Les voyageurs du XIXe siècle. Jules Verne

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Les voyageurs du XIXe siècle - Jules Verne

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avait quitté Noschky le 22 mars, traversé les monts Vachouty et un pays inculte, presque désert jusqu'aux bords du Helmend, rivière qui se jette dans le lac Hamoun.

      «Le Helmend, dit Christie dans son rapport à la Compagnie, après avoir passé près de Candahar, coule sud-ouest et ouest, puis entre dans le Sedjistan environ à quatre jours de marche de Douchak; il décrit un détour le long des montagnes, puis il forme un lac. A Pellalek, où nous étions, il est à peu près large de douze cents pieds et très profond; son eau est très bonne. A la distance d'un demi-mille de chaque côté, le pays est cultivé par irrigations, ensuite le désert commence, il s'élève en falaises perpendiculaires. Les bords de la rivière abondent en tamarix et fournissent aussi la pâture aux bestiaux.»

      Le Sedjistan, situé sur les bords de cette rivière, ne renferme que cinq cents milles carrés. Les parties habitées sont les bords du Helmend, dont le lit s'enfonce tous les ans.

      A Elomdar, Christie envoya chercher un Hindou, auquel il était recommandé. Celui-ci lui conseilla de renvoyer ses Béloutchis et de prendre le caractère d'un pèlerin. Quelques jours plus tard, il pénétrait à Douchak, qui porte aussi le nom de Djellahabad.

      «Les ruines de l'ancienne ville couvrent un terrain au moins aussi grand que celui d'Ispahan, dit le voyageur. Elle a été bâtie, comme toutes les villes du Sedjistan, de briques à demi cuites; les maisons étaient à deux étages et avaient des toits voûtés. La ville moderne de Djellahabad est propre, jolie, et dans un état d'accroissement; elle renferme à peu près deux mille maisons et un bazar passable.»

      De Douchak à Hérat, Christie fit la route assez facilement, n'ayant à prendre que certaines précautions pour soutenir son personnage.

      Hérat est située dans une vallée entourée de hautes montagnes et arrosée par une rivière, ce qui fait qu'on ne voit partout que vergers et jardins. La ville couvre un espace de quatre milles carrés; elle est entourée d'un mur flanqué de tours et ceinte de fossés pleins d'eau. De grands bazars, garnis de nombreuses boutiques, la Mechedé-Djouma ou Mosquée du Vendredi, sont les principaux monuments de cette ville.

      Aucune cité n'a moins de terrains vagues et une population plus agglomérée. Christie l'estime à cent mille habitants. C'est peut-être, de toute l'Asie soumise aux princes indigènes, la ville la plus commerçante. Entrepôt du trafic entre Caboul, Candahar, l'Hindoustan, le Cachemire et la Perse, Hérat produit certaines marchandises recherchées, les soies, le safran, les chevaux et l'assa-fœtida.

      

      Costumes afghans.

       (Fac-simile. Gravure ancienne.)

      «Cette plante, dit Christie, croît à la hauteur de deux à trois pieds; la tige a deux pouces de diamètre; elle est terminée par une ombelle, qui, dans sa maturité, est jaune et ressemble à un chou-fleur. Les Hindous et les Béloutchis l'aiment beaucoup; ils la mangent, après avoir fait cuire la tige sous les cendres et étuver l'ombelle comme les autres plantes potagères; elle conserve néanmoins son goût et son odeur nauséabonde.»

      Comme tant d'autres villes orientales, Hérat possède de beaux jardins publics, mais on ne les soignait plus alors que pour leurs productions, qui étaient vendues au bazar.

      Au bout d'un mois de séjour à Hérat, sous le déguisement d'un marchand de chevaux, Christie quitte la ville, ayant adroitement semé le bruit de son prochain retour, après le pèlerinage qu'il comptait faire à Méched. Il se dirige sur Yezd, à travers un pays ravagé par les Ouzbecks, qui ont détruit les réservoirs destinés à recevoir l'eau de pluie.

      

      Une troupe de bayadères entra. (Page 52.)

      Yezd est une très grande ville, bien peuplée, à l'entrée d'un désert de sable. On lui donne le nom de «Dar-oul-Ebadet», ou le Siège de l'Adoration. Elle est renommée pour la sécurité dont on y jouit, ce qui a puissamment contribué au développement de son commerce avec l'Hindoustan, le Khorassan, la Perse et Bagdad.

      «Le bazar, dit Christie, est vaste et bien fourni de marchandises. Cette ville contient vingt mille maisons, indépendamment de celles des Guèbres. On estime le nombre de ces derniers à quatre mille. C'est un peuple actif et laborieux, quoique cruellement opprimé.»

      De Yezd à Ispahan, où il descendit au palais de l'émir Oud-Daoulé, Christie avait parcouru une distance de cent soixante-dix milles sur une bonne route. Il eut le plaisir de rencontrer dans cette dernière ville, comme nous l'avons dit, son compagnon Pottinger; les deux officiers n'eurent qu'à se féliciter mutuellement d'avoir si bien accompli leur mission et échappé à tous les dangers d'une route aussi longue, à travers des pays fanatisés.

      Comme on pourra peut-être en juger par le résumé que nous venons de faire, le récit de Pottinger est extrêmement curieux. Bien plus précis que la plupart de ses devanciers, il a porté à la connaissance publique une foule de faits historiques, d'anecdotes, d'appréciations et de descriptions géographiques des plus intéressants.

      Depuis le milieu du XVIIIe siècle, le Caboulistan n'avait cessé d'être le théâtre de guerres civiles acharnées. Des compétiteurs, qui s'attribuaient plus ou moins de droits au trône, avaient partout porté le fer et la flamme, et, de cette région, autrefois riche et florissante, ils avaient fait un désert, où les ruines des cités disparues semblaient le dernier témoignage d'une prospérité que l'on pouvait croire à jamais éteinte.

      Vers 1808, c'était Shujau-Oul-Moulk qui régnait à Caboul. L'Angleterre, plus inquiète qu'on ne l'a longtemps soupçonné des projets formés par Napoléon de l'attaquer dans l'Inde et des tentatives d'alliance qu'il avait faites auprès du shah de Perse par l'intermédiaire du général Gardane, résolut d'envoyer une ambassade au roi de Caboul, qu'il s'agissait de gagner aux intérêts de la Compagnie.

      L'ambassadeur choisi fut Mountstuart Elphinstone, qui nous a laissé un très intéressant récit de sa mission. On lui doit des informations absolument nouvelles sur toute cette région et sur les tribus qui la peuplent. Son livre a aujourd'hui un regain d'actualité, et l'on ne lit pas sans intérêt les pages consacrées aux Kybériens et aux autres peuplades montagnardes, mêlées aux événements qui se déroulent sous nos yeux.

      Parti de Delhi au mois d'octobre 1808, Elphinstone gagna Canound, où commence un désert de sable mouvant, puis entra dans le Shekhawuttée, canton habité par des Radjpouts. A la fin d'octobre, l'ambassade atteignait Singauna, jolie ville, dont le rajah était un enragé fumeur d'opium.

      «C'était, dit le voyageur, un petit homme, dont les gros yeux étaient enflammés par l'usage de l'opium. Sa barbe, relevée de chaque côté vers les oreilles, lui donnait un aspect sauvage et terrible.»

      Djounjounha, dont les jardins causent une impression de fraîcheur au milieu de ces déserts, ne dépend pas encore du rajah de Bikanir, dont les revenus ne dépassent pas 1,250,000 francs. Comment ce prince peut-il encore percevoir des revenus aussi considérables avec un territoire aride et désert, que parcourent en tous sens des millions de rats, des hordes de gazelles ou d'ânes sauvages?

      «Le sentier, à travers les montagnes

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