L'Anneau des Dragons. Морган Райс
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Les deux soldats restants firent alors volte-face mais trop lentement, encore sous le choc de l'attaque, Erin était proche du second qu’elle poignarda de ses deux courtes dagues, trop près pour qu'il puisse utiliser son épée.
Elle fit en sorte que l’homme mourant reste entre elle et le troisième, usant de lui tel un bouclier qui arrêta un coup de hache. Elle laissa tomber son ennemi déjà mort, entraînant la hache de son camarade avec lui, il s'avéra que ce dernier l’avait enroulée à son poignet à l’aide d’une corde pour ne pas la perdre au beau milieu de la bataille. Il était penché et à découvert lorsqu'Erin s'avança et le poignarda dans le cou.
Combien étaient-ils désormais ? Erin avait essayé de les compter à la nuit tombée, avait même essayé d'en faire un jeu, avec les hommes qui la suivaient. Mais elle avait désormais perdu le compte ; ils étaient bien trop nombreux.
On était loin des jeux de chevaliers auxquels elle jouait avec Rodry étant enfant, lorsqu’elle parvenait à le persuader ; on était très loin de la violence nette et sans bavure dont elle avait fait preuve dans le village tombé aux mains des mercenaires de Ravin, avec Sire Til et Sire Fenir. Ce genre de combat demandait du cran, passer d’une maison à l’autre, frapper et s’enfuir, tuer et vite partir s’embusquer.
Erin mit un pied sur le dos du premier soldat et tira pour récupérer sa lance, qu’elle extirpa dans un horrible bruit mouillé. Elle nettoyait le sang quand elle entendit des bruits de bottes et vit une vingtaine de soldats de Ravin éclairés par des lampes, qui approchaient rapidement.
"Bon sang," jura-t-elle avant de détaler. La troupe pressait l’allure derrière Erin, elle se mit à courir, tournant à gauche puis à droite, Erin espérait connaître les rues de Royalsport aussi bien qu'elle l’imaginait. Oui, elle se trouvait dans la Rue des Potiers, la rue où on jetait les reliquats d'argile en temps ordinaire. Erin savait où elle se trouvait.
Cela ne la rassura guère. Un carreau d'arbalète effleura son épaule, elle partit en zizaguant, histoire de ne pas représenter une cible immobile pour l'ennemi. Elle sauta par-dessus une pile de boîtes, entendit des individus les percuter derrière elle et piqua un sprint pour les devancer.
Elle était fatiguée, et pas seulement à force de courir. Elle souffrait d'une douzaine de petites blessures suite aux combats survenus plus tôt au cours de la nuit. Elle était éveillée depuis un nombre d'heures incalculable, sans compter la violence sans fin et étourdissante, des hommes mouraient autour d'elle à chaque pas, amis et ennemis sans distinction aucune.
L'effervescence de la bataille poussait Erin à avancer, elle tourna dans une cour dégageant des relents de tannerie, la puanteur assaillit ses narines plus grandement encore que l’odeur du sang. La cour donnait bien évidemment dans une impasse, elle fit volte-face, aux abois, regarda les soldats arriver, ils se déplaçaient plus lentement en réalisant qu'elle n'avait nulle part où aller.
"A l’assaut !" cria-t-elle.
Les hommes embusqués sur les toits étaient en vue, armés d’arcs et d'arbalètes, de lances et même de pierres. Le blocus commença, ils tiraient sur l'ennemi encerclé, d'aucuns se mirent en retrait, prêts à couper toute possibilité de fuite. Dans un effort pour se libérer, l'un des hommes se précipita sur Erin, épée en main. Erin esquiva sur le côté de justesse, lui enfonça sa lance dans le ventre alors même qu'il manquait sa cible.
Ses hommes leur tombèrent dessus, poursuivant leur attaque initiale par la violence des épées, des massues et des haches. Ils assaillirent les soldats du Royaume du Sud, les tuant l'un après l'autre, mais pas sans perte. Erin vit le serviteur d’un noble qui l'avaient accompagnée se faire transpercer par une courte épée, la tête d'un garde éclater sous le poids d'une masse.
Erin tressaillait chaque fois qu'elle voyait un des siens tomber, comme si on meurtrissait sa propre chair. Mais elle savait que tel était le prix à payer lorsqu’on donnait des ordres ; elle ne pouvait pas assurer la sécurité de tous ses suivants. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était espérer que le plus d’ennemis possibles vengent leurs propres morts.
Le combat dans la cour fut rapide et brutal, les soldats du Roi Ravin furent décimés en moins d'une minute. Erin et ses hommes ne restèrent pas pour autant dans les environs, déjà, d'autres arrivaient. Il en arrivait toujours. Ils s’emparèrent des armes des victimes autant que faire se peut et s’élancèrent dans les ruelles, s’en tenant aux chemins de traverse, ils connaissaient mieux la cité que leurs ennemis.
"Combien sont-ils ?" demanda un homme derrière Erin. Elle sentait sa lassitude poindre dans sa voix, la partageait même, mais savait qu'elle ne pouvait pas en faire état.
"Nous les chasserons de notre cité tous autant qu'ils sont," répondit Erin. "Continuons. Ne nous arrêtons pas. La vie de chacun de nous en dépend." Elle était convaincue que son frère ou son père, voire même Lenore, auraient alors tenu un discours enthousiaste ; tout ce qu'Erin pouvait faire, c'était montrer l'exemple. "Attachez une corde."
L'homme grommela mais hocha la tête, se dirigea vers l'un des bâtiments les plus proches de la rivière et lança une corde en travers, tira dessus jusqu'à ce qu'il soit sûr d’avoir ferré une cheminée de l'autre côté. Les hommes d'Erin attachèrent la partie la plus proche sur leur toit, mais c'est elle qui s’aventura dessus avec l’agilité d’une acrobate. La rivière en contrebas habituellement calme, qui traversait le quartier le plus pauvre et le quartier des plaisirs, rugissait telle la Slate. Erin aperçut la silhouette de Maître Grey en hauteur qui lançait son sortilège.
"Je sais que cela ralentit l'ennemi, sorcier, mais cela ne nous facilite pas vraiment non plus la tâche," murmura-t-elle en atterrissant tel un félin sur le toit d’en face. Elle constata que la corde enchevêtrée était sur le point de se défaire ; encore une seconde ou deux, moins si elle avait été moins légère, et Erin aurait été précipitée dans les eaux. Elle l'attacha fermement, s'assurant que ses hommes puissent la suivre. Ils se précipitèrent à sa suite, passant une deuxième corde par-dessus la première afin de traverser plus facilement.
"On dirait que l'ennemi a la même idée," dit l'un d'eux en traversant. "Je suis sûr d'avoir vu une lumière de l’autre côté de la rivière."
"Où ça ?" demanda Erin en se jetant sur le côté d'un édifice, elle repéra un endroit avec des lumières trop proches de la rivière. Elle y courut, se dépêcha de traverser les ruelles, ses hommes à ses trousses.
Elle ralentit alors qu'elle se rapprochait, se déplaçait dans l'obscurité. Elle trouva un pont de corde entre deux bâtiments, un homme le traversait. Sûrement un messager mais sa mission importait peu aux yeux d'Erin, son but était d’éliminer les habitants de sa cité. Elle prit sa lance et coupa net, tranchant une des cordes d’un coup d’un seul.
L'homme sentit que quelque chose n'allait pas. Il fit demi-tour et repartit vers la berge mais Erin coupait déjà une deuxième corde. La silhouette du messager tomba dans l'eau en contrebas, Erin se retourna vers les hommes qui la suivaient.
"Nous ne pouvons pas les laisser," dit Erin. "Mais nous pouvons nous en servir. Nous allons nous faufiler et couper leurs ponts avec leurs hommes dessus. Nous tuerons ceux qui traversent. S'ils ont des ordres pour d’autres escouades dans la cité, nous ferons en sorte de les piéger. Nous trouverons un moyen de leur faire payer ce qu'ils nous font en leur ôtant la vie."
"Et qu'en est-il de nos vies ?" dit un des hommes.
"Vous voulez