Gabriel Lambert. Dumas Alexandre

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Gabriel Lambert - Dumas Alexandre страница 5

Gabriel Lambert - Dumas Alexandre

Скачать книгу

la porte d'une loge s'ouvrit, et une jeune et jolie femme fit coquettement signe de la main à Olivier qu'elle désirait lui parler.

      – Pardon, mon cher, il faut que je vous quitte.

      – Pour longtemps?

      – Non, continuez de vous promener dans le corridor, et avant dix minutes je vous rejoins.

      – A merveille.

      Je continuai de me promener seul pendant le temps indiqué, et je me trouvais du côté opposé à celui où j'avais quitté Olivier, lorsque j'entendis tout à coup une grande rumeur, et que je vis les autres promeneurs se porter du côté où cette rumeur était née; je m'avançai comme tout le monde, et je vis sortir d'un groupe Olivier qui, en m'apercevant, s'élança à mon bras en me disant:

      – Venez, mon cher; sortons.

      – Qu'y a-t-il donc? demandai-je, et pourquoi ôtes-vous si pâle?

      – Il y a que ce que j'avais prévu est arrivé; cet homme m'a insulté, et il faut que je me batte avec lui; mais venez vite chez moi ou chez vous, je vous conterai tout cela.

      Nous descendîmes rapidement l'un des escaliers; l'étranger descendait l'autre; il tenait son mouchoir sur son visage, et son mouchoir était taché de sang.

      Olivier et lui se rencontrèrent à la porte.

      – Vous n'oublierez pas, monsieur, dit l'étranger à haute voix, de manière à être entendu de tout le monde, que je vous attends demain à six heures au bois de Boulogne, allée de la Muette.

      – Eh! oui, monsieur, dit Olivier en haussant les épaules; c'est chose convenue.

      Et il fit un pas en arrière pour laisser passer son adversaire, qui sortit en se drapant dans son manteau, et avec la prétention visible de faire de l'effet.

      – Oh! mon Dieu! mon cher, dis-je à Olivier, qu'est-ce que ce monsieur? Et vous allez vous battre avec cela?

      – Il le faut, pardieu! bien.

      – Et pourquoi le faut-il?

      – Parce qu'il a levé la main sur moi, parce que je lui ai envoyé un coup de canne à travers la figure.

      – Vraiment?

      – Parole! une scène de crocheteur, tout ce qu'il y a de plus sale: j'en ai honte; mais que voulez-vous? c'est ainsi.

      – Mais qu'est-ce que c'est donc que ce manant-là, qui croit qu'on est obligé de donner à des gens comme nous des soufflets pour les faire battre?

      – Ce que c'est? c'est un monsieur qui se fait appeler le vicomte Henry de Faverne.

      – Henry de Faverne? je ne connais pas cela.

      – Ni moi non plus.

      – Eh bien! comment avez-vous une affaire avec un homme que vous ne connaissez pas?

      – C'est justement parce que je ne le connais pas que j'ai avec lui une affaire: cela vous paraît étrange; qu'en dites-vous?

      – Je l'avoue.

      – Je vais vous raconter cela. Tenez, il fait beau, au lieu de nous enfermer entre quatre murailles, voulez-vous venir jusqu'à la Madeleine?

      – Jusqu'où vous voudrez.

      – Voici ce que c'est: ce monsieur Henry de Faverne a des chevaux superbes et joue un jeu fou, sans qu'on lui connaisse aucune fortune au soleil; au reste, payant fort bien ce qu'il achète ou ce qu'il perd: de ce côté il n'y a rien à dire. Mais comme il est, à ce qu'il paraît, sur le point de se marier, on lui a demandé quelques explications sur cette fortune dont il fait un usage si éblouissant; il a répondu qu'il était d'une famille de riches colons qui avait des biens considérables à la Guadeloupe.

      »Alors, justement comme j'en arrive, on est venu aux informations près de moi, et l'on m'a demandé si je connaissais un comte de Faverne à la Pointe-à-Pitre.

      »Il faut vous dire, mon cher, que je connais, à la Pointe-à-Pitre, tout ce qui mérite d'être connu, et qu'il n'y a pas, d'un bout de l'île à l'autre, plus de comte de Faverne que sur ma main.

      »Vous comprenez, moi j'ai dit tout bonnement ce qu'il en était, sans attacher à ce que je disais d'autre importance. Puis, au bout du compte, comme c'était la vérité, je l'eusse dite dans tous les cas.

      »Or, il paraît que mon refus de reconnaître ce monsieur a mis obstacle à ses projets de mariage. Il a crié bien haut que j'étais un calomniateur, et qu'il me ferait repentir de mes calomnies. Je ne m'en suis pas autrement inquiété; mais, ce soir, je l'ai rencontré comme vous avez vu, et j'ai senti, vous savez, on sent cela, que j'allais avoir une affaire avec cet homme.

      »Au reste, mon cher ami, vous êtes témoin que, cette affaire, je l'ai évitée tant que j'ai pu; mais, que voulez-vous? je ne pouvais pas faire davantage. J'ai quitté le foyer, j'ai pris le corridor; en m'apercevant qu'il nous avait suivi dans le corridor, je suis entré dans la loge de la comtesse M… qui, elle-même, comme vous le savez, est créole, et qui n'a jamais entendu parler de ce monsieur ni de quelque Faverne que ce soit.

      »Je croyais en être quitte; baste! il m'attendait en face de la porte de la loge; vous savez le reste: nous nous battons demain, vous l'avez entendu.

      – Oui, à six heures du matin: mais qui donc a réglé cela?

      – Mais voilà encore ce qui prouve que j'ai affaire à je ne sais quel croquant.

      »Est-ce que c'est jamais aux adversaires à régler ces choses-là? Que restera-t-il à faire aux témoins, alors? Puis, se battre à six heures du matin, comprenez-vous cela? Qui est-ce qui se lève à six heures?

      »Ce monsieur a donc été garçon de charrue dans sa jeunesse; quant à moi, je sais que je vais être demain matin d'une humeur massacrante, et que je me battrai très-mal.

      – Comment, vous vous battrez très-mal?

      – Sans doute; c'est une chose sérieuse que de se battre, que diable! On prend toutes ses aises pour faire l'amour, et on ne s'accorde pas la plus petite fantaisie en matière de duel! Moi, je sais une chose, c'est que je me suis toujours battu à onze heures ou midi, et qu'en général je m'en suis très bien trouvé.

      »A six heures du matin, je vous demande un peu, au mois d'octobre! on meurt de froid, on grelotte, on n'a pas dormi.

      – Eh bien! mais rentrez et couchez-vous.

      – Oui, couchez-vous, c'est facile à dire; on a toujours, quand on se bat le lendemain, quelque chose comme un bout de testament à faire, une lettre à écrire à sa mère ou à sa maîtresse; tout cela vous prend jusqu'à deux heures du matin.

      »Puis on dort mal; car, voyez-vous, on a beau dire, si brave qu'on soit, c'est toujours une mauvaise nuit que la nuit qui précède un duel. Et se lever à cinq heures, car pour se trouver au bois de Boulogne à six heures, il faut se lever à cinq, se lever à la bougie, connaissez-vous rien de plus maussade que cela?..

      »Aussi qu'il se tienne bien, ce monsieur; je ne le ménagerai pas, je vous en réponds. A propos, je compte sur vous comme témoin.

      – Pardieu!

Скачать книгу