Les enfants du capitaine Grant. Jules Verne

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Les enfants du capitaine Grant - Jules Verne

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      Puisque le temps devenait si favorable, puisque tous les voyageurs, sans en excepter Robert, se maintenaient en bonne santé, puisqu’enfin ce voyage débutait sous de si heureux auspices, il fallait en profiter et pousser en avant comme un joueur «pousse dans la veine». C’était l’avis de tous. La journée suivante, on marcha vivement, on franchit sans accident le rapide de Bell et le soir, en campant sur les bords du Rio Biobio, qui sépare le Chili espagnol du Chili indépendant, Glenarvan put encore inscrire trente-cinq milles de plus à l’actif de l’expédition. Le pays n’avait pas changé. Il était toujours fertile et riche en amaryllis, violettes arborescentes, fluschies, daturas et cactus à fleurs d’or. Quelques animaux se tenaient tapis dans les fourrés. Mais d’indigènes, on voyait peu. À peine quelques «guassos», enfants dégénérés des indiens et des espagnols galopant sur des chevaux ensanglantés par l’éperon gigantesque qui chaussait leur pied nu et passant comme des ombres. On ne trouvait à qui parler sur la route et les renseignements manquaient absolument, Glenarvan en prenait son parti. Il se disait que le capitaine Grant, prisonnier des Indiens, devait avoir été entraîné par eux au delà de la chaîne des Andes. Les recherches ne pouvaient être fructueuses que dans les pampas, non en deçà. Il fallait donc patienter, aller en avant, vite et toujours.

      Le 17, on repartit à l’heure habituelle et dans l’ordre accoutumé. Un ordre que Robert ne gardait pas sans peine, car son ardeur l’entraînait à devancer la madrina, au grand désespoir de sa mule.

      Il ne fallait rien de moins qu’un rappel sévère de Glenarvan pour maintenir le jeune garçon à son poste de marche.

      Le pays devint alors plus accidenté; quelques ressauts de terrains indiquaient de prochaines montagnes; les rios se multipliaient, en obéissant bruyamment aux caprices des pentes. Paganel consultait souvent ses cartes; quand l’un de ces ruisseaux n’y figurait pas, ce qui arrivait fréquemment, son sang de géographe bouillonnait dans ses veines, et il se fâchait de la plus charmante façon du monde.

      «Un ruisseau qui n’a pas de nom, disait-il, c’est comme s’il n’avait pas d’état civil! Il n’existe pas aux yeux de la loi géographique.»

      Aussi ne se gênait-il pas pour baptiser ces rios innommés; il les notait sur sa carte et les affublait des qualificatifs les plus retentissants de la langue espagnole.

      «Quelle langue! répétait-il, quelle langue pleine et sonore! C’est une langue de métal, et je suis sûr qu’elle est composée de soixante-dix-huit parties de cuivre et de vingt-deux d’étain, comme le bronze des cloches!

      —Mais au moins, faites-vous des progrès? lui répondit Glenarvan.

      —Certes! Mon cher lord! Ah! S’il n’y avait pas l’accent! Mais il y a l’accent!»

      Et en attendant mieux, Paganel, chemin faisant, travaillait à rompre son gosier aux difficultés de la prononciation, sans oublier ses observations géographiques. Là, par exemple, il était étonnamment fort et n’eût pas trouvé son maître. Lorsque Glenarvan interrogeait le catapaz sur une particularité du pays, son savant compagnon devançait toujours la réponse du guide. Le catapaz le regardait d’un air ébahi.

      Ce jour-là même, vers dix heures, une route se présenta, qui coupait la ligne suivie jusqu’alors.

      Glenarvan en demanda naturellement le nom, et naturellement aussi, ce fut Jacques Paganel qui répondit:

      «C’est la route de Yumbel à Los Angeles.»

      Glenarvan regarda le catapaz.

      «Parfaitement», répondit celui-ci.

      Puis, s’adressant au géographe:

      «Vous avez donc traversé ce pays? dit-il.

      —Parbleu! répondit sérieusement Paganel.

      —Sur un mulet?

      —Non, dans un fauteuil.»

      Le catapaz ne comprit pas, car il haussa les épaules et revint en tête de la troupe. À cinq heures du soir, il s’arrêtait dans une gorge peu profonde, à quelques milles au-dessus de la petite ville de Loja; et cette nuit-là, les voyageurs campèrent au pied des sierras, premiers échelons de la grande cordillère.

      Chapitre XII À douze mille pieds dans les airs

      La traversée du Chili n’avait présenté jusqu’ici aucun incident grave. Mais alors ces obstacles et ces dangers que comporte un passage dans les montagnes s’offraient à la fois. La lutte avec les difficultés naturelles allait véritablement commencer.

      Une question importante dut être résolue avant le départ. Par quel passage pouvait-on franchir la chaîne des Andes, sans s’écarter de la route déterminée? Le catapaz fut interrogé à ce sujet:

      «Je ne connais, répondit-il, que deux passages praticables dans cette partie des cordillères.

      —Le passage d’Arica, sans doute, dit Paganel, qui a été découvert par Valdivia Mendoza?

      —Précisément.

      —Et celui de Villarica, situé au sud du Nevado de ce nom?

      —Juste.

      —Eh bien, mon ami, ces deux passages n’ont qu’un tort, c’est de nous entraîner au nord ou au sud plus qu’il ne convient.

      —Avez-vous un autre paso à nous proposer? demanda le major.

      —Parfaitement, répondit Paganel, le paso d’Antuco, situé sur le penchant volcanique, par trente-sept degrés trente minutes, c’est-à-dire à un demi-degré près de notre route. Il se trouve à mille toises de hauteur seulement et a été reconnu par Zamudio De Cruz.

      —Bon, fit Glenarvan, mais ce paso d’Antuco, le connaissez-vous, catapaz?

      —Oui, mylord, je l’ai traversé, et si je ne le proposais pas, c’est que c’est tout au plus une voie de bétail qui sert aux indiens pasteurs des versants orientaux.

      —Eh bien, mon ami, répondit Glenarvan, là où passent les troupeaux de juments, de moutons et de bœufs, des pehuenches, nous saurons passer aussi.

      Et puisqu’il nous maintient dans la ligne droite, va pour le paso d’Antuco.»

      Le signal du départ fut aussitôt donné, et l’on s’enfonça dans la vallée de las Lejas, entre de grandes masses de calcaire cristallisé. On montait suivant une pente presque insensible. Vers onze heures, il fallut contourner les bords d’un petit lac, réservoir naturel et rendez-vous pittoresque de tous les rios du voisinage; ils y arrivaient en murmurant et s’y confondaient dans une limpide tranquillité. Au-dessus du lac s’étendaient de vastes «llanos», hautes plaines couvertes de graminées, où paissaient des troupeaux indiens.

      Puis, un marais se rencontra qui courait sud et nord, et dont on se tira, grâce à l’instinct des mules. À une heure, le fort Ballenare apparut sur un roc à pic qu’il couronnait de ses courtines démantelées. On passa outre. Les pentes devenaient déjà raides, pierreuses, et les cailloux, détachés par le sabot des mules, roulaient sous leurs pas en formant de bruyantes cascades de pierres. Vers trois heures, nouvelles ruines pittoresques d’un fort détruit dans le soulèvement

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