LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан

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LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан

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est venue ici, une fin d’après-midi ?

      – C’était moi, moi, découragée, qui voulais vous voir.

      – Et c’est vous qui avez intercepté la lettre de Gilbert ?

      – Oui, j’avais reconnu son écriture sur l’enveloppe.

      – Mais votre petit Jacques n’était pas avec vous ?

      – Non. Il était dehors, en automobile avec Le Ballu. Je l’ai fait monter par la fenêtre du salon, et il s’est glissé dans cette chambre par l’orifice du panneau.

      – Que contenait la lettre ?

      – Malheureusement des reproches de Gilbert. Il vous accusait de le délaisser, de prendre l’affaire à votre compte. Bref, cela me confirmait dans ma méfiance. Je me suis enfuie.

      Lupin haussa les épaules avec irritation.

      – Que de temps perdu ! Et par quelle fatalité n’avons-nous pas pu nous entendre plus tôt ! Nous jouions tous deux à cache-cache… Nous nous tendions des pièges absurdes… Et les jours passaient, des jours précieux, irréparables.

      – Vous voyez, vous voyez, dit-elle en frissonnant… vous aussi, vous avez peur de l’avenir !

      – Non, je n’ai pas peur, s’écria Lupin. Mais je pense à ce que nous aurions pu déjà accomplir d’utile si nous avions réuni nos efforts. Je pense à toutes les erreurs, à toutes les imprudences que notre accord nous eût évitées. Je pense que votre tentative de cette nuit pour fouiller les vêtements que porte Daubrecq, fut tout aussi vaine que les autres, et que, en ce moment, grâce à notre duel stupide, grâce au tumulte que nous avons fait dans son hôtel, Daubrecq est averti et se tiendra sur ses gardes plus encore qu’auparavant.

      Clarisse Mergy hocha la tête.

      – Non, non, je ne crois pas, le bruit n’a pas dû le réveiller, car nous avions retardé d’un jour cette tentative pour que la concierge pût mêler à son vin un narcotique très violent.

      Et elle ajouta lentement :

      – Et puis, voyez-vous, aucun événement ne fera que Daubrecq se tienne davantage sur ses gardes. Sa vie n’est qu’un ensemble de précautions contre le danger. Rien n’est laissé au hasard… D’ailleurs, n’a-t-il pas tous les atouts dans les mains ?

      Lupin s’approcha et lui demanda :

      – Que voulezvous dire ? Selon vous il n’y aurait donc pas d’espoir de ce côté ? Il n’y aurait pas un seul moyen pour arriver au but ?

      – Si, murmura-t-elle, il y en a un, un seul…

      Avant qu’elle eût caché de nouveau son visage entre ses mains, il remarqua sa pâleur. Et de nouveau un frisson de fièvre la secoua tout entière.

      Il crut comprendre la raison de son épouvante, et, se penchant vers elle, ému par sa douleur :

      – Je vous en prie, répondez sans détours. C’est à cause de Gilbert, n’est-ce pas ?… Si la justice n’a pas pu, heureusement, déchiffrer l’énigme de son passé, si l’on ne sait pas jusqu’ici le véritable nom du complice de Vaucheray, quelqu’un tout au moins le sait, n’est-ce pas ? N’est-ce pas ? Daubrecq a reconnu votre fils Antoine sous le masque de Gilbert ?

      – Oui, oui…

      – Et il vous promet de le sauver, n’est-ce pas ? Il vous offre sa liberté, son évasion, je ne sais quoi… C’est cela, n’est-ce pas, qu’il vous a-offert une nuit, dans son bureau, une nuit où vous avez voulu le frapper ?…

      – Oui… oui… c’est cela…

      – Et comme condition, une seule, n’est-ce pas ? Une condition abominable, telle que ce misérable pouvait l’imaginer ? J’ai compris, n’est-ce pas ?

      Clarisse ne répondit point. Elle semblait épuisée par une longue lutte contre un ennemi qui, chaque jour, gagnait du terrain, et contre qui il était vraiment impossible qu’elle combattît.

      Lupin vit en elle la proie conquise d’avance, livrée au caprice du vainqueur. Clarisse Mergy, la femme aimante de ce Mergy que Daubrecq avait réellement assassiné, la mère épouvantée de ce Gilbert que Daubrecq avait dévoyé, Clarisse Mergy, pour sauver son fils de l’échafaud, devrait, quoi qu’il advînt, se soumettre au désir de Daubrecq. Elle serait la maîtresse, la femme, l’esclave obéissante de ce personnage innommable auquel Lupin ne pouvait songer sans un soulèvement de révolte et de dégoût.

      S’asseyant auprès d’elle, doucement, avec des gestes de compassion, il la contraignit à lever la tête, et il lui dit, les yeux dans les yeux :

      – Écoutez-moi bien. Je vous jure de sauver votre fils… je vous le jure… Votre fils ne mourra pas, vous entendez… Il n’y a pas de force au monde qui puisse faire que, moi vivant, l’on touche à la tête de votre fils.

      – Je vous crois… J’ai confiance en votre parole.

      – Ayez confiance… c’est la parole d’un homme qui ne connaît pas la défaite. Je réussirai. Seulement, je vous supplie de prendre un engagement irrévocable.

      – Lequel ?

      – Vous ne verrez plus Daubrecq.

      – Je vous le jure !

      – Vous chasserez de votre esprit toute idée, toute crainte, si obscure soit-elle, d’un accord entre vous et lui… d’un marché quelconque…

      – Je vous le jure.

      Elle le regardait avec une expression de sécurité et d’abandon absolu, et, sous son regard, il éprouvait l’allégresse de se dévouer, et le désir ardent de rendre à cette femme le bonheur, ou, tout au moins, la paix et l’oubli qui ferment les blessures.

      – Allons, dit-il en se levant, et d’un ton joyeux, tout ira bien. Nous avons deux mois, trois mois devant nous. C’est plus qu’il n’en faut… à condition, bien entendu, que je sois libre de mes mouvements. Et pour cela, voyez-vous, vous devez vous retirer de la bataille.

      – Comment ?

      – Oui, disparaître pendant quelque temps, vous installer à la campagne. D’ailleurs, n’avez-vous pas pitié de votre petit Jacques ? À ce jeu-là, on lui démolirait les nerfs, au pauvre gosse… Et vrai, il a bien gagné son repos… N’est-ce pas, Hercule ?

      Le lendemain, Clarisse Mergy, que tant d’événements avaient abattue et qui, elle aussi, sous peine de tomber malade, avait besoin d’un peu de répit, prenait pension avec son fils chez une dame de ses amies dont la maison s’élevait à la lisière même de la forêt de Saint-Germain. Très faible, le cerveau obsédé de cauchemars, en proie à des troubles nerveux que la moindre émotion exaspérait, elle vécut là quelques jours d’accablement physique et d’inconscience. Elle ne pensait plus à rien. La lecture des journaux lui était défendue.

      Or, un après-midi, alors que Lupin, changeant de tactique, étudiait le moyen de procéder à l’enlèvement et à la séquestration du député Daubrecq, alors que Grognard et Le Ballu, auxquels il avait promis

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