Le comte de Moret. Alexandre Dumas
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Nous avons eu tort de dire que la porte s'ouvrait, nous eussions dû dire s'entre-bâillait seulement, car ce ne fut que quand le jeune homme eut prononcé le nom de Marina et que celle qu'il désignait sous ce nom, comme par une espèce de mot d'ordre, lui eut répondu par celui de Jaquelino, que la porte s'ouvrit tout à fait, et que celle qui en était la gardienne s'effaça pour laisser entrer celui qu'elle attendait et derrière lequel elle referma vivement le battant au verrou, se retournant aussitôt d'ailleurs, pressée qu'elle était sans doute de voir celui à qui elle avait affaire.
—Ventre-Saint-Gris! s'écria le jeune homme, que j'ai là une succulente cousine.
—Et moi sur mon âme, un beau cousin! dit la jeune femme.
—Par ma foi! continua Jaquelino, quand on est si proches parents que nous le sommes et qu'on ne s'est jamais vu, m'est avis que l'on doit commencer à faire connaissance en s'embrassant.
—Je n'ai rien à dire contre cette manière de souhaiter la bienvenue à ses parents, répondit Marina en tendant ses deux joues qui se couvrirent d'une rougeur passagère, à laquelle un habile observateur ne se fût pas trompé, et qu'il eût attribuée à un désir facile à irriter plutôt qu'à une pudeur trop susceptible.
Les deux jeunes gens s'embrassèrent.
—Ah! par l'âme de mon joyeux père, dit le jeune homme avec un accent de bonne humeur qui paraissait lui être naturelle, la plus agréable chose de ce monde est, je crois, d'embrasser une jolie femme, si ce n'est cependant de recommencer, ce qui doit être plus agréable encore.
Et il étendit les bras une seconde fois, pour joindre le précepte aux paroles.
—Tout beau! cousin, dit la jeune femme en l'arrêtant court, nous causerons de cela plus tard, si vous voulez bien; non point que la chose ne me paraisse aussi plaisante qu'à vous, mais parce que le temps nous manque. C'est votre faute; pourquoi avez-vous perdu une demi-heure à me faire vous attendre?
—Eh! pardieu, la belle demande, parce que je croyais être attendu par quelque grosse nourrice allemande, ou par quelque sèche duègne espagnole; mais vienne l'occasion de nous retrouver ensemble, et je jure Dieu, ma belle cousine, que c'est moi qui vous attendrai.
—Je prends acte de la promesse; mais à cette heure, je n'en suis pas moins pressée d'aller dire à celle qui m'envoie que je vous ai vu et que vous êtes prêt en tout point à obéir à ses ordres, comme il convient à un courtois chevalier à l'égard d'une grande princesse.
—Ces ordres, dit le jeune homme en mettant un genou en terre, je les attends humblement.
—Oh! vous à mes genoux, Monseigneur! Monseigneur! y songez-vous? s'écria Marina en le relevant.
Puis elle ajouta avec son provocant sourire:
—C'est dommage, vous êtes charmant ainsi.
—Voyons, dit le jeune homme, en prenant les mains de sa prétendue cousine et en la faisant asseoir près de lui, d'abord et avant tout, a-t-on appris mon retour avec satisfaction?
—Avec joie.
—Est-ce avec plaisir que l'on m'accorde cette audience?
—Avec bonheur.
—Et la mission dont je suis chargé sera-t-elle accueillie avec sympathie?
—Avec enthousiasme.
—Et cependant, voilà huit jours que je suis arrivé, et deux jours que j'attends.
—Vous êtes charmant, en vérité, mon cousin. Et combien y a-t-il de jours, je vous prie, que nous-mêmes sommes arrivée de La Rochelle: deux jours et demi.
—C'est vrai.
—Et sur ces deux jours et demi, à quoi ont été occupés hier et avant-hier?
—A des fêtes, je le sais, puisque je les ai vues!
—D'où les avez-vous vues?
—Mais de la rue, comme un simple mortel.
—Comment les avez-vous trouvées?
—Superbes.
—N'est-ce pas qu'il a de l'imagination, notre cher cardinal? Sa Majesté Louis XIII déguisé en Jupiter.
—Et en Jupiter Stator.
—Stator ou autre, peu m'importe.
—Ah! il n'importe pas si peu, ma belle cousine; toute la question au contraire est là.
—Là! Où?
—Dans le mot Stator. Savez-vous ce que veut dire stator?
—Ma foi, non.
—Cela veut dire Jupiter qui arrête, ou qui s'arrête.
—Tâchons que ce soit Jupiter qui s'arrête.
—Au pied des Alpes, n'est-ce pas?
—Nous ferons tout ce que nous pourrons pour cela. Dieu merci, malgré la foudre qu'il tenait à la main, et dont il menaçait à la fois l'Autriche et l'Espagne...
—Foudre de bois...
—Et sans ailes; les ailes de la foudre, à l'endroit de la guerre, c'est l'argent, et je ne crois pas le roi ni le cardinal très riches en ce moment. Donc, chère cousine, Jupiter Stator, après avoir menacé l'Orient et l'Occident, déposera probablement la foudre sans l'avoir lancée.
—Oh! dites cela ce soir à nos deux pauvres reines, et vous les rendrez bien heureuses.
—J'ai mieux que cela à leur dire, j'ai à leur remettre, comme je l'ai fait savoir à Leurs Majestés, une lettre du prince de Piémont, qui jure bien que l'armée française ne passera pas les Alpes.
—Pourvu que cette fois il tienne parole! Ce n'est pas son habitude, vous le savez.
—Mais cette fois, il a tout intérêt à la tenir.
—Nous bavardons, cousin, nous bavardons, et nous laissons le temps se perdre inutilement.
—C'est