Le vicomte de Bragelonne, Tome IV.. Dumas Alexandre

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Le vicomte de Bragelonne, Tome IV. - Dumas Alexandre

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et la baisa; puis il plia l'ordre, le passa sous son buffle et sortit.

      Ni le roi ni le capitaine n'avaient articulé une syllabe.

      – Ô coeur humain! boussole des rois! murmura Louis resté seul, quand donc saurai-je lire dans tes replis comme dans les feuilles d'un livre? Non, je ne suis pas un mauvais roi; non, je ne suis pas un pauvre roi; mais je suis encore un enfant.

      Chapitre CCIV – Rivaux politiques

      D'Artagnan avait promis à M. de Baisemeaux d'être de retour au dessert, d'Artagnan tint parole. On en était aux vins fins et aux liqueurs, dont la cave du gouverneur avait la réputation d'être admirablement garnie, lorsque les éperons du capitaine des mousquetaires retentirent dans le corridor et que lui-même parut sur le seuil.

      Athos et Aramis avaient joué serré. Aussi, aucun des deux n'avait pénétré l'autre. On avait soupé, causé beaucoup de la Bastille, du dernier voyage de Fontainebleau, de la future fête que M. Fouquet devait donner à Vaux. Les généralités avaient été prodiguées, et nul, hormis de Baisemeaux, n'avait effleuré les choses particulières.

      D'Artagnan tomba au milieu de la conversation, encore pâle et ému de sa conversation avec le roi De Baisemeaux s'empressa d'approcher une chaise. D'Artagnan accepta un verre plein et le laissa vide. Athos et Aramis remarquèrent tous deux cette émotion de d'Artagnan. Quant à de Baisemeaux, il ne vit rien que le capitaine des mousquetaires de Sa Majesté auquel il se hâta de faire fête. Approcher le roi, c'était avoir tous droits aux égards de M. de Baisemeaux. Seulement, quoique Aramis eût remarqué cette émotion, il n'en pouvait deviner la cause. Athos seul croyait l'avoir pénétrée. Pour lui, le retour de d'Artagnan et surtout le bouleversement de l'homme impassible signifiaient: «Je viens de demander au roi quelque chose que le roi m'a refusé.» Bien convaincu qu'il était dans le vrai, Athos sourit, se leva de table et fit un signe à d'Artagnan, comme pour lui rappeler qu'ils avaient autre chose à faire que de souper ensemble.

      D'Artagnan comprit et répondit par un autre signe. Aramis et

      Baisemeaux, voyant ce dialogue muet, interrogeaient du regard.

      Athos crut que c'était à lui de donner l'explication de ce qui se passait.

      – La vérité, mes amis, dit le comte de La Fère avec un sourire, c'est que vous, Aramis, vous venez de souper avec un criminel d'État, et vous, monsieur de Baisemeaux, avec votre prisonnier.

      Baisemeaux poussa une exclamation de surprise et presque de joie. Ce cher M. de Baisemeaux avait l'amour-propre de sa forteresse. À part le profit, plus il avait de prisonniers, plus il était heureux; plus ces prisonniers étaient grands, plus il était fier.

      Quant à Aramis, prenant une figure de circonstance:

      – Oh! cher Athos, dit-il, pardonnez-moi, mais, je me doutais presque de ce qui arrive. Quelque incartade de Raoul ou de La Vallière, n'est-ce pas?

      – Hélas! fit Baisemeaux.

      – Et, continua Aramis, vous, en grand seigneur que vous êtes, oubliant qu'il n'y a plus que des courtisans, vous avez été trouver le roi et vous lui avez dit son fait?

      – Vous avez deviné, mon ami.

      – De sorte, dit de Baisemeaux, tremblant d'avoir soupé si familièrement avec un homme tombé dans la disgrâce de Sa Majesté; de sorte, monsieur le comte?..

      – De sorte, mon cher gouverneur, dit Athos, que mon ami M. d'Artagnan va vous communiquer ce papier qui passe par l'ouverture de son buffle, et qui n'est autre, certainement, que mon ordre d'écrou.

      De Baisemeaux tendit la main avec sa souplesse d'habitude.

      D'Artagnan tira, en effet, deux papiers de sa poitrine, et en présenta un au gouverneur. Baisemeaux déplia le papier et lut à demi-voix, tout en regardant Athos par-dessus le papier, en s'interrompant:

      – «Ordre de détenir dans mon château de la Bastille…» Très bien… «Dans mon château de la Bastille… M. le comte de La Fère.» oh! monsieur, que c'est pour moi un douloureux honneur de vous posséder!

      – Vous aurez un patient prisonnier, monsieur dit Athos de sa voix suave et calme.

      – Et un prisonnier qui ne restera pas un mois chez vous, mon cher gouverneur, dit Aramis, tandis que de Baisemeaux, l'ordre à la main, transcrivait sur son registre d'écrou la volonté royale.

      – Pas même un jour, ou plutôt, pas même une nuit, dit d'Artagnan en exhibant le second ordre du roi; car maintenant, cher monsieur de Baisemeaux, il vous faudra transcrire aussi cet ordre de mettre immédiatement le comte en liberté.

      – Ah! fit Aramis, c'est de la besogne que vous m'épargnez, d'Artagnan.

      Et il serra d'une façon significative la main du mousquetaire en même temps que celle d'Athos.

      – Eh quoi! dit ce dernier avec étonnement, le roi me donne la liberté?

      – Lisez, cher ami, repartit d'Artagnan.

      Athos prit l'ordre et lut.

      – C'est vrai, dit-il.

      – En seriez-vous fâché? demanda d'Artagnan.

      – Oh! non, au contraire. Je ne veux pas de mal au roi, et le plus grand mal qu'on puisse souhaiter aux rois, c'est qu'ils commettent une injustice. Mais vous avez eu du mal, n'est-ce pas? oh! avouez- le mon ami.

      – Moi? Pas du tout! fit en riant le mousquetaire. Le roi fait tout ce que je veux.

      Aramis regarda d'Artagnan et vit bien qu'il mentait.

      Mais Baisemeaux ne regarda rien que d'Artagnan, tant il était saisi d'une admiration profonde pour cet homme qui faisait faire au roi tout ce qu'il voulait.

      – Et le roi exile Athos? demanda Aramis.

      – Non, pas précisément; le roi ne s'est pas même expliqué là- dessus, reprit d'Artagnan; mais je crois que le comte n'a rien de mieux à faire, à moins qu'il ne tienne à remercier le roi…

      – Non, en vérité, répondit en souriant Athos.

      – Eh bien! je crois que le comte n'a rien de mieux à faire, reprit d'Artagnan, que de se retirer dans son château. Au reste, mon cher Athos, parlez, demandez; si une résidence vous est plus agréable que l'autre, je me fais fort de vous faire obtenir celle- là.

      – Non, merci, dit Athos; rien ne peut m'être plus agréable, cher ami, que de retourner dans ma solitude, sous mes grands arbres, au bord de la Loire. Si Dieu est le suprême médecin des maux de l'âme, la nature est le souverain remède. Ainsi, monsieur, continua Athos en se retournant vers Baisemeaux, me voilà donc libre?

      – Oui, monsieur le comte, je le crois, je l'espère, du moins, dit le gouverneur en tournant et retournant les deux papiers, à moins, toutefois, que M. d'Artagnan n'ait un troisième ordre.

      – Non, cher monsieur de Baisemeaux, non, dit le mousquetaire, il faut vous en tenir au second et nous arrêter là.

      – Ah! monsieur le comte, dit Baisemeaux s'adressant à Athos, vous ne savez pas ce que vous perdez! Je vous eusse mis à trente livres, comme les généraux; que dis-je! à cinquante livres, comme les princes,

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