David Copperfield – Tome I. Чарльз Диккенс

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David Copperfield – Tome I - Чарльз Диккенс

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que j'examinais le soir quand j'étais couché. Toutes les nuits j'avais des rêves où je voyais tantôt ma mère telle qu'elle était jadis, tantôt l'intérieur de M. Peggotty; ou bien je voyageais sur l'impériale de la diligence, ou je dînais avec mon malheureux ami le garçon d'hôtel; et partout je voyais tout le monde me regarder d'un air effaré; on venait de s'apercevoir que je n'avais pour tout vêtement que ma chemise de nuit et mon écriteau.

      Cette vie monotone et la frayeur que me causait la fin prochaine des vacances, me causaient une affliction intolérable. J'avais chaque jour de longs devoirs à faire pour M. Mell, mais je les faisais (M. Murdstone et sa soeur n'étaient plus là), et je ne m'en tirais pas mal. Avant et après mes heures d'étude je me promenais, sous la surveillance, comme je l'ai déjà dit, de l'homme à la jambe de bois. Je me rappelle encore, comme si j'y étais, tout ce que je voyais dans ces promenades, la terre humide autour de la maison, les pierres couvertes de mousse dans la cour, la vieille fontaine toute fendue et les troncs décolorés de quelques arbres ratatinés qui avaient l'air d'avoir reçu plus de pluie et moins de rayons de soleil que tous les arbres du monde ancien et moderne. Nous dînions à une heure, M. Mell et moi, au bout d'une longue salle à manger parfaitement nue, où on ne voyait que des tables de sapin qui sentaient le graillon, et puis nous nous remettions à travailler jusqu'à l'heure du thé; M. Mell buvait son thé dans une petite tasse bleue, et moi dans un petit pot d'étain. Pendant toute la journée et jusqu'à sept ou huit heures du soir, M. Mell était établi à son pupitre dans la salle d'études; il s'occupait sans relâche à faire les comptes du dernier semestre, sans quitter sa plume, son encrier, sa règle et ses livres. Quand il avait tout rangé le soir, il tirait sa flûte et soufflait dedans avec une telle énergie que je m'attendais à tout moment à le voir passer par le grand trou de son instrument, jusqu'à son dernier souffle, et à le voir fuir par les clefs.

      Je me vois encore, pauvre petit enfant que j'étais alors, la tête dans mes mains au milieu de la pièce à peine éclairée, écoutant la douloureuse harmonie de M. Mell tout en méditant sur mes leçons du lendemain; je me vois également, mes livres fermés à côté de moi, prêtant toujours l'oreille à la douloureuse harmonie de M. Mell, et croyant entendre à travers ces sons lamentables le bruit lointain de la maison paternelle et le sifflement du vent sur les dunes de Yarmouth. Ah! combien je me sens isolé et triste! je me vois montant me coucher dans des chambres presque désertes, et pleurant dans mon petit lit au souvenir de ma chère Peggotty; je me vois descendant l'escalier le lendemain matin et regardant, par un carreau cassé de la lucarne qui l'éclaire, la cloche de la pension suspendue tout en haut d'un hangar, avec une girouette par dessus; je la contemple et je songe avec effroi au temps où elle appellera à l'étude Steerforth et ses camarades, et pourtant j'ai encore bien plus peur du moment fatal où l'homme à la jambe de bois ouvrira la grille aux gonds rouillés pour laisser passer le redoutable M. Creakle. Je ne crois pas avec tout cela que je sois un très-mauvais sujet, mais je n'en porte pas moins le placard toujours sur mon dos.

      M. Mell ne me disait pas grand'chose, mais il n'était pas méchant avec moi; je suppose que nous nous tenions mutuellement compagnie sans nous parler. J'ai oublié de dire qu'il se parlait quelquefois à lui-même, et qu'alors il grinçait des dents, il serrait les poings et il se tirait les cheveux de la façon la plus étrange; mais c'était une habitude qu'il avait comme ça. Dans les commencements cela me faisait peur, mais je ne tardai pas à m'y faire.

       CHAPITRE VI

      J'agrandis le cercle de mes connaissances

      Je menais cette vie depuis un mois environ, lorsque l'homme à la jambe de bois se mit à parcourir la maison avec un balai et un seau d'eau; j'en conclus qu'on préparait tout pour recevoir M. Creakle et ses élèves. Je ne me trompais pas, car bientôt le balai envahit la salle d'étude et nous en chassa M. Mell et moi. Nous allâmes vivre je ne sais où et je ne sais comment; ce que je sais bien, c'est que, pendant plusieurs jours, nous rencontrions partout deux ou trois femmes, que je n'avais qu'à peine entrevues jusqu'alors, et que j'avalai une telle quantité de poussière que j'éternuais aussi souvent que si Salem-House avait été une vaste tabatière.

      Un jour M. Mell m'annonça que M. Creakle arriverait le soir. Après le thé, j'appris qu'il était arrivé; avant l'heure de me coucher, l'homme à la jambe de bois vint me chercher pour comparaître devant lui.

      M. Creakle habitait une portion de la maison beaucoup plus confortable que la nôtre; il avait un petit jardin qui paraissait charmant à côté de la récréation, sorte de désert en miniature, où un chameau et un dromadaire se seraient trouvés comme chez eux. Je me trouvai bien hardi d'oser remarquer qu'il n'y avait pas jusqu'au corridor qui n'eût l'air confortable, tandis que je me rendais tout tremblant chez M. Creakle. J'étais tellement abasourdi en entrant, que je vis à peine mistress Creakle ou miss Creakle qui étaient toutes deux dans le salon. Je ne voyais que M. Creakle, ce bon et gros monsieur qui portait un paquet de breloques à sa montre: il était assis dans un fauteuil, avec une bouteille et un verre à côté de lui.

      «Ah! dit M. Creakle, voilà le jeune homme dont il faut limer les dents. Faites-le retourner.»

      L'homme à la jambe de bois me retourna de façon à montrer le placard, puis lorsque M. Creakle eut eu tout le temps de le lire, il me replaça en face du maître de pension, et se mit à côté de lui. M. Creakle avait l'air féroce, ses yeux étaient petits et très-enfoncés; il avait de grosses veines sur le front, un petit nez et un menton très-large. Il était chauve, et n'avait que quelques petits cheveux gras et gris, qu'il lissait sur ses tempes, de façon à leur donner rendez-vous au milieu du front. Mais ce qui chez lui me fit le plus d'impression, c'est qu'il n'avait presque pas de voix et parlait toujours tout bas. Je ne sais si c'est qu'il avait de la peine à parler même ainsi, ou si le sentiment de son infirmité l'irritait, mais, toutes les fois qu'il disait un mot, son visage prenait une expression encore plus méchante, ses veines se gonflaient, et quand j'y réfléchis, je comprends que ce soit là ce qui me frappa d'abord, comme ce qu'il y avait chez lui de plus remarquable.

      «Voyons, dit M. Creakle. Qu'avez-vous à m'apprendre sur cet enfant?

      – Rien encore, répartit l'homme à la jambe de bois. Il n'y a pas eu d'occasion.»

      Il me sembla que M. Creakle était désappointé. Il me sembla que mistress Creakle et sa fille (que je venais de regarder pour la première fois, et qui étaient maigres et silencieuses à l'envi l'une de l'autre), n'étaient pas désappointées.

      «Venez ici, monsieur! dit M. Creakle en me faisant signe de la main.

      – Venez ici! dit l'homme à la jambe de bois en répétant le geste de M. Creakle.

      – J'ai l'honneur de connaître votre beau-père, murmura M. Creakle en m'empoignant par l'oreille. C'est un digne homme, un homme énergique. Il me connaît, et moi je le connais. Me connaissez- vous, vous? hein! dit M. Creakle en me pinçant l'oreille avec un enjouement féroce.

      – Pas encore, monsieur! dis-je tout en gémissant.

      – Pas encore? hein? répéta M. Creakle. Cela viendra, hein?

      – Cela viendra! hein?» répéta l'homme à la jambe de bois.

      Je découvris plus tard que son timbre retentissant lui procurait l'honneur de servir d'interprète à M. Creakle auprès de ses élèves.

      J'étais horriblement effrayé et je me contentai de dire que je l'espérais bien. Mais tout en parlant, je me sentais l'oreille tout en feu, il la pinçait si fort!

      «Je vais vous dire ce que je suis, murmura M. Creakle en lâchant enfin mon oreille, mais après l'avoir tordue de façon à me faire venir les larmes aux yeux. Je suis un Tartare.

      – Un

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