Œuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV. Buonaparte Napoleon

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      Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV

      LIVRE CINQUIÈME

      EMPIRE

      1806

Munich, le 6 janvier 18061.Au sénat conservateur

      Sénateurs,

      «La paix a été conclue à Presbourg et ratifiée à Vienne entre moi et l'empereur d'Autriche. Je voulais, dans une séance solennelle, vous en faire connaître moi-même les conditions; mais ayant depuis long-temps arrêté, avec le roi de Bavière, le mariage de mon fils le prince Eugène, avec la princesse Augusta, sa fille, et me trouvant à Munich au moment où la célébration du mariage devait avoir lieu, je n'ai pu résister au plaisir d'unir moi-même les jeunes époux qui sont tous deux le modèle de leur sexe. Je suis, d'ailleurs, bien aise de donner à la maison royale de Bavière, et à ce brave peuple bavarois, qui, dans cette circonstance, m'a rendu tant de services et montré tant d'amitié, et dont tes ancêtres furent constamment unis de politique et de coeurs à la France, cette preuve de ma considération et de mon estime particulière.

      Le mariage aura lieu le 15 janvier. Mon arrivée au milieu de mon peuple sera donc retardée de quelques jours; ces jours paraîtront longs à mon coeur; mais après avoir été sans cesse livré aux devoirs d'un soldat, j'éprouve un tendre délassement à m'occuper des détails et des devoirs d'un père de famille. Mais ne voulant point retarder davantage la publication du traité de paix, j'ai ordonné, en conséquence de nos statuts constitutionnels, qu'il vous fût communiqué sans délai, pour être ensuite publié comme loi de l'empire.

NAPOLÉON.Munich, le 12 janvier 1806.Au sénat conservateur

      Sénateurs,

      «Le sénatus-consulte organique du 18 floréal an 12 a pourvu à tout ce qui était relatif à l'hérédité de la couronne impériale en France.

      «Le premier statut constitutionnel de notre royaume d'Italie, en date du 19 mars 1805, a fixé l'hérédité de cette couronne dans notre descendance directe et légitime, soit naturelle, soit adoptive2.

      «Les dangers que nous avons courus au milieu de la guerre, et qui se sont encore exagérés chez nos peuples d'Italie, ceux que nous pouvons courir en combattant les ennemis qui restent encore à la France, leur font concevoir de vives inquiétudes: ils ne jouissent pas de la sécurité que leur offre la modération et la libéralité de nos lois, parce que leur avenir est encore incertain.

      «Nous avons considéré comme un de nos premiers devoirs de faire cesser ces inquiétudes.

      «Nous nous sommes en conséquence déterminé à adopter comme notre fils le prince Eugène, archi-chancelier d'état de notre empire, et vice-roi de notre royaume d'Italie. Nous l'avons appelé, après nous et nos enfans naturels et légitimes, au trône d'Italie, et nous avons statué qu'à défaut, soit de notre descendance directe, légitime et naturelle, soit de la descendance du prince Eugène, notre fils, il appartiendra au parent le plus proche de celui des princes de notre sang, qui, le cas arrivant, se trouvera alors régner en France.

      «Nous avons jugé de notre dignité que le prince Eugène jouisse de tous les honneurs attachés à notre adoption, quoiqu'elle ne lui donne des droits que sur la couronne d'Italie; entendant que dans aucun cas, ni dans aucune circonstance, notre adoption ne puisse autoriser ni lui, ni ses descendans, à élever des prétentions sur la couronne de France, dont la succession est irrévocablement réglée par les constitutions de l'empire.

      «L'histoire de tous les siècles nous apprend que l'uniformité des lois nuit essentiellement à la force et à la bonne organisation des empires, lorsqu'elle s'étend au-delà de ce que permettent, soit les moeurs des nations, soit les considérations géographiques.

      «Nous nous réservons, d'ailleurs, de faire connaître par des dispositions ultérieures les liaisons que nous entendons qu'il existe après nous, entre tous les états fédératifs de l'empire français. Les différentes parties indépendantes entre elles, ayant un intérêt commun, doivent avoir un lien commun.

      «Nos peuples d'Italie accueilleront avec des transports de joie les nouveaux témoignages de notre sollicitude; ils verront un garant de la félicité dont ils jouissent, dans la permanence du gouvernement de ce jeune prince, qui, dans des circonstances si orageuses, et surtout dans ces premiers momens si difficiles pour les hommes même expérimentés, a su gouverner par l'amour, et faire chérir nos lois.

      «Il nous a offert un spectacle dont tous les instans nous ont vivement intéressés. Nous l'avons vu mettre en pratique, dans des circonstances nouvelles, les principes que nous nous étions étudié à inculquer dans son esprit et dans son coeur, pendant tout le temps où il a été sous nos yeux. Lorsqu'il s'agira de défendre nos peuples d'Italie, il se montrera également digne d'imiter et de renouveler ce que nous pouvons avoir fait de bien dans l'art si difficile des batailles.

      «Au même moment où nous avons ordonné que notre quatrième statut constitutionnel fût communiqué aux trois collèges d'Italie, il nous a paru indispensable de ne pas différer un instant à vous instruire des dispositions qui assoient la prospérité et la durée de l'empire sur l'amour et l'intérêt de toutes les nations qui le composent. Nous avons aussi été persuadés que tout ce qui est pour nous un sujet de bonheur et de joie, ne saurait être indifférent ni à vous, ni à mon peuple.»

NAPOLÉON.Paris, le 2 mars 1806.Discours prononcé par l'empereur à l'ouverture du corps législatif

      «Messieurs les députés des départemens au corps législatif, messieurs les tribuns et les membres de mon conseil d'état, depuis votre dernière session, la plus grande partie de l'Europe s'est coalisée avec l'Angleterre. Mes armées n'ont cessé de vaincre que lorsque je leur ai ordonné de ne plus combattre. J'ai vengé les droits des états faibles, opprimés par les forts. Mes alliés ont augmenté en puissance et en considération; mes ennemis ont été humiliés et confondus; la maison de Naples a perdu sa couronne sans retour; la presqu'île de l'Italie toute entière fait partie du grand empire. J'ai garanti, comme chef suprême, les souverains et les constitutions qui en gouvernent les différentes parties.

      «La Russie ne doit le retour des débris de son armée, qu'au bienfait de la capitulation que je lui ai accordée. Maître de renverser le trône impérial d'Autriche, je l'ai raffermi. La conduite du cabinet de Vienne sera telle, que la postérité ne me reprochera pas d'avoir manqué de prévoyance. J'ai ajouté une entière confiance aux protestations qui m'ont été faites par son souverain. D'ailleurs, les hautes destinées de ma couronne ne dépendent pas des sentimens et des dispositions des cours étrangères. Mon peuple maintiendra toujours ce trône à l'abri des efforts de la haine et de la jalousie; aucun sacrifice ne lui sera pénible pour assurer ce premier intérêt de la patrie.

      «Nourri dans les camps, et dans des camps toujours triomphans, je dois dire cependant que, dans ces dernières circonstances, mes soldats ont surpassé mon attente; mais il m'est doux de déclarer aussi que mon peuple a rempli tous ses devoirs. Au fond de la Moravie, je n'ai pas cessé un instant d'éprouver les effets de son amour et de son enthousiasme. Jamais il ne m'en a donné des marques qui aient pénétré mon coeur de plus douces émotions. Français! je n'ai pas été trompé dans mon espérance. Votre amour, plus que l'étendue et la richesse de votre territoire, fait ma gloire. Magistrats, prêtres, citoyens, tous se sont montrés dignes des hautes destinées de cette belle France, qui, depuis deux siècles, est l'objet des ligues et de la jalousie de ses voisins.

      «Mon ministre de l'intérieur vous fera connaître les événemens qui se sont passés dans le cours de l'année. Mon conseil-d'état vous présentera des projets de lois pour améliorer les différentes branches de l'administration. Mes ministres des finances et du trésor public vous communiqueront

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<p>1</p>

A compter du 1er janvier 1806, le calendrier républicain a été supprimé par une loi.

<p>2</p>

Art. 2. La couronne d'Italie est héréditaire dans sa descendance directe et légitime, soit naturelle, soit adoptive, de mâle en mâle, et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance, sans néanmoins que son droit d'adoption puisse s'étendre sur une autre personne, qu'un citoyen de l'empire français ou du royaume d'Italie (Statut constitutionnel du royaume d'Italie, 19 mars 1805).