Les pourpres qui, comme surface, ont la valeur 5, et qui par conséquent doivent occuper le moindre champ dans la décoration peinte, ne s'approchent jamais du violet; ce ton faux étant absolument exclu, il incline vers l'orangé ou la garance. Nous avons souvent observé combien la nature est ingénieuse dans la combinaison harmonique des tons des plantes: ainsi sur dix géraniums ou dix roses trémières qui auront des fleurs de rouges et de pourpres différents, nous verrons dix tons verts différents pour les feuilles, tons verts combinés chacun pour le rouge ou le pourpre qu'ils entourent. Les peintres du moyen âge avaient-ils étudié les secrets de l'harmonie des tons sur la nature? Nous ne savons; mais comment se fait-il que ces secrets soient perdus, ou que les femmes seules les possèdent encore lorsqu'il s'agit de leurs toilettes? Que s'il faut peindre une salle, nos artistes semblent appliquer au hasard des couleurs, des tons, produisant dans l'ensemble une harmonie presque toujours fausse? est-ce défaut de principes, de traditions, de pratique? Il est certain que dans l'art difficile de la décoration peinte, l'instinct ne suffit pas, comme plusieurs le pensent, et que dans cette partie importante de l'architecture, le raisonnement et le calcul interviennent comme dans toutes les autres, à défaut d'une longue suite de traditions.

      La peinture décorative la plus simple, celle qui demande le moins de combinaisons, est celle que l'on obtient avec l'ocre jaune, l'ocre rouge ou brun rouge, le noir, le blanc et le composé des deux, le gris. Cette peinture n'est, pour ainsi dire, qu'un dessin, une grisaille chaude de ton, cependant elle peut produire des effets très-variés déjà. L'ocre jaune et l'ocre rouge sont deux couleurs de la même famille, pour ainsi dire, qui s'harmonisent toujours sans difficultés. Que vous peigniez un ornement jaune sur brun rouge, ou brun rouge sur fond jaune, quelle que soit la forme ou la dimension de l'ornement, celui-ci ne fera jamais tache; mais si vous rehaussez l'ornement jaune ou brun rouge de filets noirs ou blancs, vous obtenez alors des effets d'une extrême finesse et riches de ton. Cette observation peut être faite dans les salles du donjon du château de Coucy. La décoration peinte de la salle du rez-de-chaussée ne consiste guère qu'en un appareil tracé en blanc avec filets brun rouge sur un fond d'ocre jaune.

      Les formerets de la voûte se composent (voyez leur section en A, fig. 7) d'un retour d'équerre avec ornement courant de a en b et de b en c, puis d'un profil dont les membres sont alternativement peints en brun rouge et en ocre jaune. Nous donnons en B, B', B'', trois échantillons de ces ornements courants sur les deux faces en retour d'équerre. Celui B est brun rouge sur fond ocre, avec larges filets noirs sur les rives des feuilles, et trait blanc à une égale distance du bord, à cheval sur le filet noir. Celui B' est jaune foncé (ocre jaune mêlé d'ocre rouge) sur fond ocre jaune redessiné de filets brun rouge très-sombre et de traits blancs à l'intérieur; des pois blancs sont de plus marqués sur le fond jaune; celui B" est brun rouge redessiné d'un filet blanc sur fond jaune avec tiges G gris ardoise. L'effet de cette ornementation est des plus brillants. Il va

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<p>78</p>

La sainte Chapelle du palais présente le plus curieux exemple de cette échelle chromatique. Malgré de nombreuses et larges traces des tons anciens, lors de la restauration des peintures, les difficultés ont été nombreuses; il est des tons qu'il a fallu refaire bien des fois, et faute d'une expérience consommée. En couchant un ton dont la trace était certaine, il a fallu souvent changer la valeur des tons supérieurs ou inférieurs.