Œuvres complètes de lord Byron, Tome 12. George Gordon Byron
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»Présentez, je vous prie, mes respects à Mme N***, et ayez bien soin de votre petit garçon. Toute ma maison a la fièvre, excepté Fletcher; Allegra, et moi-même, et les chevaux, et Mutz, et Moretto. J'espère avoir le plaisir de vous voir au commencement de novembre, peut-être plus tôt. Aujourd'hui j'ai été trempé par une pluie d'orage, et mon cheval, celui de mon domestique et le domestique lui-même, enfoncés dans la boue jusqu'à la ceinture, au milieu d'une route de traverse. À midi nous étions dans l'été, et, à cinq heures, nous avions l'hiver; mais l'éclair nous a peut-être été envoyé pour nous avertir que l'été n'est pas fini. C'est un singulier tems pour le 27 octobre.
»Votre, etc.»
LETTRE CCCXLIV
Venise, 29 octobre 1819.
«Votre lettre du 15 est arrivée hier. Je suis fâché que vous ne me parliez pas d'une grosse lettre que je vous ai adressée de Bologne, il y a deux mois, pour lady Byron; l'avez-vous reçue et envoyée?
»Vous ne me dites rien non plus du vice-consulat que je vous ai demandé pour un patricien de Ravenne, d'où je conclus que la chose ne se fera pas.
»J'avais écrit à peu près cent stances d'un troisième chant de Don Juan; mais la réception des deux premiers n'est pas faite pour nous donner, à vous et à moi, beaucoup d'encouragement à le continuer.
»J'avais aussi écrit environ six cents vers d'un poème intitulé la Vision (ou Prophétie) du Dante; il a pour sujet une revue de l'Italie depuis les premiers siècles jusqu'à celui-ci. Dante est supposé parler lui-même avant sa mort, et il embrasse tous les sujets d'un ton prophétique, comme la Cassandre de Lycophron. Mais cet ouvrage, ainsi que l'autre, en sont restés là pour le moment.
»J'ai donné à Moore, qui est allé à Rome, ma Vie manuscrite en soixante-dix-huit feuilles, jusqu'à l'année 1816. Mais, je lui ai remis ceci entre les mains, afin qu'il le gardât, ainsi que d'autres manuscrits, tel qu'un journal écrit en 1814, etc. Rien de tout cela ne doit être publié de mon vivant; mais quand je serai froid, vous en ferez ce que vous voudrez. En attendant, si vous êtes curieux de les lire, vous le pouvez, et vous pouvez aussi les montrer à qui vous voudrez, cela m'est indifférent.
»Ma Vie est un memoranda, et non des confessions. J'ai supprimé toutes mes liaisons amoureuses, c'est-à-dire que je n'en parle que d'une manière générale, et un grand nombre des faits les plus importans, afin de ne pas compromettre les autres; mais vous y trouverez beaucoup de réflexions et quelquefois de quoi rire. – Vous y verrez aussi un récit détaillé de mon mariage et de ses résultats, aussi véridique que peut le faire une partie intéressée, car je présume que nous sommes tous sous l'influence des préventions.
»Je n'ai jamais relu cette Vie depuis qu'elle est écrite, de sorte que je ne me rappelle pas bien exactement ce qu'elle peut contenir ou répéter. Moore et moi nous avons passé quelques joyeux momens ensemble.
»Je retournerai probablement en Angleterre, à cause de mes affaires, dans le but de m'embarquer pour l'Amérique. – Dites-moi, je vous prie, avez-vous reçu une lettre pour Hobhouse, qui vous en aura communiqué le contenu? On dit que les commissaires de Vénézuela ont ordre de traiter avec les étrangers qui voudraient émigrer. – Or, l'envie m'est venue d'y aller; je ne ferais pas un mauvais colon américain, et si j'y vais former un établissement, j'emmènerai ma fille Allegra avec moi. J'ai écrit assez longuement à Hobhouse, pour qu'il prenne des renseignemens auprès de Perry, qui, je suppose, est le premier topographe et la meilleure trompette des nouveaux républicains. Écrivez-moi, je vous prie.
»Tout à vous.
»P. S. Moore et moi avons passé tout notre tems à rire. – Il vous mettra au fait de toutes mes allures et de toutes mes actions: jusqu'à ce moment, tout est comme à l'ordinaire. Vous devriez veiller à ce que l'on ne publie pas de faux Don Juan, surtout n'y mettez pas mon nom, parce que mon intention est de couper R…ts par quartiers comme une citrouille, dans ma préface, si je continue le poème.»
LETTRE CCCXLV
29 octobre 1819.
«L'histoire de Ferrare est du même calibre que tout ce qui sort de la fabrique vénitienne; vous pouvez en juger. Je ne me suis arrêté là que pour y changer de chevaux, depuis que je vous écrivis, après ma visite au mois de juin dernier. Un couvent! un enlèvement! une jeune fille! Je voudrais bien savoir, vraiment, qu'est-ce qui a été enlevé, à moins que ce ne soit mon pauvre individu. J'ai été enlevé moi-même plus souvent que qui que ce soit, depuis la guerre de Troie; mais quant à l'arrestation et à son motif, l'une est aussi vraie que l'autre, et je ne puis m'expliquer l'invention d'aucune des deux. Je présume qu'on aura confondu l'histoire de la F*** avec celle de Mme Guiccioli et une demi-douzaine d'autres; mais il est inutile de chercher à démêler une trame qui n'est bonne qu'à être foulée aux pieds. Je terminerai avec E***, qui paraît très-soucieux de votre indécision, et jure qu'il est le meilleur mathématicien de l'Europe; et ma foi! je suis de son avis, car il a trouvé le moyen de nous faire voir que deux et deux font cinq.
»Vous me verrez peut-être la semaine prochaine. J'ai un et même deux chevaux de plus (cela fait cinq en tout), et j'irai reprendre possession du Lido. Je me lèverai plus matin, et nous irons tous deux comme autrefois, si vous voulez, secouer notre bile sur le rivage, en faisant retentir de nouveau l'Adriatique des accens de notre haine pour cette coquille d'huître vide et privée de sa perle, qu'on appelle la ville de Venise.
»J'ai reçu hier une lettre de Murray. Des falsificateurs viennent de publier deux nouveaux troisièmes chants de Don Juan. – Que le diable châtie l'impudence de ces coquins de libraires! Peut-être ne me suis-je pas bien expliqué. – Il m'a dit que la vente avait été forte: douze cents in-quarto sur quinze cents, je crois; ce qui n'est rien, selon moi, après avoir vendu treize mille exemplaires du Corsaire, dans un seul jour. Mais il ajoute que les meilleurs juges, etc., etc., disent que cela est très-beau, très-spirituel, que la pureté du langage et la poésie en sont surtout remarquables, et autres consolations de ce genre, qui, pour un libraire, n'ont pas la valeur d'un seul exemplaire; et moi, comme auteur, naturellement je suis d'une colère de diable du mauvais goût du siècle, et je jure qu'il n'y a rien à attendre que de la postérité, qui, bien certainement, doit en savoir plus que ses grands-pères. Il existe un onzième commandement, qui défend aux femmes de le lire; et, ce qu'il y a de plus extraordinaire, c'est qu'il paraît qu'elles ne l'ont pas violé. – Mais de quelle importance cela peut-il être pour ces pauvres créatures, lire ou ne pas lire un livre, ne-................
»Le comte Guiccioli vient à Venise la semaine prochaine, et je suis prié de lui remettre sa femme, ce qui sera fait. Ce que vous me dites de la longueur des soirées à la Mira ou à Venise, me rappelle ce que Curran disait à Moore. – Eh bien! vous avez donc épousé une jolie femme, et qui plus est, une excellente femme, à ce que j'ai su. – Mais… Hem! dites-moi, je vous prie, comment passez-vous vos soirées? C'est une diable de question que celle-là, et peut-être est-il aussi difficile d'y répondre avec une maîtresse qu'avec une femme.
»Si vous allez à Milan, laissez-nous, du moins, je vous prie, un vice-consul, le seul vice qui manquera jamais à Venise. Dorville est un bon enfant; mais il faudra que vous veniez avec moi en Angleterre, au printems, et vous laisserez Mme Hoppner