Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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une quantité d'eau considérable; sitôt exposées à l'air, une grande partie de cette eau tend à s'évaporer, et arrive successivement du coeur à la surface. En faisant ce trajet, cette eau entraîne avec elle une certaine quantité de carbonate de chaux en dissolution qui se cristallise sur le parement, et forme une croûte ferme, résistante, qui non-seulement préserve la pierre des agents extérieurs, mais lui donne une patine, une couverte que rien ne peut remplacer. Les constructeurs du moyen âge ayant eu pour habitude de tailler définitivement la pierre sur le chantier avant le montage et la pose, il en résultait que cette patine se formait sur les moulures et sur les sculptures comme sur les parements, et que l'édifice construit était uniformément recouvert de cette croûte produite par ce qu'on appelle l'eau de carrière. C'était un double avantage: parements résistant mieux aux agents atmosphériques, et belle couleur uniforme et chaude que donne cette patine naturelle. L'usage moderne de monter les édifices épannelés seulement et de faire les ravalements très-longtemps souvent après que la pose a été achevée, d'enlever sur ces matériaux mis en oeuvre 1 ou 2 centimètres d'épaisseur et quelquefois plus, a pour conséquence de détruire à tout jamais cette croûte préservatrice, puisqu'elle ne se forme sur les parements qu'autant que la pierre est fraîchement extraite de la carrière. Cet usage moderne est particulièrement funeste à la conservation des pierres tendres, telles que le banc royal de l'Oise, les vergetés, les calcaires de Saintonge, de Caen, les calcaires alpins de Beaucaire, les calcaires tendres de Bourgogne, les pierres de Molènes, de Mailly-la-Ville, de Courson, de Tonnerre; les craies. Mais que dire de cet autre usage de gratter à vif des parements anciens? On leur enlève ainsi l'élément conservateur qui les a préservés pendant plusieurs siècles; on tue la pierre, pour nous servir d'une expression du métier. Aussi, après cette opération barbare, voit-on souvent des matériaux qui ne présentaient aucun signe d'altération, se décomposer rapidement à la surface, s'efflorer, puis se creuser, sans que la maladie qui les atteint puisse être arrêtée 111. Les pierres tendres ne sont pas, d'ailleurs, les seules qui se recouvrent d'une patine résistante naturelle, étant fraîchement taillées. Des pierres dures, comme les liais, les cliquarts, présentent les mêmes phénomènes, et nous avons vu des liais en oeuvre depuis cinq et six cents ans qui avaient pris à la surface une couverte à peine attaquable avec le ciseau, tandis qu'à un demi-centimètre de profondeur le calcaire se rayait avec l'ongle. Les pierres dites froides, comme celles des carrières de Château-Landon, par exemple, sont les seules qui ne perdent rien à être taillées longtemps après leur extraction. Quant aux grès, tout le monde sait qu'ils ne peuvent être taillés que fraîchement sortis de la carrière. Certains grès rouges des Vosges sont inattaquables à l'outil au bout de plusieurs années, bien qu'au sortir du sol ils soient maniables.

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      1

       Récit des temps mérovingiens, par Augustin Thierry, récit 1er.

      2

       Charlemagne avait aussi des palais dans des villes, celui d'Aix entre autres, qui passait pour très beau.

      3

       Hist. du duché de Valois, par le P. Carlier, prieur d'Andrezy, 1764, t. 1, liv. II, p. 169.

      4

       Mallobergium, Malbergium, maison des plaids, lieu où l'on rendait la justice. (Voir Du Cange, Glossaire.)

      5

       Ce fut dans cette tour que Montgomery fut enfermé après le tournoi qui fut si fatal à Henri II.

      6

       Ainsi que le constatent deux dessins fort curieux, représentant les démolitions du palais avant la construction de la façade actuelle sur la cour du May. Ces dessins, qui appartenaient à M. Lassus, ont été lithographiés pour faire partie d'une monographie du Palais, qui n'a pas été publiée.

      7

       Antiquités de Paris.

      8

       Voy. l'Hist. topogr. et archéol. de l'anc. Paris, par MM. A. Lenoir et A. Berty (feuille X).

      9

       Voyez le grand Plan de Paris à vol d'oiseau, par Mérian, et la Tapisserie de l'hôtel de ville; la Topographie de la Gaule, par Mérian; Livre troisième de la Cosmogr. universelle, Sébastien Munster et Belle-Forest, 1665; le Plan de Gomboust; l'oeuvre d'Israël Sylvestre; la Topographie de la France bibliog. imp.; l'oeuvre de Pérelle (vue du pont au Change); l'Hist. pittor. du Palais de justice, par Sauvan et Schmit, 1825; l'Itinéraire arch. de Paris, par M. le baron de Guilhermy.

      10

       Le Livre des faits et bonnes meurs du sage roy Charles, chap. XXXVIII. Christine de Pisan.

      11

       Voyez le plan de ce palais dans le Voyage archéol. dans le département de l'Aube par A. F. Arnaud (1837). Ce palais est entièrement rasé.

      12

       C'est là, dit M. Ch. de Chergé, dans son Guide du voyageur à Poitiers, que se «trouve la tour historique de Maubergeon (Malhbery, audiences en lieux couverts, Mallobergium), lieu où, dès l'origine, et sous Charlemagne, furent tenues les audiences publiques et rendue la justice, et dont relevèrent depuis tous les fiefs capitaux de la province..... Ce fut dans le palais de Poitiers que le dauphin, fils de France, fut proclamé roi sous le nom de Charles VII (oct. 1422); ce fut là encore que fut interrogée, par les docteurs les plus habiles, Jeanne d'Arc, la Pucelle (mars 1429); ce fut là que s'assemblèrent les parlements de Paris et de Bordeaux, au moment où la France presque entière était anglaise....» Si un monument est historique, c'est bien celui-là.

      13

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<p>111</p>

Dans ce cas, la silicatisation bien faite est le seul moyen à employer pour rendre à la pierre cette couverte âpre et résistante qui en assure la durée. La silicatisation devrait toujours être employée lorsqu'on a eu l'idée malheureuse de gratter les parements des monuments, et même lorsque les ravalements sont faits après que la pierre a jeté son eau de carrière.