Michel Strogoff. Jules Verne

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Michel Strogoff - Jules  Verne

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de l’Oural, il passe par Ekaterinbourg, Kassimow, Tioumen, Ichim, Omsk, Elamsk, Kolyvan, Tomsk, Krasnoiarsk, Nijni-Oudinsk, Irkoutsk, Verkne-Nertschink, Strelink, Albazine, Blagowstenks, Radde, Orlomskaya, Alexandrowskoë, Nikolaevsk, et prend six roubles et dix-neuf kopeks par chaque mot lancé à son extrême limite[2]. D’Irkoutsk un embranchement va se souder à Kiatka sur la frontière mongole, et de là, à trente kopeks par mot, la poste transporte les dépêches à Péking en quatorze jours.

      C’est ce fil, tendu d’Ekaterinbourg à Nikolaevsk, qui avait été coupé, d’abord en avant de Tomsk, et, quelques heures plus tard, entre Tomsk et Kolyvan.

      C’est pourquoi le czar, après la communication que venait de lui faire pour la seconde fois le général Kissoff, n’avait-il répondu que par ces seuls mots : « Un courrier à l’instant ! »

      Le czar était, depuis quelques instants, immobile à la fenêtre de son cabinet, lorsque les huissiers en ouvrirent de nouveau la porte. Le grand maître de police apparut sur le seuil.

      – Entre, général, dit le czar d’une voix brève, et dis-moi tout ce que tu sais d’Ivan Ogareff.

      – C’est un homme extrêmement dangereux, Sire, répondit le grand maître de police.

      – Il avait rang de colonel ?

      – Oui, Sire.

      – C’était un officier intelligent ?

      – Très intelligent, mais impossible à maîtriser, et d’une ambition effrénée qui ne reculait devant rien. Il s’est bientôt jeté dans de secrètes intrigues, et c’est alors qu’il a été cassé de son grade par Son Altesse le grand-duc, puis exilé en Sibérie.

      – À quelle époque ?

      – Il y a deux ans. Gracié après six mois d’exil par la faveur de Votre Majesté, il est rentré en Russie.

      – Et, depuis cette époque, n’est-il pas retourné en Sibérie ?

      – Oui, Sire, il y est retourné, mais volontairement cette fois, répondit le grand maître de police.

      Et il ajouta, en baissant un peu la voix :

      – Il fut un temps, Sire, où, quand on allait en Sibérie, on n’en revenait pas !

      – Eh bien, moi vivant, la Sibérie est et sera un pays dont on revient !

      Le czar avait le droit de prononcer ces paroles avec une véritable fierté, car il a souvent montré, par sa clémence, que la justice russe savait pardonner.

      Le grand maître de police ne répondit rien, mais il était évident qu’il n’était pas partisan des demi-mesures. Selon lui, tout homme qui avait passé les monts Ourals entre les gendarmes ne devait plus jamais les franchir. Or, il n’en était pas ainsi sous le nouveau règne, et le grand maître de police le déplorait sincèrement ! Comment ! plus de condamnation à perpétuité pour d’autres crimes que les crimes de droit commun ! Comment ! des exilés politiques revenaient de Tobolsk, d’Iakoutsk, d’Irkoutsk ! En vérité, le grand maître de police, habitué aux décisions autocratiques des ukases qui jadis ne pardonnaient pas, ne pouvait admettre cette façon de gouverner ! Mais il se tut, attendant que le czar l’interrogeât de nouveau.

      Les questions ne se firent pas attendre.

      – Ivan Ogareff, demanda le czar, n’est-il pas rentré une seconde fois en Russie après ce voyage dans les provinces sibériennes, voyage dont le véritable but est resté inconnu ?

      – Il y est rentré.

      – Et, depuis son retour, la police a perdu ses traces ?

      – Non, Sire, car un condamné ne devient véritablement dangereux que du jour où il a été gracié !

      Le front du czar se plissa un instant. Peut-être le grand maître de police put-il craindre d’avoir été trop loin, – bien que son entêtement dans ses idées fût au moins égal au dévouement sans bornes qu’il avait pour son maître ; mais le czar, dédaignant ces reproches indirects touchant sa politique intérieure, continua brièvement la série de ses questions :

      – En dernier lieu, où était Ivan Ogareff ?

      – Dans le gouvernement de Perm.

      – En quelle ville ?

      – À Perm même.

      – Qu’y faisait-il ?

      – Il semblait inoccupé, et sa conduite n’offrait rien de suspect.

      – Il n’était pas sous la surveillance de la haute police ?

      – Non, Sire.

      – À quel moment a-t-il quitté Perm ?

      – Vers le mois de mars.

      – Pour aller ?…

      – On l’ignore.

      – Et, depuis cette époque, on ne sait ce qu’il est devenu ?

      – On ne le sait.

      – Eh bien, je le sais, moi ! répondit le czar. Des avis anonymes, qui n’ont pas passé par les bureaux de la police, m’ont été adressés, et, en présence des faits qui s’accomplissent maintenant au-delà de la frontière, j’ai tout lieu de croire qu’ils sont exacts !

      – Voulez-vous dire, Sire, s’écria le grand maître de police, qu’Ivan Ogareff a la main dans l’invasion tartare ?

      – Oui, général, et je vais t’apprendre ce que tu ignores. Ivan Ogareff, après avoir quitté le gouvernement de Perm, a passé les monts Ourals. Il s’est jeté en Sibérie, dans les steppes kirghises, et, là, il a tenté, non sans succès, de soulever ces populations nomades. Il est alors descendu plus au sud, jusque dans le Turkestan libre. Là, aux khanats de Boukhara, de Khokhand, de Koundouze, il a trouvé des chefs disposés à jeter leurs hordes tartares dans les provinces sibériennes et à provoquer une invasion générale de l’empire russe en Asie. Le mouvement a été fomenté secrètement, mais il vient d’éclater comme un coup de foudre, et maintenant les voies et moyens de communication sont coupés entre la Sibérie occidentale et la Sibérie orientale ! De plus, Ivan Ogareff, altéré de vengeance, veut attenter à la vie de mon frère !

      Le czar s’était animé en parlant et marchait à pas précipités. Le grand maître de police ne répondit rien, mais il se disait, à part lui, qu’au temps où les empereurs de Russie ne graciaient jamais un exilé, les projets d’Ivan Ogareff n’auraient pu se réaliser.

      Quelques instants s’écoulèrent, pendant lesquels il garda le silence. Puis, s’approchant du czar, qui s’était jeté sur un fauteuil :

      – Votre Majesté, dit-il, a sans doute donné des ordres pour que cette invasion fût repoussée au plus vite ?

      – Oui, répondit le czar. Le dernier télégramme qui a pu passer à Nijni-Oudinsk a dû mettre en mouvement les troupes des gouvernements d’Yeniseïsk, d’Irkoutsk, d’Iakoutsk, celles des provinces de l’Amour et du

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Environ 27 francs. Le rouble (argent) vaut 3 francs 75 centimes. Le kopek (cuivre) vaut 4 centimes.