Jane Austen: Oeuvres Majeures. Джейн Остин

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Jane Austen: Oeuvres Majeures - Джейн Остин

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l’avoir chez eux, et moi je ne le vois jamais sans désirer de causer avec lui.

      — Votre protection, mademoiselle, dit Willoughby, prouve certainement en sa faveur ; mais quant à l’estime des habitans du Park, vous me permettrez de la prendre plutôt comme un reproche. Celui qui rechercherait l’approbation de lady Middleton et de madame Jennings, ne trouverait que l’indifférence de toutes les autres femmes.

      — Mais peut-être, dit Elinor, que votre critique, et celle de Maria, contrebalanceraient le suffrage de lady Middleton et de sa mère : si leur éloge est une censure, votre censure est peut-être un éloge ; elles ne sont pas plus incapables de discerner le vrai mérite, que vous êtes injustes et prévenus.

      — Je ne reconnais pas votre douceur ordinaire à ce reproche, dit Maria ; le désir de défendre votre protégé, vous, rend un peu méchante avec nous.

      — N’êtes-vous pas bien aise, Maria, que je sache défendre mes amis ! Mon protégé (comme vous l’appelez) est à-la-fois sensible et raisonnable, ce qui a toujours eu un grand attrait pour moi ; oui, Maria, même dans un homme entre trente et quarante. Il a très-bien vu le monde, il a voyagé avec fruit, il a lu, il a réfléchi. Je l’ai trouvé très en état de m’instruire sur plusieurs objets ; il a toujours répondu à mes questions avec la politesse et la complaisance d’un homme bien né et instruit sans pédanterie.

      — Oui, oui, s’écria Maria légèrement, il vous a appris que le soleil des grandes Indes était brûlant, et que les mousquites y sont insupportables.

      — Il me l’aurait dit, sans doute, si je le lui avais demandé ; mes questions n’ont pas eu pour objet ce que je sais déjà.

      — Peut être, dit Willoughby, qu’il a été en état de vous parler des Nababs, des différentes castes, des palanquins, des éléphans, des femmes de toutes couleurs ; c’est un entretien très-touchant, très-intéressant et très instructif.

      — Il n’est du moins pas méchant, dit Elinor. Mais je vous en prie, M. Willoughby, qu’est-ce que vous a fait le colonel Brandon, et pourquoi lui donnez-vous des ridicules ?

      — Moi ! en aucune manière ; j’ai beaucoup de considération pour lui, je vous assure ; je le regarde comme un homme très-respectable, qui ne fait de mal à personne, qui a plus d’argent qu’il n’en peut dépenser, plus de temps qu’il n’en peut employer, et plus d’années qu’il ne voudrait.

      — Ajoutez à ce portrait, dit Maria, qu’il n’a ni génie, ni goût, ni esprit ; que son imagination n’a rien de brillant, ses sentimens point de chaleur, et sa voix point d’expression.

      — Vous décidez ses imperfections en masse avec tant de vivacité, dit Elinor, que tout ce que je pourrais dire paraîtrait insipide et froid, comme il vous paraît lui-même ; je dirai donc seulement qu’il est bon, sensible, indulgent, que son esprit est assez orné pour n’avoir nul besoin de briller en dépréciant l’esprit des autres, et que son cœur ne le lui permettrait pas.

      — Ah ! miss Dashwood, s’écria Willoughby, vous en usez mal avec moi ; vous tâchez de me désarmer par la raison, mais vous n’y réussirez pas. J’ai trois grands motifs de haïr le colonel Brandon, contre lesquels vous n’avez rien à dire : il m’a menacé de la pluie un jour que je désirais le beau temps ; il a trouvé des défauts dans mon nouveau caricle, et je n’ai pu le persuader d’acheter ma jument brune. Vous conviendrez que voilà des griefs impardonnables. Je veux bien convenir avec vous cependant qu’à tout autre égard, son caractère est irréprochable ; mais en faveur de cet aveu, accordez-moi de rire quelquefois un peu en parlant de lui avec mademoiselle Maria.

      CHAPITRE XI.

       Table des matières

      Lorsque mesdames Dashwood vinrent s’établir dans ce qu’on appelait (improprement il est vrai) une chaumière, elles ne s’attendaient guère qu’elles y trouveraient presque les plaisirs de la ville, ou du moins assez d’engagemens et de visites pour qu’il leur restât trop peu de temps à donner à des occupations sérieuses ; c’est cependant ce qu’il leur arriva. Dès que Maria fut rétablie, les plans d’amusement de sir Georges commencèrent avec une grande activité. Des bals à la maison du Park, des parties sur l’eau, des courses à cheval ou en caricle, se succédèrent sans interruption. Un très-beau mois d’octobre favorisait les promenades du matin ; on revenait dîner chez lady Middleton, et la danse, le jeu, la musique remplissaient les soirées. Willoughby ne manquait pas l’occasion de s’y rencontrer, et l’aisance, la familiarité que sir Georges établissait dans ses parties étaient exactement calculées pour augmenter l’inclination réciproque qui s’établissait entre lui et Maria, pour leur faire remarquer encore davantage leur perfections mutuelles, le rapport de leurs goûts et de leurs talens, et la préférence décidée qu’ils s’accordaient l’un à l’autre. Elinor n’était pas du tout surprise de leur attachement ; elle aurait voulu seulement qu’ils l’eussent un peu moins manifesté, et deux ou trois fois elle usa doucement de ses droits réunis de sœur aînée et d’amie pour adresser à ce sujet quelques tendres exhortations à Maria et lui faire sentir la nécessité de prendre de l’empire sur elle-même. Mais Maria détestait, abhorrait la dissimulation ; elle la regardait comme une fausseté impardonnable, et cacher des sentimens qui n’avaient rien en eux-mêmes de condamnable, lui paraissait non-seulement un effort inutile, mais une ridicule prétention de la raison opposée à l’élévation des sentimens. Willoughby pensait de même, et leur conduite à tout égard montrait clairement leur opinion. Quand il était présent, elle n’avait des yeux que pour lui ; tout ce qu’il faisait était juste ; tout ce qu’il disait était charmant. Si dans la soirée on jouait aux cartes, elle ne s’intéressait qu’à son jeu ; si on dansait, il était son partner pour toute la soirée, et s’ils étaient obligés de se séparer une ou deux contredanses, ils tâchaient au moins d’être près l’un de l’autre. Lorsqu’on ne dansait pas ils étaient toujours et toujours à causer dans un coin du salon ; si on se promenait c’était lui qui la conduisait dans son caricle. Une telle conduite excitait comme on le comprend les railleries de toute la société, mais ils s’en embarrassaient fort peu, et cherchaient plutôt à les provoquer.

      Madame Dashwood au lieu de gronder sa fille comme elle l’aurait dû, et de la retenir au moins par l’obéissance, puisque la raison n’avait pas de prise sur elle, partageait tous ses sentimens avec une chaleur presque égale à celle de Maria. Elle avait un de ces cœurs qui n’ont point d’âge et ne vieillissent jamais. Tout cela lui paraissait la conséquence très-naturelle d’une forte inclination entre deux jeunes gens vifs et sensibles qui se rendaient mutuellement justice. Au lieu de retenir Maria, elle renchérissait sur l’éloge de Willoughby ; elle le comparait à feu son époux, et sa fille à elle-même dans le temps de leurs amours. Ah ! comme c’était pour Maria le temps du bonheur ! Qu’on se rappelle le charme d’une première passion, de ce sentiment si nouveau, si ardent qui s’empare de l’âme entière, et celle de Maria était formée pour l’éprouver dans toute sa force. Aussi s’attacha-t-elle à Willoughby mille fois davantage qu’à sa propre existence. Elle le voyait à chaque instant sans remords, sans contrainte, puisque c’était sous les yeux de sa mère, qui l’approuvait, et que toutes les deux trouvaient de jour en jour de nouveaux motifs de l’aimer davantage. Norland et Sussex, et toute sa vie passée étaient effacés de sa mémoire ; elle n’existait plus qu’en Devonshire, et pour son adoré Willoughby.

      La pauvre Elinor n’était pas aussi heureuse ; son cœur ne goûtait pas le même bonheur. Il était encore à Norland, et rien autour d’elle ne pouvait remplacer ce qu’elle y avait laissé. Ce n’était

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