Le comte de Monte Cristo. Alexandre Dumas

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Le comte de Monte Cristo - Alexandre  Dumas

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style="font-size:15px;">      Le geôlier haussa les épaules et sortit.

      Dantès le suivit des yeux, tendit les mains vers la porte entrouverte, mais la porte se referma.

      Alors sa poitrine sembla se déchirer dans un long sanglot. Les larmes qui gonflaient sa poitrine jaillirent comme deux ruisseaux, il se précipita le front contre terre et pria longtemps, repassant dans son esprit toute sa vie passée, et se demandant à lui-même quel crime il avait commis dans cette vie, jeune encore, qui méritât une si cruelle punition.

      La journée se passa ainsi. À peine s’il mangea quelques bouchées de pain et but quelques gouttes d’eau. Tantôt il restait assis et absorbé dans ses pensées; tantôt il tournait tout autour de sa prison comme fait un animal sauvage enfermé dans une cage de fer.

      Une pensée surtout le faisait bondir: c’est que, pendant cette traversée, où, dans son ignorance du lieu où on le conduisait, il était resté si calme et si tranquille, il aurait pu dix fois, se jeter à la mer, et, une fois dans l’eau, grâce à son habileté à nager, grâce à cette habitude qui faisait de lui un des plus habiles plongeurs de Marseille, disparaître sous l’eau, échapper à ses gardiens, gagner la côte, fuir, se cacher dans quelque crique déserte, attendre un bâtiment génois ou catalan, gagner l’Italie ou l’Espagne et de là écrire à Mercédès de venir le rejoindre. Quant à sa vie, dans aucune contrée il n’en était inquiet: partout les bons marins sont rares; il parlait l’italien comme un Toscan, l’espagnol comme un enfant de la Vieille-Castille; il eût vécu libre, heureux avec Mercédès, son père, car son père fût venu le rejoindre; tandis qu’il était prisonnier, enfermé au château d’If dans cette infranchissable prison, ne sachant pas ce que devenait son père, ce que devenait Mercédès, et tout cela parce qu’il avait cru à la parole de Villefort: c’était à en devenir fou; aussi Dantès se roulait-il furieux sur la paille fraîche que lui avait apportée son geôlier.

      Le lendemain, à la même heure, le geôlier entra.

      «Eh bien, lui demanda le geôlier, êtes-vous plus raisonnable aujourd’hui qu’hier?»

      Dantès ne répondit point.

      «Voyons donc, dit celui-ci, un peu de courage! Désirez-vous quelque chose qui soit à ma disposition? voyons, dites.

      – Je désire parler au gouverneur.

      – Eh! dit le geôlier avec impatience, je vous ai déjà dit que c’est impossible.

      – Pourquoi cela, impossible?

      – Parce que, par les règlements de la prison, il n’est point permis à un prisonnier de le demander.

      – Qu’y a-t-il donc de permis ici? demanda Dantès.

      – Une meilleure nourriture en payant, la promenade, et quelquefois des livres.

      – Je n’ai pas besoin de livres, je n’ai aucune envie de me promener et je trouve ma nourriture bonne; ainsi je ne veux qu’une chose, voir le gouverneur.

      – Si vous m’ennuyez à me répéter toujours la même chose, dit le geôlier, je ne vous apporterai plus à manger.

      – Eh bien, dit Dantès, si tu ne m’apportes plus à manger, je mourrai de faim, voilà tout.»

      L›accent avec lequel Dantès prononça ces mots prouva au geôlier que son prisonnier serait heureux de mourir; aussi, comme tout prisonnier, de compte fait, rapporte dix sous à peu près par jour à son geôlier, celui de Dantès envisagea le déficit qui résulterait pour lui de sa mort, et reprit d’un ton plus radouci:

      «Écoutez: ce que vous désirez là est impossible; ne le demandez donc pas davantage, car il est sans exemple que, sur sa demande, le gouverneur soit venu dans la chambre d’un prisonnier; seulement, soyez bien sage, on vous permettra la promenade, et il est possible qu’un jour, pendant que vous vous promènerez, le gouverneur passera: alors vous l’interrogerez, et, s’il veut vous répondre, cela le regarde.

      – Mais, dit Dantès, combien de temps puis-je attendre ainsi sans que ce hasard se présente?

      – Ah! dame, dit le geôlier, un mois, trois mois, six mois, un an peut-être.

      – C’est trop long, dit Dantès; je veux le voir tout de suite.

      – Ah! dit le geôlier, ne vous absorbez pas ainsi dans un seul désir impossible, ou, avant quinze jours, vous serez fou.

      – Ah! tu crois? dit Dantès.

      – Oui, fou. C’est toujours ainsi que commence la folie; nous en avons un exemple ici: c’est en offrant sans cesse un million au gouverneur, si on voulait le mettre en liberté, que le cerveau de l’abbé qui habitait cette chambre avant vous s’est détraqué.

      – Et combien y a-t-il qu’il a quitté cette chambre?

      – Deux ans.

      – On l’a mis en liberté?

      – Non: on l’a mis au cachot.

      – Écoute! dit Dantès, je ne suis pas un abbé, je ne suis pas fou; peut-être le deviendrai-je; mais, malheureusement, à cette heure, j’ai encore tout mon bon sens: je vais te faire une autre proposition.

      – Laquelle?

      – Je ne t’offrirai pas un million, moi, car je ne pourrais pas te le donner; mais je t’offrirai cent écus si tu veux, la première fois que tu iras à Marseille, descendre jusqu’aux Catalans, et remettre une lettre à une jeune fille qu’on appelle Mercédès… pas même une lettre, deux lignes seulement.

      – Si je portais ces deux lignes et que je fusse découvert, je perdrais ma place, qui est de mille livres par an, sans compter les bénéfices et la nourriture; vous voyez donc bien que je serais un grand imbécile de risquer de perdre mille livres pour en gagner trois cents.

      – Eh bien! dit Dantès, écoute et retiens bien ceci: si tu refuses de prévenir le gouverneur que je désire lui parler; si tu refuses de porter deux lignes à Mercédès, ou tout au moins de la prévenir que je suis ici, un jour je t’attendrai derrière ma porte, et, au moment où tu entreras, je te briserai la tête avec cet escabeau.

      – Des menaces! s’écria le geôlier en faisant un pas en arrière et en se mettant sur la défensive; décidément la tête vous tourne. L’abbé a commencé comme vous, et dans trois jours vous serez fou à lier, comme lui; heureusement que l’on a des cachots au château d’If.»

      Dantès prit l’escabeau, et il le fit tournoyer autour de sa tête.

      «C’est bien! c’est bien! dit le geôlier; eh bien! puisque vous le voulez absolument, on va prévenir le gouverneur.

      – À la bonne heure!» dit Dantès en reposant son escabeau sur le sol et en s’asseyant dessus, la tête basse et les yeux hagards, comme s’il devenait réellement insensé.

      Le geôlier sortit, et, un instant après, rentra avec quatre soldats et un caporal.

      «Par ordre du gouverneur, dit-il, descendez le prisonnier un étage au-dessous de celui-ci.

      – Au cachot, alors? dit le caporal.

      – Au

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