Un Trône pour des Sœurs . Морган Райс

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Un Trône pour des Sœurs  - Морган Райс Un Trône pour des Sœurs

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n'avait pas grande considération pour l'élégance mais elle fit quand même l'effort demandé quand elle versa de l'eau dans une coupe que tenait la sœur. La sœur Yvaine lui jetait un regard critique d'en-dessous son masque.

      “Non, tu n'as toujours pas compris. Et je sais que tu n'es pas maladroite, ma fille. Je t'ai vue faire la roue dans la cour.”

      Cela dit, la Sœur Yvaine n'avait pas puni Kate pour autant, ce qui suggérait qu'elle ne faisait pas partie des pires. Kate essaya encore d'une main tremblante.

      Avec les autres filles qui l'accompagnaient, elle était censée être en train d'apprendre à servir élégamment aux tables des nobles mais, en vérité, Kate n'était pas faite pour ça. Elle était trop petite et avait les muscles trop noueux pour le genre de féminité gracieuse à laquelle pensaient les bonnes sœurs. Si elle portait ses cheveux roux courts, c'était pour une raison précise. Dans un monde idéal, où elle aurait eu la liberté de choisir, elle aurait vraiment voulu devenir l'apprentie d'un forgeron ou peut-être se faire accepter dans une des troupes qui œuvraient en ville — ou peut-être même avoir la possibilité d'entrer à l'armée comme le faisaient les garçons. Apprendre à verser du vin avec grâce était le genre de leçon que sa grande sœur, qui rêvait de devenir une aristocrate, aurait apprécié, pas elle.

      Comme si cette pensée l'avait connectée à Sophia, Kate s'interrompit brusquement quand elle entendit la voix de sa sœur dans sa tête. Toutefois, elle eut un doute, car leur talent n'était pas toujours aussi fiable que ça.

      Cependant, le message se répéta et elle perçut aussi le sentiment qui venait avec.

      Kate, la cour ! A l'aide !

      Kate sentait la peur que dégageait ce message.

      Brusquement, involontairement, elle s'éloigna de la bonne sœur et, ce faisant, renversa son pichet d'eau sur le sol en pierre.

      “Je suis désolée”, dit-elle. “Il faut que je parte.”

      La Sœur Yvaine regardait encore l'eau.

      “Kate, nettoie ça tout de suite !”

      Cependant, Kate courait déjà. Elle se ferait probablement battre pour cette offense plus tard mais ce ne serait pas la première fois. Ça ne comptait pas. Ce qui comptait, c'était d'aider la seule personne du monde à laquelle elle tenait.

      Elle traversa l'orphelinat au pas de course. Elle connaissait le chemin parce qu'elle avait exploré tous les recoins de cet endroit dans les années qui s'étaient écoulées depuis l'affreuse nuit où on l'avait emmenée ici. De plus, tard la nuit, elle s'échappait des ronflements incessants et de la puanteur du dortoir quand elle le pouvait et jouissait librement de l'orphelinat dans l'obscurité. En ces moments où elle était la seule à être debout et où l'on n'entendait que le son des cloches de la ville, elle inspectait les moindres recoins des murs de l'établissement, sentant qu'il faudrait qu'elle les connaisse par cœur un de ces jours.

      Et maintenant, elle les connaissait.

      Kate entendait le son que produisait sa sœur, qui se battait en appelant à l'aide. Instinctivement, elle plongea dans une pièce, saisit un tisonnier dans l'âtre et poursuivit sa route. Elle ne savait pas ce qu'elle ferait avec cet objet.

      Elle arriva brusquement dans la cour et se sentit désespérée quand elle vit sa sœur plaquée au sol par deux garçons pendant qu'un autre maniait maladroitement sa robe.

      Kate comprit exactement ce qu'il fallait qu'elle fasse.

      Une rage primale l'envahit, une rage qu'elle n'aurait pas pu contrôler même si elle l'avait voulu, et elle se rua en avant en rugissant et en abattant le tisonnier sur la tête du premier garçon. Il se retourna au moment où Kate frappait et, par conséquent, le tisonnier ne le frappa pas aussi nettement que Kate l'aurait voulu mais il suffit quand même à l'envoyer à terre, où il tomba en touchant l'endroit où elle avait frappé.

      Elle se déchaîna sur un autre, l'atteignit au genou là où il se tenait et le fit tomber. Elle frappa le troisième au ventre jusqu'à ce qu'il tombe.

      Elle continua à les frapper, refusant de leur laisser le temps de se remettre. Elle avait participé à des quantités de bagarres pendant toutes les années qu'elle avait passées à l'orphelinat et elle savait qu'elle ne pouvait se reposer ni sur sa taille ni sur sa force. La furie était la seule chose qu'elle avait pour survivre et, heureusement, Kate n'en manquait pas.

      Elle frappa sans arrêt jusqu'à ce que les garçons battent en retraite. Même s'ils étaient peut-être sur le point de rejoindre l'armée, les Frères Masqués qui sévissaient de leur côté ne leur apprenaient pas à se battre. Cela les aurait rendus trop difficiles à contrôler. Kate frappa un des garçons au visage puis virevolta pour en frapper un autre au coude et entendit le craquement du fer qui heurtait de l'os.

      “Debout”, dit-elle à sa sœur en tendant la main. “Debout !”

      Sophia se leva, hébétée, et prit la main à Kate comme si, pour une fois, c'était elle la sœur cadette.

      Kate partit en courant et sa sœur courut avec elle. Sophia sembla reprendre conscience alors qu'elles couraient. Alors qu'elles filaient dans les couloirs de l'orphelinat, une partie de leur vieille certitude sembla revenir.

      Derrière elles, Kate entendit des cris poussés par des garçons, des sœurs ou les deux. Elle n'en avait que faire. Elle savait qu'elles ne pouvaient que sortir.

      “On ne revient pas”, dit Sophia. “Il faut qu'on quitte l'orphelinat.”

      Kate hocha la tête. Pour ce qu'elles venaient de faire, la punition ne se limiterait pas à une simple correction. Cependant, à ce moment-là, Kate se souvint.

      “Dans ce cas, on part”, répondit Kate en courant, “mais d'abord, il faut juste que —”

      “Non”, dit Sophia. “On n'a pas le temps. Laisse tout. Il faut qu'on parte.”

      Kate secoua la tête. Il y avait des choses qu'elle ne pouvait pas abandonner.

      Donc, au lieu de fuir, elle fonça vers son dortoir en tenant le bras à Sophia pour qu'elle la suive.

      Le dortoir était un endroit lugubre avec des lits qui n'étaient guère mieux que des planches en bois qui dépassaient du mur comme des étagères. Kate n'était pas bête au point de mettre ses objets importants dans la petite commode qui se trouvait au pied de son lit, où n'importe qui aurait pu les voler. En fait, elle se dirigea vers une fente entre deux lattes du plancher et tira sur une des lattes avec ses doigts jusqu'à ce qu'elle se soulève.

      “Kate”, haleta Sophia, reprenant son souffle, “on n'a pas le temps.”

      Kate secoua la tête.

      “Je ne l'abandonnerai pas.”

      Sophia savait forcément ce qu'elle était venue chercher, le seul souvenir qu'elle avait de cette nuit, de leur vie d'avant.

      Finalement, le doigt de Kate s'accrocha à du métal et elle souleva le médaillon pour qu'il brille dans la pénombre.

      Durant son enfance, elle avait été sûre que c'était vraiment de l'or, une fortune qui n'attendait que d'être dépensée. Quand

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