La dame aux camélias. Alexandre Dumas

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La dame aux camélias - Alexandre Dumas

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bien et du mal est à jamais acquise; la foi se reconstruit, le respect des choses saintes nous est rendu, et si le monde ne se fait pas tout à fait bon, il se fait du moins meilleur. Les efforts de tous les hommes intelligents tendent au même but, et toutes les grandes volontés s'attellent au même principe: soyons bons, soyons jeunes, soyons vrais! Le mal n'est qu'une vanité, ayons l'orgueil du bien, et surtout ne désespérons pas. Ne méprisons pas la femme qui n'est ni mère, ni sœur, ni fille, ni épouse. Ne réduisons pas l'estime à la famille, l'indulgence à l'égoïsme. Puisque le ciel est plus en joie pour le repentir d'un pécheur que pour cent justes qui n'ont jamais péché, essayons de réjouir le ciel. Il peut nous le rendre avec usure. Laissons sur notre chemin l'aumône de notre pardon à ceux que les désirs terrestres ont perdus, que sauvera peut-être une espérance divine, et, comme disent les bonnes vieilles femmes quand elles conseillent un remède de leur façon, si cela ne fait pas de bien, cela ne peut pas faire de mal.

      Certes, il doit paraître bien hardi à moi de vouloir faire sortir ces grands résultats du mince sujet que je traite; mais je suis de ceux qui croient que tout est dans peu. L'enfant est petit, et il renferme l'homme; le cerveau est étroit, et il abrite la pensée; l'œil n'est qu'un point, et il embrasse des lieues.

       Table des matières

      Deux jours après, la vente était complètement terminée. Elle avait produit cent cinquante mille francs.

      Les créanciers s'en étaient partagés les deux tiers, et la famille, composée d'une sœur et d'un petit-neveu, avait hérité du reste.

      Cette sœur avait ouvert de grands yeux quand l'homme d'affaires lui avait écrit qu'elle héritait de cinquante mille francs.

      Il y avait six ou sept ans que cette jeune fille n'avait vu sa sœur, laquelle avait disparu un jour sans que l'on sût, ni par elle ni par d'autres, le moindre détail sur sa vie depuis le moment de sa disparition.

      Elle était donc arrivée en toute hâte à Paris, et l'étonnement de ceux qui connaissaient Marguerite avait été grand quand ils avaient vu que son unique héritière était une grosse et belle fille de campagne qui jusqu'alors n'avait jamais quitté son village.

      Sa fortune se trouva faite d'un seul coup, sans qu'elle sût même de quelle source lui venait cette fortune inespérée.

      Elle retourna, m'a-t-on dit depuis, à sa campagne, emportant de la mort de sa sœur une grande tristesse que compensait néanmoins le placement à quatre et demi qu'elle venait de faire.

      Toutes ces circonstances répétées dans Paris, la ville mère du scandale, commençaient à être oubliées, et j'oubliais même à peu près en quoi j'avais pris part à ces événements, quand un nouvel incident me fit connaître toute la vie de Marguerite et m'apprit des détails si touchants, que l'envie me prit d'écrire cette histoire et que je l'écris.

      Depuis trois ou quatre jours, l'appartement, vide de tous ses meubles vendus, était à louer, quand on sonna un matin chez moi.

      Mon domestique, ou plutôt mon portier qui me servait de domestique, alla ouvrir et me rapporta une carte, en me disant que la personne qui la lui avait remise désirait me parler.

      Je jetai les yeux sur cette carte et j'y lus ces deux mots: Armand Duval.

      Je cherchai où j'avais déjà vu ce nom, et je me rappelai la première feuille du volume de Manon Lescaut.

      Que pouvait me vouloir la personne qui avait donné ce livre à Marguerite? Je dis de faire entrer tout de suite celui qui attendait.

      Je vis alors un jeune homme blond, grand, pâle, vêtu d'un costume de voyage qu'il semblait ne pas avoir quitté depuis quelques jours et ne s'être même pas donné la peine de brosser en arrivant à Paris, car il était couvert de poussière.

      M Duval, fortement ému, ne fit aucun effort pour cacher son émotion, et ce fut des larmes dans les yeux et un tremblement dans la voix qu'il me dit:

      —Monsieur, vous excuserez, je vous prie, ma visite et mon costume; mais, outre qu'entre jeunes gens on ne se gêne pas beaucoup, je désirais tant vous voir aujourd'hui, que je n'ai pas même pris le temps de descendre à l'hôtel où j'ai envoyé mes malles et je suis accouru chez vous craignant encore, quoiqu'il soit de bonne heure, de ne pas vous rencontrer.

      Je priai M. Duval de s'asseoir auprès du feu, ce qu'il fit, tout en tirant de sa poche un mouchoir avec lequel il cacha un moment sa figure.

      —Vous ne devez pas comprendre, reprit-il en soupirant tristement, ce que vous veut ce visiteur inconnu, à pareille heure, dans une pareille tenue et pleurant comme il le fait. Je viens tout simplement, monsieur, vous demander un grand service.

      —Parlez, monsieur, je suis tout à votre disposition?

      —Vous avez assisté à la vente de Marguerite Gautier?

      A ce mot, l'émotion dont ce jeune homme avait triomphé un instant fut plus forte que lui, et il fut forcé de porter les mains à ses yeux.

      —Je dois vous paraître bien ridicule, ajouta-t-il, excusez-moi encore pour cela, et croyez que je n'oublierai jamais la patience avec laquelle vous voulez bien m'écouter.

      —Monsieur, répliquai-je, si le service que je parais pouvoir vous rendre doit calmer un peu le chagrin que vous éprouvez, dites-moi vite à quoi je puis vous être bon, et vous trouverez en moi un homme heureux de vous obliger.

      La douleur de M. Duval était sympathique, et malgré moi j'aurais voulu lui être agréable.

      Il me dit alors:

      —Vous avez acheté quelque chose à la vente de Marguerite?

      —Oui, monsieur, un livre.

      —Manon Lescaut?

      —Justement.

      —Avez-vous encore ce livre?

      —Il est dans ma chambre à coucher.

      Armand Duval, à cette nouvelle, parut soulagé d'un grand poids et me remercia comme si j'avais déjà commencé à lui rendre un service en gardant ce volume.

      Je me levai alors, j'allai dans ma chambre prendre le livre et je le lui remis.

      —C'est bien cela, fit-il en regardant la dédicace de la première page et en feuilletant, c'est bien cela.

      Et deux grosses larmes tombèrent sur les pages.

      —Eh bien, monsieur, dit-il en relevant la tête sur moi, en n'essayant même plus de me cacher qu'il avait pleuré et qu'il était près de pleurer encore, tenez-vous beaucoup à ce livre?

      —Pourquoi, monsieur?

      —Parce que je viens vous demander de me le céder.

      —Pardonnez-moi ma curiosité, dis-je alors; mais c'est donc vous qui l'avez donné à Marguerite Gautier?

      —C'est moi-même.

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