Conscience. Hector Malot

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      —Je voudrais y réfléchir,

      —Rien de plus juste; d'ailleurs il n'y a pas urgence.

      —Où il y a urgence, c'est avec moi; car, si je ne paye pas Jardine, je me trouve dans la rue, ce qui n'est pas une position à offrir à une femme.

      —Dans la rue, dans la rue! Les choses n'iront pas aussi vite que cela. Où en sont les poursuites?

      —Elles vont commencer; Jardine m'en a menacé.

      —Elles vont commencer; elles ne sont pas commencées. Si, comme je le présume, il procède par une saisie-revendication, nous aurons du temps avant le jugement. Devez-vous quelque chose à votre propriétaire?

      —Le terme échu le 15.

      —Ne le payez pas.

      —Cela est facile; il n'y a même que cela qui me soit facile.

      —C'est un obstacle dans les jambes de votre Jardine et qui peut l'arrêter un moment. Nous pourrons ainsi manoeuvrer plus aisément. L'essentiel est de m'avertir aussitôt que le feu commencera. Au revoir donc, cher monsieur.

       Table des matières

      Bien que Saniel n'eût aucune expérience des affaires, il n'était pas assez naïf pour ne pas comprendre que Caffié, en lui refusant ce prêt, voulait le tenir dans une dépendance étroite.

      —Le calcul est simple, se dit-il, en descendant l'escalier; il se charge de ma défense et la conduit de telle sorte qu'un beau jour, qui n'est pas loin, je ne peux me sauver qu'en tendant la main à la jeune fille charmante. Quel gredin!

      Cependant, telle était la situation, qu'il devait se trouver heureux d'obtenir le concours de ce gredin: au moins, c'était du temps gagné, et Jardine, en voyant qu'il n'avait plus devant lui un mouton disposé à se laisser égorger, accepterait peut-être un arrangement raisonnable; le tout était de manoeuvrer de façon que Caffié n'empêchât pas cet arrangement.

      Par malheur, il se sentait peu propre à cette manoeuvre, ayant toujours été droit devant lui, l'oeil fixé sur son but, ne pensant qu'au travail qui le lui ferait atteindre;—et voilà que maintenant il fallait qu'il s'improvisât diplomate; en se pliant à des finesses, à des roueries qui n'étaient pas du tout dans sa nature brutale: il avait commencé en ne disant pas tout de suite à Caffié ce qu'il pensait de ses propositions; mais il est plus difficile d'agir que de se contenir, de parler que de se taire.

      Que dirait-il, que ferait-il, quand le moment de l'action serait venu?

      Il arriva chez lui sans avoir rien trouvé, et, comme il passait devant la loge du concierge, absorbé dans sa préoccupation, il entendit qu'on l'appelait:

      —Monchieur le docteur, voulez-vous bien entrer un moment, je vous prie?

      Il pensa que c'était quelque consultation qu'on voulait lui demander, un pays qui attendait son retour comme cela se produisait si souvent, et, bien qu'il ne fût pas en disposition d'écouter patiemment des bavardages imbéciles, il revint sur ses pas et entra dans la loge.

      —C'est cha qu'on a apporté, dit le concierge en lui tendant une feuille de papier timbré couverte d'une écriture courue.

      Cha, c'était le commencement du feu dont Caffié avait parlé. Sans la lire jusqu'au bout Saniel la mit dans sa poche et se prépara à sortir; mais le concierge le retint.

      —Je voudrais dire deux mots à monchieur le docteur relativement à ce papier.

      —Vous l'avez lu?

      —Pour cha non, mais j'ai causé avec le clerc d'huissier qui me l'a remis «parlant à ma perchonne» et il m'a expliqué la situation. C'est-y malheureux, monchieur le docteur!

      Il ne manquait plus à Saniel que d'être plaint par son concierge.

      —Elle n'est pas ce qu'on vous a dit, répliqua-t-il avec hauteur.

      —Allons, tant mieux! j'en suis bien content, pour vous et pour moi. Vous pourrez me payer ma petite note.

      —Vous me la donnerez.

      —Je vous l'ai déjà donnée deux fois, mais je l'ai refaite; la voilà.

      La réclamation d'un créancier paralysait Saniel ou bien il restait bouche béante, étouffé par l'humiliation, ou bien il ne trouvait à répondre que des maladresses. Prenant la note que le concierge lui tendait, il la mit dans sa poche en balbutiant quelques mots.

      —Voyez-vous, monchieur le docteur, faut que je vous dise ce que j'ai sur le coeur depuis longtemps. Vous êtes mon pays et je vous estime trop pour ne pas parler. En prenant votre appartement, en vous engageant avec votre tapissier vous avez fait plus que force: vous vous épuisez; quittez cet appartement, prenez celui d'en face qui coûte moitié moins, et ça ira. Vous ne serez pas forcé d'abandonner le quartier. Qu'est-ce que deviendraient les pays si vous nous quittiez? Vous êtes un bon médecin, tout le monde le reconnaît et le dit, les pays s'entend. Maintenant, pour ma petite note, il est convenu que je passerai le premier, n'est-ce pas, comme de juste?

      —Aussitôt que j'aurai de l'argent, je vous payerai.

      —C'est dit?

      —Je vous le promets.

      —Je vous remercie bien. Si ça pouvait être demain, cha ferait mon affaire; je ne suis pas riche, vous savez, et pourtant j'ai toujours payé le gaz de vos expériences.

      Son papier timbré dans sa poche, Saniel retourna chez Caffié qu'il rencontra sous sa porte cochère, où il lui remit l'exploit de l'huissier.

      —Je verrai ça ce soir, dit l'homme d'affaires; pour le moment, je vais dîner. Mais soyez tranquille, je ferai dès demain matin le nécessaire. Bonsoir; je meurs de faim.

      Si Saniel ne mourait pas de faim, il eût cependant, lui aussi, dîné volontiers, mais trois jours auparavant il s'était saigné à blanc pour adoucir son tapissier par un acompte aussi fort qu'il avait pu le faire, ne gardant que cinq francs pour lui, et ce n'était pas avec les quelques sous qui lui restaient qu'il pouvait entrer dans un restaurant ni même dans une gargote, si misérable qu'elle fût. Il n'avait qu'à acheter un pain dont il souperait en travaillant comme cela lui était si souvent arrivé.

      Mais en rentrant, il ne put pas, comme il le voulait, se mettre à l'article qu'il devait écrire et et livrer le soir même. Parmi les besognes dont il s'était chargé, il y en avait une, et non la moins fastidieuse; qui consistait à donner, par correspondance, des consultations aux abonnés d'un journal de modes ou, plus justement, à recommander, en empruntant la forme de conseils médicaux, tous les cosmétiques,—pâtes épilatoires, élixirs, eaux aromatiques, teintures, essences, huiles, vinaigres, laits, crèmes, savons, opiats, pommades, glycérines, vaselines, sachets, pastilles, dentifrices, fards; et aussi toutes les spécialités pharmaceutiques—vins fortifiants, pilules régénératrices, pâtes pectorales, goudrons, fers, sirops, purgatifs, auxquels leurs inventeurs voulaient donner une autorité que le public,

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