Discours par Maximilien Robespierre — 17 Avril 1792-27 Juillet 1794. Robespierre Maximilien

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Discours par Maximilien Robespierre — 17 Avril 1792-27 Juillet 1794 - Robespierre Maximilien

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souverain, qui peut empêcher qu'il ne l'examine tout entière? Qui peut lui contester le droit de revoir le procès, de recevoir les mémoires, d'entendre la justification de l'accusé, de l'admettre à demander grâce à la nation assemblée, et dès lors de plaider la cause tout entière? Croit-on que les partisans hypocrites du système contraire à l'égalité négligeront de faire valoir ces motifs, et de réclamer le plein exercice des droits de la souveraineté? Voilà donc nécessairement une procédure commencée dans chaque assemblée primaire. Mais fût-elle réduite à la question de la peine, encore faudra-t-il qu'elle soit discutée? Et qui ne croira pas avoir le droit de la discuter éternellement, quand l'assemblée conventionnelle n'aura pas osé la décider elle-même? Qui peut indiquer le terme où cette grande affaire serait terminée? La célérité du dénouement dépendra des intrigues qui agiteront chaque section des diverses sections de la France; ensuite de l'activité ou de la lenteur avec lesquelles les suffrages seront recueillis par les assemblées primaires; ensuite de la négligence ou du zèle, de la fidélité ou de la partialité avec laquelle ils seront recensés par les directoires, et transmis à la Convention nationale, qui en fera le relevé? Cependant, la guerre étrangère n'est point terminée; la saison approche, où tous les despotes alliés ou complices de Louis XVI doivent déployer toutes leurs forces contre la république naissante; et ils trouveront la nation délibérante sur Louis XVI! Ils la trouveront occupée à décider s'il a mérité la mort, interrogeant le Code pénal, ou pesant les motifs de le traiter avec indulgence ou avec sévérité. Ils la surprendront épuisée, fatiguée par ces scandaleuses dissensions. Alors, si les amis intrépides de la liberté, aujourd'hui persécutés avec tant de fureur, ne sont point encore immolés, ils auront quelque chose de mieux à faire que de disputer sur un point de procédure; il faudra qu'ils volent à la défense de la patrie; il faudra qu'ils laissent la tribune et le théâtre des assemblées, converties en arènes de chicaneurs, aux amis naturels de la royauté, aux riches, aux égoïstes, aux hommes lâches et faibles, à tous les champions du feuillantisme et de l'aristocratie. Mais quoi! les citoyens qui combattent aujourd'hui pour la liberté, tous nos frères qui ont abandonné leurs femmes et leurs enfants pour voler à son secours, pourront-ils délibérer dans vos villes et dans vos assemblées, lorsqu'ils seront dans nos camps ou sur le champ de bataille? Et qui, plus qu'eux, aurait droit de voter dans la cause de la tyrannie et de la liberté? Les paisibles citadins auront-ils le privilège de la décider en leur absence? Que dis-je, cette cause n'est-elle pas particulièrement la leur? Ne sont-ce pas nos généreux soldats des troupes de ligne qui, dès les premiers jours de la révolution, ont méprisé les ordres sanguinaires de Louis, commandant le massacre de leurs concitoyens? Ne sont-ce pas eux qui, depuis ce temps, ont été persécutés par la cour, par Lafayette, par tous les ennemis du peuple? Ne sont-ce pas nos braves volontaires qui, dans les derniers temps, ont sauvé la patrie avec eux, par leur sublime dévouement, en repoussant les satellites du despotisme, que Louis a ligués contre nous? Absoudre le tyran ou ses pareils, ce serait les condamner eux-mêmes; ce serait les vouer à la vengeance du despotisme et de l'aristocratie, qui n'a jamais cessé de les poursuivre; car de tout temps il y aura un combat à mort entre les vrais patriotes et les oppresseurs de l'humanité: ainsi, tandis que tous les citoyens les plus courageux répandraient le reste de leur sang pour la patrie, la lie de la nation, les hommes les plus lâches et les plus corrompus, tous ces reptiles de la chicane, tous les bourgeois orgueilleux et aristocrates, tous les ci-devant privilégiés, cachés sous le masque du civisme, tous les hommes nés pour ramper et pour opprimer sous un roi, maîtres des assemblées désertées par la vertu simple et indigente, détruiraient impunément l'ouvrage des héros de la liberté, livreraient leurs femmes et leurs enfants à la servitude, et, seuls, décideraient insolemment des destinées de l'Etat! Voilà donc le plan affreux que l'hypocrisie la plus profonde, disons le mot, que la friponnerie la plus éhontée ose cacher sous le nom de la souveraineté du peuple, qu'elle veut anéantir. Mais ne voyez-vous pas que ce projet ne tend qu'à détruire la Convention elle-même; que, les assemblées primaires une fois convoquées, l'intrigue et le feuillantisme les détermineront à délibérer sur toutes les propositions qui pourront servir leurs vues perfides; qu'elles remettront en question jusqu'à la proclamation de la république, dont la cause se lie naturellement aux questions qui concernent le roi détrôné? Ne voyez-vous pas que la tournure insidieuse donnée au jugement de Louis ne fait que reproduire, sous une autre forme, la proposition qui vous fut faite dernièrement par Guadet de convoquer les assemblées primaires pour réviser le choix des députés, et que vous avez alors repoussée avec horreur? Ne voyez-vous point, dans tous les cas, qu'il est impossible qu'une si grande multitude d'assemblées soient entièrement d'accord, et que cette seule division, au moment de l'approche des ennemis, est la plus grande de toutes les calamités? Ainsi la guerre civile unira ses fureurs au fléau de la guerre étrangère; et les intrigants ambitieux transigeront avec les ennemis du peuple, sur les ruines de la patrie, et sur les cadavres sanglants de ses défenseurs.

      Et c'est au nom de la paix publique, c'est sous le prétexte d'éviter la guerre civile qu'on vous propose cette motion insensée! On craint la guerre civile, on craint le retour de la royauté, si vous punissez promptement le roi qui a conspiré contre la liberté; le moyen de détruire la tyrannie, c'est de conserver le tyran; le moyen de prévenir la guerre civile, c'est d'en allumer sur-le-champ le flambeau. Cruels sophistes; c'est ainsi qu'on a raisonné de tout temps pour nous tromper. N'est-ce pas au nom de la paix et de la liberté même que Louis, Lafayette, et tous ses complices, dans l'Assemblée constituante et ailleurs, troublaient l'Etat, calomniaient et assassinaient le patriotisme?

      Pour vous déterminer à accueillir cet étrange système, on vous a fait un dilemme non moins étrange, selon moi: "ou bien le peuple veut la mort du tyran, ou il ne la veut pas; s'il la veut, quel inconvénient de recourir à lui? s'il ne la veut pas, de quel droit pouvez-vous l'ordonner?"

      Voici ma réponse: d'abord je ne doute pas, moi, que le peuple la veuille, si vous entendez par ce mot la majorité de la nation, sans en exclure la portion la plus nombreuse, la plus infortunée et la plus pure de la société, celle sur qui pèsent tous les crimes de l'égoïsme et de la tyrannie. Cette majorité a exprimé son voeu au moment où elle secoua le joug de votre ci-devant roi; elle a commencé, elle a soutenu la révolution; elle a des moeurs, cette majorité, elle a du courage; mais elle n'a ni finesse, ni éloquence; elle foudroie les tyrans, mais elle est souvent la dupe des fripons. Cette majorité ne doit point être fatiguée par des assemblées continuelles, où une minorité intrigante domine trop souvent. Elle ne peut être dans vos assemblées politiques, quand elle est dans ses ateliers; elle ne peut juger Louis XVI, quand elle nourrit à la sueur de son front les robustes citoyens qu'elle donne à la patrie. Je me fie à la volonté générale, surtout dans les moments où elle est éveillée par l'intérêt pressant du salut public; je redoute l'intrigue, surtout dans les troubles qu'elle amène, et au milieu des pièges qu'elle a longtemps préparés. Je redoute l'intrigue, quand les aristocrates encouragés relèvent une tête altière; quand les émigrés reviennent, au mépris des lois; quand l'opinion publique est travaillée par les libelles, dont une faction toute-puissante inonde la France, qui ne disent jamais un mot de république, qui n'éclairent jamais les esprits sur le procès de Louis le dernier, qui ne propagent que les opinions favorables à sa cause, qui calomnient tous ceux qui poursuivent sa condamnation avec le plus de zèle. Je ne vois donc dans votre système que le projet de détruire l'ouvrage du peuple et de rallier les ennemis qu'il a vaincus. Si vous avez un respect si scrupuleux pour sa volonté souveraine, sachez la respecter; remplissez la mission qu'il vous a confiée. C'est se jouer de la majesté du souverain que de lui renvoyer une affaire qu'il vous a chargés de terminer promptement. Si le peuple avait le temps de s'assembler pour juger des procès ou pour décider des questions d'Etat, il ne vous eût point confié le soin de ses intérêts. La seule manière de lui témoigner notre fidélité, c'est de faire des lois justes, et non de lui donner la guerre civile. Et de quel droit faites-vous l'injure au peuple de douter de son amour pour la liberté? Affecter un pareil doute, qu'est-ce autre chose que le faire naître et favoriser l'audace de tous les partisans de la royauté?

      Répondez vous-mêmes à cet autre dilemme: ou vous croyez que l'intrigue dominera dans les délibérations que vous provoquez,

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