La Comédie de la mort. Theophile Gautier

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La Comédie de la mort - Theophile Gautier

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Personne ne t'écoute, et ta cape ruisselle

       Des pleurs de l'ouragan…

       Il ne me répond rien; dites quel est cet homme

       O mort, et savez-vous le nom dont on le nomme!

       Cet homme, c'est don Juan.

       Table des matières

      DON JUAN.

      Heureux adolescents, dont le coeur s'ouvre à peine

       Comme une violette à la première haleine

       Du printemps qui sourit,

       Ames couleurs de lait, frais buissons d'aubépine

       Où, sous le pur rayon, dans la pluie argentine

       Tout gazouille et fleurit.

      O vous tous qui sortez des bras de votre mère

       Sans connaître la vie et la science amère,

       Et qui voulez savoir,

       Poètes et rêveurs, plus d'une fois, sans doute,

       Aux lisières des bois, en suivant votre route

       Dans la rougeur du soir,

      A l'heure enchanteresse, où sur le bout des branches

       On voit se becqueter les tourterelles blanches

       Et les bouvreuils au nid,

       Quand la nature lasse en s'endormant soupire,

       Et que la feuille au vent vibre comme une lyre

       Après le chant fini;

      Quand le calme et l'oubli viennent à toutes choses

       Et que le sylphe rentre au pavillon des roses

       Sous les parfums plié;

       Emus de tout cela, pleins d'ardeurs inquiètes

       Vous avez souhaité ma liste et mes conquêtes;

       Vous m'avez envié

      Les festins, les baisers sur les épaules nues,

       Toutes ces voluptés à votre âge inconnues,

       Aimable et cher tourment!

       Zerbine, Elvire, Anna, mes Romaines jalouses,

       Mes beaux lis d'Albion, mes brunes Andalouses,

       Tout mon troupeau charmant.

      Et vous vous êtes dit par la voix de vos âmes:

       Comment faisais-tu donc pour avoir plus de femmes

       Que n'en a le sultan?

       Comment faisais-tu donc, malgré verroux et grilles,

       Pour te glisser au lit des belles jeunes filles,

       Heureux, heureux don Juan!

      Conquérant oublieux, une seule de celles

       Que tu n'inscrivais pas, une entre tes moins belles

       Ta plus modeste fleur,

       Oh! combien et longtemps nous l'eussions adorée!

       Elle aurait embelli, dans une urne dorée,

       L'autel de notre coeur.

      Elle aurait parfumé, cette humble paquerette

       Dont sous l'herbe ton pied a fait ployer la tête,

       Notre pâle printemps;

       Nous l'aurions recueillie, et de nos pleurs trempée,

       Cette étoile aux yeux bleus, dans le bal échappée

       A tes doigts inconstants.

      Adorables frissons de l'amoureuse fièvre,

       Ramiers qui descendez du ciel sur une lèvre,

       Baisers âcres et doux,

       Chutes du dernier voile, et vous cascades blondes,

       Cheveux d'or, inondant un dos brun de vos ondes

       Quand vous connaîtrons-nous?

      Enfant, je les connais tous ces plaisirs qu'on rêve;

       Autour du tronc fatal l'antique serpent d'Ève

       Ne s'est pas mieux tordu.

       Aux yeux mortels, jamais dragon à tête d'homme

       N'a d'un plus vif éclat fait reluire la pomme

       De l'arbre défendu.

      Souvent, comme des nids de fauvettes farouches,

       Tout prêts à s'envoler, j'ai surpris sur des bouches

       Des nids d'aveux tremblants,

       J'ai serré dans mes bras de ravissants fantômes,

       Bien des vierges en fleur m'ont versé les purs baumes

       De leurs calices blancs.

      Pour en avoir le mot, courtisanes rusées,

       J'ai pressé, sous le fard, vos lèvres plus usées

       Que le grès des chemins.

       Égouts impurs, où vont tous les ruisseaux du monde,

       J'ai plongé sous vos flots; et toi, débauche immonde,

       J'ai vu tes lendemains.

      J'ai vu les plus purs fronts rouler après l'orgie

       Parmi les flots de vin, sur la nappe rougie;

       J'ai vu les fins de bal

       Et la sueur des bras, et la pâleur des têtes

       Plus mornes que la mort sous leurs boucles défaites

       Au soleil matinal.

      Comme un mineur qui suit une veine inféconde,

       J'ai fouillé nuit et jour l'existence profonde

       Sans trouver le filon.

       J'ai demandé la vie à l'amour qui la donne,

       Mais vainement;

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