Jane Austen: Oeuvres Majeures. Джейн Остин

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Jane Austen: Oeuvres Majeures - Джейн Остин

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les particularités de son mariage et de celui de ses filles, tous les détails de la maladie de monsieur Jennings, tout ce que le pauvre cher homme lui avait dit en mourant, etc. Lady Middleton plaisait mieux à Elinor, mais elle eut bientôt remarqué qu’elle ne parlait pas, parce qu’elle n’avait rien à dire, et que ce calme, qui d’abord allait assez bien à sa belle physionomie et lui donnait un grand air de décence et de retenue, n’était qu’un manque total d’idées et de sentimens. On restait toujours avec elle au même point ; et depuis sa première visite à la chaumière, toujours également froide et polie, leur liaison ne s’était pas avancée d’une ligne. Elle disait aujourd’hui ce qu’elle avait dit hier, et presque dans les mêmes termes ; son insipidité était invariable, son humeur était toujours la même. Quoiqu’elle ne s’opposât point aux parties de son mari, qu’elle veillât à ce que tout fût dans les règles, et que ses deux plus grands enfans fussent toujours avec elle, elle ne paraissait y prendre aucun plaisir, mais aussi n’en recevoir aucune peine. Elle ne s’ennuyait ni ne s’amusait ; il lui était égal d’être là ou ailleurs ; elle était avec son mari et sa mère, de même qu’avec les étrangers, et sa présence ajoutait si peu de chose à la société, qu’on aurait oublié qu’elle était là, si des enfans bruyans et gâtés n’avaient pas été autour d’elle. Ce n’était donc pas une ressource pour Elinor, et de toutes leurs nouvelles connaissances, le colonel Brandon était le seul qui excitât en elle l’intérêt de l’amitié, et avec qui elle pût s’entretenir avec plaisir. Willoughby lui était indifférent. Elle le trouvait assez aimable ; mais il l’était rarement pour elle ; toutes ses attentions, tous ses propos s’adressaient à Maria. Cette dernière laissait, il est vrai, le colonel Brandon entièrement à sa sœur. Il trouvait sans doute dans l’aimable entretien d’Elinor quelque consolation de la parfaite indifférence de celle qui, malgré lui, occupait son cœur et sa pensée ; mais cette indifférence redoublait sa tristesse habituelle, et sa conversation n’était rien moins que gaie. Elinor le plaignait sincèrement, d’autant qu’elle avait lieu de croire que ce n’était pas la première fois qu’il était malheureux en amour. Un soir, pendant que tous les autres dansaient, ils voulurent se reposer, et s’assirent à côté l’un de l’autre. Les yeux du colonel étaient fixés sur Maria, qui dansait avec Willoughby. Il dit avec un triste sourire : votre sœur, à ce qu’on m’assure, n’approuve pas les seconds attachemens ; elle pense qu’on ne doit aimer qu’une fois.

      — Oui, répliqua Elinor, ses opinions sont un peu romanesques.

      — Ou plutôt, à ce que j’imagine, elle croit qu’un second attachement ne peut pas exister.

      — Je crois que c’est-là son idée ; mais comment ne réfléchit-elle pas sur le caractère de notre bon père qui s’est marié deux fois par inclination. Elle est encore bien jeune, et se fait des illusions ; dans quelques années ses opinions seront établies sur des bases plus réelles : alors il sera plus aisé de les définir et de les justifier ; à présent je lui en laisse le soin.

      — Oui, dit le colonel, c’est probablement ce qui arrivera ; cependant il y a quelque chose de si aimable dans les préjugés d’un jeune cœur, qu’on est presque fâché du moment où il y renonce pour adopter les opinions générales.

      — Je ne puis être de votre avis, dit Elinor ; il y a des inconvéniens dans la manière de voir et de sentir de Maria que tous les charmes de l’enthousiasme et de l’ignorance du monde ne peuvent compenser. Son système a le funeste effet de nourrir son esprit de chimères qui l’égarent, et qui la rendront malheureuse quand la triste réalité les dissipera. Plus de vraie connaissance du monde lui serait à ce que je crois bien avantageuse.

      Le colonel resta un moment en silence, puis il reprit avec un peu d’émotion dans la voix : est-ce que votre sœur ne fait aucune distinction dans ses objections contre un second attachement ? Est-ce que ceux qui ont été malheureux dans un premier choix, ou par l’inconstance de son objet, ou par l’entraînement des circonstances doivent rester indifférens tout le reste de leur vie !

      — Je vous assure, colonel, répondit Elinor, que je ne connais pas son systême en détail, je sais seulement que je ne lui ai jamais entendu admettre qu’un second amour pût être pardonnable.

      — Ainsi, dit-il, il faudrait un changement total dans ses idées… Mais non, non, je ne le désire pas. Quand les idées romanesques d’un jeune esprit sont forcées de s’évanouir, combien souvent sont elles remplacées par des principes trop communs hélas ! dans le monde, et trop dangereux. J’en parle d’après l’expérience. J’ai connu une jeune dame qui ressemblait extrêmement à votre sœur en tout point ; même chaleur de cœur ; même vivacité d’esprit ; elle pensait et jugeait comme elle, et par un changement forcé, par une série de circonstances malheureuses… Ici il s’arrêta soudainement, comme s’il avait pensé qu’il en disait trop, et donna lieu ainsi à des conjectures, qui sans cela ne seraient jamais entrées dans la tête d’Elinor. Cette dame n’aurait nullement excité ses soupçons, mais le trouble visible du colonel, son interruption convainquit mademoiselle Dashwood que ce qui la concernait était un triste secret, et de là elle fut conduite naturellement à croire que l’émotion du colonel en parlant d’elle était relative à un tendre souvenir. Elle se tut, et ne lui fit aucune question. Avec Maria cela n’aurait pas fini ainsi : l’histoire entière se serait achevée dans son active imagination, si elle n’avait pu en obtenir la confidence, comme la plus mélancolique histoire d’un amour malheureux.

      CHAPITRE XII.

       Table des matières

      Elinor et Maria se promenaient ensemble le matin suivant ; la dernière confia à sa sœur quelque chose, qui, malgré toutes les preuves qu’elle avait de l’imprudence de Maria et de son manque de raison, la surprit par l’excès de son extravagance.

      Maria lui apprit avec un transport de joie, que Willoughby lui avait fait présent d’un cheval ; c’était une jument charmante qu’il avait élevée lui-même à Haute-Combe, sa campagne de Sommerset-Shire, et qui était exactement un cheval de femme, doux, sage, vif et d’une bonne hauteur. Sans considérer qu’il n’entrait pas dans le plan de sa mère d’avoir des chevaux, que si elle y consentait en faveur de ce don, il faudrait en acheter un autre pour un domestique, puis engager un palefrenier pour en avoir soin, et après tout cela bâtir une écurie pour le loger, elle avait accepté cet inconcevable présent sans hésiter, et le dit à sa sœur avec ravissement. Il compte, ajouta-t-elle, envoyer un de ces jours son jokey en Sommerset-Shire pour la chercher, et quand elle sera arrivée, nous la monterons tous les jours, escortées par Willoughby ; nous irons tour-à-tour, vous et moi, car, ma chère Elinor, vous en userez tout comme moi. Imaginer le délice de galoper dans cette plaine, de grimper à cheval ces collines.

      Elinor souffrait de faire évanouir ce songe de félicite ; il le fallait cependant. Elle rassembla son courage, et tâcha de lui faire comprendre avec tendresse et raison qu’elle devait y renoncer. Maria ne voulait d’abord rien entendre ; elle avait réponse à tout ; elle était sûre que sa maman n’y ferait nulle objection ; un domestique de plus serait une bagatelle ; tout cheval serait bon pour lui, il en emprunterait au Park, et pour écurie le plus simple hangar serait suffisant. Alors Elinor essaya d’élever quelques doutes sur l’inconvenance d’accepter un présent d’un jeune homme, qu’elle connaissait aussi peu. C’en était trop, et les yeux noirs de Maria brillèrent d’indignation.

      — Vous vous trompez, Elinor, dit-elle vivement, en supposant que je connaisse peu Willoughby ; il n’y a pas longtemps il est vrai que je le vois, mais je le connais plus que qui que ce soit au monde, excepté vous et maman. Ce n’est ni le temps, ni l’occasion qui déterminent les liaisons du cœur ; c’est uniquement

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