Aventures extraordinaires d'un savant russe: Le Soleil et les petites planètes. H. de Graffigny
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Gontran, sur les lèvres duquel un sourire railleur courait depuis quelques instants, s'écria en croisant les bras:
—En vérité! je vous admire,—si j'ai bien compris vos explications, il s'agirait de nous livrer tout simplement à des travaux d'analyse chimique... or, le premier point, le point indispensable pour mener à bien ce beau projet, ce sont les instruments... or...
Fricoulet, dont les yeux erraient à travers la pièce, fit un brusque mouvement:
—Inutile d'en dire davantage, interrompit-il d'un ton triomphant; je prévois ton objection; et voici de quoi y répondre triomphalement.
Il courut de l'autre côté de la salle, chercha quelques secondes dans un coin d'ombre, et revint traînant sur le sol, avec précaution, une caisse qu'il déposa aux pieds de M. de Flammermont.
—Qu'est-ce que cela! demanda celui-ci.
—Eh bien! dit à son tour Ossipoff.
—C'est votre boîte d'instruments!
—Comment cela?
—Vous savez bien; c'est cette caisse que l'on avait mise de côté pour analyser, dans un moment de loisir, la composition de l'atmosphère lunaire... or, les différents événements qui se sont précipités pendant notre séjour, nous ont fait différer indéfiniment cette étude par un bienheureux hasard, cette boîte a été oubliée ici et elle va nous servir, je vous le promets.
Et frappant sur le couvercle, il dit plaisamment à M. de Flammermont:
—Avec cela, vois-tu bien, nous allons te fabriquer des gigots et des pains de quatre livres puisque ces aliments sont absolument indispensables à ton bonheur.
La boîte une fois ouverte, le vieux savant ne put contenir une exclamation de plaisir à la vue des instruments enfouis dans la paille.
—Un eudiomètre, un anéroïde, des thermomètres, une boussole, des tubes, des éprouvettes, une boîte de réactifs, murmura-t-il, tandis que son visage s'éclairait à chaque découverte qu'il faisait, en voilà plus qu'il ne nous en faut.
Et, après un moment:
—Procédons par ordre, dit-il, la première chose à faire est de nous assurer de la composition de l'air que nous respirons et de l'importance de l'atmosphère, n'est-ce pas votre avis, mon cher Gontran?
—Parfaitement si, parfaitement si, répéta par deux fois le jeune homme.
Et il ajouta in petto, en se grattant l'oreille;
—Pourvu qu'il ne lui prenne pas fantaisie de me consulter sur la cuisine qu'il va faire!
Ce pensant, il coula un regard suppliant sur Fricoulet.
Celui-ci comprit cette muette prière et, réprimant un sourire, demanda au vieillard:
—Quelle méthode allons-nous suivre?
Et aussitôt, se reprenant:
—...Allez vous suivre pour opérer?
Le vieux savant réfléchit un instant.
—Mon Dieu!... Je pensais tout d'abord à la méthode eudiométrique imaginée par Gay-Lussac... mais, comme vous savez, on n'opère que sur de très petits volumes de gaz, d'où il résulte de grandes chances d'erreur; or, au point où nous en sommes, je n'ai pas le droit de me tromper et il me faut arriver à des résultats scrupuleusement exacts.
—En ce cas, s'écria Fricoulet, employez le phosphore; c'est le procède le plus simple et aussi le plus rapide.
—J'y pensais, répliqua sèchement Ossipoff.
Il prit dans la boîte à réactifs un verre à pied qu'il remplit aux deux tiers d'eau distillée, puis, plongeant dans l'eau, il enfonça une éprouvette graduée et contenant exactement cent centimètres cubes d'air, après quoi, il fit passer dans l'éprouvette un long bâton de phosphore humide.
Cela fait, il alla déposer l'appareil dans un coin et se mit à déballer les autres instruments.
Alors le jeune comte, qui avait regardé curieusement cette opération, attira Fricoulet en arrière.
—Explique-moi, lui chuchota-t-il à l'oreille.
—Le bâton de phosphore que tu vois reluire dans l'ombre, répondit l'ingénieur à voix basse, absorbe l'oxygène de l'air ambiant et se combine avec lui; tout à l'heure, quand le phosphore ne sera plus entouré de fumées blanches et qu'il aura perdu tout son rayonnement, Ossipoff retirera l'éprouvette et, comme elle est graduée, il n'aura qu'à ramener le nouveau volume de gaz à la pression initiale, pour constater qu'une certaine partie en a disparu, absorbée par le phosphore.
—C'est l'oxygène, n'est-ce pas? fit Gontran.
—En effet; et le gaz, demeurant dans l'éprouvette, devra être de l'azote...
—À moins cependant que l'atmosphère lunaire soit autrement composée que l'atmosphère terrestre, ainsi que je l'ai entendu dire à plusieurs reprises par M. Ossipoff.
À ce moment, le vieillard poussa un cri et, désignant la bougie de Fricoulet:
—Nous allons nous trouver dans l'obscurité, fit-il.
La mèche, en effet, se carbonisait et ne jetait plus que des lueurs vacillantes.
—Ah! si l'on pouvait faire du gaz, soupira Gontran.
Ossipoff frappa ses mains l'une contre l'autre:
—Pourquoi pas? exclama-t-il, j'entends du gaz liquide; c'est très simple, puisque nous avons de l'alcool et de la térébenthine.
Et pendant qu'il faisait le mélange dans un flacon de verre ordinaire, Fricoulet fabriquait, à l'aide d'une bande de coton, une mèche qui, plongée dans le liquide et allumée, s'enflamma aussitôt, répandant une lueur éclatante.
Gontran était stupéfait.
—Oh! ces hommes de science! pensa-t-il.
Mais déjà Ossipoff était passé à une autre occupation, et tout en rangeant ses instruments, il disait:
—Il ne faut pas nous en tenir à l'air; car l'eau doit également concourir à notre nutrition; vous avez été, tout comme moi, à même de remarquer que l'eau lunaire a un goût tout différent de l'eau des fleuves et mers terrestres... J'ai idée que l'analyse nous y fera découvrir quelque élément dont nous pourrons tirer parti... cette analyse, je vous propose de la faire par la pile électrique, laquelle nous donnera le rapport du volume des gaz, et