Histoire des Plus Célèbres Amateurs Étrangers. Dumesnil Antoine Jules

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Histoire des Plus Célèbres Amateurs Étrangers - Dumesnil Antoine Jules

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prouve que la cour de Rome n'avait pas accordé, ainsi qu'on l'a prétendu, des dispenses pour le mariage.

      L'orgueil britannique, blessé par ce dénoûment, chercha bientôt à se venger, en suscitant, contre l'Espagne et l'Empire, une ligne formidable, dans laquelle entrèrent la France, l'Angleterre, la Hollande et le duc de Savoie, unis par le traité d'Avignon. Le comte-duc s'attendait à cette levée de boucliers: il opposa, dans ces graves conjonctures, des forces imposantes à celles des ennemis de l'Espagne, et pendant quelque temps, au moins, les succès furent balancés.

      Ces graves événements n'empêchèrent pas le jeune roi de continuer sa vie de plaisirs et de dissipations, en abandonnant au ministre le fardeau tout entier de ces grandes affaires. Il avait été si satisfait du premier portrait de Velasquez, qu'il voulut en avoir un second de sa main. Mais, cette fois, il décida que le peintre le représenterait monté sur un des plus beaux chevaux de ses écuries. Philippe excellait dans l'art de l'équitation, et se livrait souvent à son goût pour la chasse à courre, en dirigeant, avec autant de hardiesse que de dextérité, les plus ardents coursiers des haras de Cordoue. Olivarès, qui était également un cavalier remarquable, s'était fait nommer grand écuyer du roi, pour ne perdre aucune occasion d'influence, et l'accompagner dans toutes ses parties de campagne. Juan Mateos, dans son traité de la chasse, raconte les exploits du monarque, soit qu'il forçât un sanglier de toute la vitesse de son cheval, traversant des bois, des fondrières et des marécages, soit qu'il poursuivît un cerf ou un lièvre avec les lévriers les plus agiles de sa meute, ne craignant pas de galoper sur des sentiers escarpés, bordés de précipices, et dans les passages les plus dangereux. Mais le peintre de Séville saurait-il représenter le noble coursier andalous, le genet d'Espagne, d'origine arabe, à l'œil de feu, à la crinière épaisse et flottante, à la noble encolure, aux jambes fines comme celles d'un cerf? Sans doute, l'élève de Pacheco avait suivi, dans le cours de ses études, les conseils de son maître, qui s'étend avec complaisance sur la représentation du noble animal destiné à porter l'homme113. Il est hors de doute, en voyant au musée de Madrid le portrait équestre de Philippe IV, que Velasquez ne devait pas être à son coup d'essai pour dessiner et peindre des chevaux. Le roi galope à travers une campagne accidentée: il est couvert d'une armure d'acier avec filets d'or; une écharpe cramoisie flotte sur sa poitrine, et il tient dans sa main droite le bâton de commandement114. «Le tout, dit Pacheco115, est peint d'après nature, même le paysage.»

      Si le premier portrait de Philippe avait suffi pour donner à la cour la plus haute opinion du talent du peintre, celui-ci produisit encore plus d'effet. Son succès fut si grand, que les amis de l'artiste demandèrent au roi l'autorisation de le montrer au public. Cette demande, qui flattait le goût du prince, fut facilement accordée, et l'on vit ce portrait exposé dans la calle mayor de Madrid, vis-à-vis de saint Philippe, à l'admiration du public tout entier, et au vif désappointement des envieux du jeune artiste; «ce dont, dit Pacheco116, j'ai été témoin.» Raphaël Mengs place ce portrait au nombre des meilleurs de Velasquez: – «Ce qui est surtout extraordinaire, dit-il, c'est la manière facile et franche avec laquelle est peinte la tête, dont la peau brille d'un teint naturel, et tout, jusqu'aux cheveux qui sont très-beaux, est exécuté avec la plus grande légèreté117

      Plusieurs beaux esprits de la cour composèrent, en l'honneur de ce portrait, des pièces de vers dans lesquelles, tout en louant l'artiste, ils flattaient encore plus le monarque. Pacheco rapporte ceux de don Geronimo Gonzalès de Villanueva, poëte distingué de Séville, qui fit, dans cent vingt-deux vers ampoulés, l'éloge emphatique du roi, qu'il appelle:

      «Copia felix de Numa o de Trajano.»

      «Heureuse ressemblance de Numa ou de Trajan118.» Pacheco, alors à Madrid, et au comble de la joie, voulut aussi féliciter son élève et gendre de son éclatant succès, et lui chanter le sic itur ad astra. Il le fit dans le sonnet suivant, où éclatent à la fois l'attachement du père, la satisfaction du maître, l'admiration de l'artiste et l'enthousiasme d'un fidèle Espagnol:

      «Vuela, o joven valiente, en la Ventura

      De tu raro principio, la privança

      Onre la possesion, no la esperança

      D'el lugar que alcançaste en la pintura.

      Animete l'Augusta alta figura

      D'el monarca mayor qu'el orbe alcança,

      En cuyo aspecto teme la mudança

      Aquel que tanta luz mirar procura.

      Al calor d'este sol tiempla tu buelo,

      I veras cuanto estiende tu memoria

      La Fama, por tu ingenio i tus pinzeles.

      Qu'el planeta benigno a tanto cielo,

      Tu nombre illustrara con nueva gloria

      Pues es mas que Alexandre, i tu su Apeles119»

      «Vole, ô vaillant jeune homme, soutenu par le succès de ton rare début: la faveur et non l'espérance honore maintenant la place que tu as su conquérir dans l'art de la peinture. Anime la noble figure de l'auguste monarque, le plus grand de ceux qui gouvernent le monde; crains de rien changer à la ressemblance du prince qui t'accorde la grâce de contempler un si grand astre. Élève ton vol à la chaleur de ce soleil, et tu verras comme la Renommée étendra ta mémoire, à l'aide de ton génie et de tes pinceaux. Cet astre, si bienfaisant dans le ciel, illustrera ton nom d'une gloire nouvelle, puisqu'il est plus grand qu'Alexandre, et que tu es son Apelles.»

      Le roi fut encore plus satisfait de ce portrait que du premier. Il en témoigna sa satisfaction à Velasquez en lui donnant, d'abord une gratification de trois cents ducats, une pension annuelle de pareille somme et un logement évalué deux cents ducats par an. Mais, comme la pension était assignée sur un bénéfice ecclésiastique, et qu'il fallait, pour pouvoir la toucher, obtenir une dispense du pape, l'artiste ne put commencer à en jouir qu'en 1626.

      Il est probable qu'après avoir exécuté le portrait équestre du roi, Velasquez ne manqua pas de faire celui du premier ministre, son protecteur. Le musée de Madrid en possède un120 d'une grande beauté, qui peut rivaliser avec celui de Philippe IV: on dirait même qu'il a été composé pour lui servir de pendant. Le comte-duc est également monté sur un magnifique cheval lancé au galop; il tient dans sa main droite le bâton de commandement, il est revêtu d'une armure sur laquelle se détache une écharpe cramoisie, et sa tête est couverte d'un large sombrero à bords rabattus.

      Bientôt, le roi voulut mettre Velasquez à une épreuve plus sérieuse. Pour conserver le souvenir de l'expulsion des Maures, ordonnée par son père, événement qui, pour le dire en passant, dépeupla plusieurs provinces, et enleva plus de deux cent mille habitants à l'Espagne, Philippe IV décida qu'un concours serait ouvert entre les peintres de la cour. Pacheco ne nomme pas ces peintres: il dit seulement que Velasquez peignit: «une grande toile avec le portrait du roi Philippe III, et l'expulsion inespérée des Maures, en concurrence avec trois peintres du roi121.» Il est probable que ces artistes étaient Eugenio Caxes, Vicencio Carducho et Angelo Nardi, dont nous avons parlé précédemment. Les juges de ce concours furent le frère Juan Mayno, que nous avons également fait connaître, et le marquis Jean-Baptiste Crescenzi, chevalier de Santiago, et alors architecte de l'Escurial, tous les deux, dit Pacheco, grands connaisseurs en peinture. Ces juges décidèrent en faveur de Velasquez. Malheureusement, son tableau n'est pas parvenu jusqu'à nous; soit qu'il ait été perdu, soit qu'il ait été détruit dans un incendie, ou pendant les guerres qui ont désolé l'Espagne:

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<p>113</p>

Voy. le chapitre IX, liv. III, Arte de la pintura, p. 427 et suivantes.

<p>114</p>

Catalogo, 299.

<p>115</p>

P. 102.

<p>116</p>

Ibid.

<p>117</p>

Lettre de Raphaël Mengs à D. Antonio Ponz, dans le Recueil de Bottari, 2e édition de Ticozzi, in-12, t. VI, p. 305.

<p>118</p>

P. 106-109, Arte de la pintura.

<p>119</p>

P. 110, ibid.

<p>120</p>

Catalogo, nº 177.

<p>121</p>

P. 103.