Nous Sommes De Retour. Danilo Clementoni
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Pétri, son ami et compagnon dâaventures, avait presque trente-deux ans, et il en était à sa quatrième mission de ce genre. Sa stature imposante et massive inspirait le respect à tous ceux qui le rencontraient. Il avait des yeux aussi noirs que lâespace à lâextérieur du vaisseau, des cheveux longs, foncés, et en bataille, qui lui arrivaient jusquâaux épaules. Il mesurait presque deux mètres trente, avait un buste et des bras puissants, capables de soulever un Nebir2 adulte sans aucun effort, mais il avait une âme dâenfant. Il pouvait sâémouvoir en voyant éclore une fleur de Soel3 , rester pendant des heures à regarder, extasié, la mer et les vagues qui se brisent sur les côtes éburnéennes du Golfe de Saraan4 . Câétait une personne incroyable, loyale, de toute confiance, prête à donner sa vie pour lui sans aucune hésitation. Sans Pétri à ses côtés, il ne serait jamais parti. Câétait la seule personne en qui il avait une confiance aveugle, et qui ne lâaurait jamais trahi.
Les moteurs du vaisseau, réglés pour une navigation à lâintérieur du système solaire, émettaient leur bourdonnement biphasique, habituel et rassurant. Ce son confirmait à ses oreilles expérimentées que tout fonctionnait parfaitement. Son audition était si fine quâelle lui aurait permis dâentendre jusquâà une variation de 0,0001 Lasig dans les chambres de combustion, bien avant que le système de contrôle automatisé ne la détecte, malgré toute sa sophistication. Câest notamment pour cela quâon lâavait autorisé, dès son jeune âge, à prendre le commandement dâun vaisseau de la catégorie Pegasus.
Bien des camarades de son âge auraient donné un bras pour pouvoir être à sa place. Mais, à cet instant, câest lui qui y était.
Son implant intraoculaire O^COM fit apparaître devant ses yeux le nouvel itinéraire recalculé. Il était incroyable quâun objet de quelques microns seulement puisse assurer autant de fonctions. Directement inséré dans le nerf optique, il pouvait afficher un tableau de bord entier, superposant lâimage à ce que lâon avait réellement devant soi. Les premiers temps, ça nâavait pas été facile de sâhabituer à cette invention diabolique, et plus dâune fois la nausée avait menacé de prendre le dessus. Mais désormais, il nâaurait plus pu sâen passer.
Le système solaire tout entier tournait autour de lui dans toute sa fascinante majesté. Le petit point bleu, proche du géant Jupiter, représentait la position de son vaisseau, et la mince ligne rouge, légèrement plus incurvée que la précédente, déjà un peu décolorée, indiquait la nouvelle trajectoire dâapproche de la Terre.
Lâattraction gravitationnelle de la plus grande planète du système solaire était impressionnante. Ils devaient absolument rester à distance de sécurité : seule la puissance de ses deux moteurs Bousen aurait permis au Théos dâéchapper à cette étreinte mortelle.
â Atzakis -grinça le communicateur portable reposant sur la console devant lui. Il faudrait quâon vérifie lâétat des joints dans le compartiment six.
Tu ne lâas pas encore fait ? répondit-il dâun ton amusé, dont il savait quâil irritait son compagnon.
â Jette ce cigare puant et viens me donner un coup de main ! tonna Pétri.
Je le savais.
Il avait réussi à le mettre en colère, et il était tout content.
â Me voilà , me voilà . Jâarrive, compagnon, ne tâénerve pas comme ça.
â Dépêche-toi ! Ãa fait quatre heures que je suis dans ce cloaque et je nâai aucune envie de rire.
Il était bougon, comme toujours, mais rien ni personne ne pouvait les séparer.
Ils se connaissaient depuis lâenfance. Pétri lui avait plusieurs fois évité un passage à tabac assuré : enfant, il était déjà beaucoup plus grand que les autres, et il interposait sa taille respectable entre son ami et la bande de voyous qui le prenait toujours de mire.
Les belles représentantes de lâautre sexe ne se seraient certainement pas battues pour attirer lâattention du genre de garçon quâavait été Atzakis. Il sâhabillait toujours de façon négligée, avait les cheveux rasés, un physique gracile, et était constamment connecté au Réseau5 par lequel il absorbait des millions dâinformations à une vitesse dix fois supérieure à la moyenne. Dès lââge de dix ans, ses remarquables performances dans les études lui avaient valu dâaccéder au niveau C, soit à la possibilité dâacquérir des connaissances inaccessibles à la majorité de ses camarades. Lâimplant neuronal NËCOM, qui lui ménageait ce type dâaccès, avait malheureusement quelques inconvénients mineurs. Pendant les phases dâacquisition, la concentration devait être quasiment absolue et, vu quâil y passait la majeure partie de son temps, il avait presque toujours une expression absente, le regard vide, complètement étranger à tout ce qui se passait autour de lui. Pour être honnête, on pensait en général que, contrairement à ce que proclamaient les Anciens, ce garçon était un peu retardé.
Mais il sâen fichait.
Sa soif de connaissances était sans limites. Même de nuit, il restait connecté. Il était bien conscient, vu la nécessité de concentration absolue, quâen phase de sommeil ses capacités dâacquisition étaient réduites à un petit 1% ; mais il ne voulait cependant gâcher aucun instant de sa vie sans avoir la possibilité dâaccroître son bagage culturel.
Il se leva en esquissant un petit sourire, et se dirigea en direction du compartiment six, où son ami lâattendait.
Planète Terre - Tell el-Mukayyar - Irak
Pour la énième fois, Ãlisa Hunter essuyait cette maudite petite goutte de sueur qui, de son front, roulait lentement vers son nez pour tomber ensuite dans le sable brûlant. Cela faisait déjà plusieurs heures quâà genoux, avec son inséparable Trowel Marshalltown6 , elle grattait avec délicatesse le sol dans le but de dégager, sans lâendommager, ce qui semblait être la partie supérieure dâune pierre tombale.
Mais, depuis le début, cette hypothèse ne la satisfaisait pas.
Elle se trouvait dans les alentours de la Ziggourat dâUr7 depuis deux mois, suite à une autorisation qu'elle avait obtenue grâce à sa réputation dâarchéologue et de grande spécialiste de la langue sumérienne. Depuis les premières fouilles, au