Quentin Durward. Вальтер Скотт

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Quentin Durward - Вальтер Скотт

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Durward ouvrait la bouche pour s'excuser d'accepter le présent que lui offrait la libéralité de son nouvel ami; mais maître Pierre, fronçant ses gros sourcils, se redressant, et prenant un air plus imposant qu'il ne l'avait encore fait, lui dit d'un ton d'autorité: – Point de réplique, jeune homme, et faites ce qui vous est ordonné.

      À ces mots, il sortit de l'appartement, et fit signe à Quentin qu'il ne devait pas le suivre.

      Le jeune Écossais resta stupéfait, ne sachant que penser de tout ce qui venait de lui arriver. Son premier mouvement, le plus naturel, sinon le plus noble, fut de jeter un coup d'œil sur la coupe, qui était plus qu'à demi pleine de pièces d'argent dont peut-être il n'avait jamais eu le quart à sa disposition pendant tout le cours de sa vie. Mais sa dignité, comme gentilhomme, lui permettait-elle d'accepter l'argent de ce riche plébéien? C'était une question délicate; car, quoiqu'il vînt de faire un excellent déjeuner, il n'était pas en fonds, soit pour retourner à Dijon, dans le cas où il voudrait entrer au service du duc de Bourgogne, au risque de s'exposer à son courroux, soit pour se rendre à Saint-Quentin, s'il donnait la préférence au connétable de Saint-Pol, car il était déterminé à offrir ses services à l'un de ces deux seigneurs, sinon au roi de France. La résolution à laquelle il s'arrêta fut peut-être la plus sage qu'il pût prendre dans la circonstance; c'était de se laisser guider par les conseils de son oncle. En attendant, il mit l'argent dans son sac de velours, et appela l'hôte pour lui dire d'emporter la coupe d'argent, et pour lui faire en même temps quelques questions sur ce marchand si libéral, et qui savait si bien prendre un ton d'autorité.

      Le maître de la maison arriva à l'instant; et, s'il ne fut pas très-communicatif, au moins fut-il moins silencieux qu'il ne l'avait été jusqu'alors. Il refusa positivement de reprendre la coupe d'argent. Il n'en avait aucun droit, lui dit-il: elle appartenait à maître Pierre, qui en avait fait présent à celui à qui il venait de donner à déjeuner. Il avait à la vérité quatre hanaps[28] d'argent qui lui avaient été laissés par sa grand'mère, d'heureuse mémoire, mais qui ne ressemblaient pas plus à ce beau vase ciselé qu'un navet ressemble à une pêche. – C'était une de ces fameuses coupes de Tours, travaillées par Martin Dominique, artiste qui pouvait défier tout Paris.

      – Et qui est ce maître Pierre qui fait de si beaux présens aux étrangers? lui demanda Quentin en l'interrompant.

      – Qui est maître Pierre? répéta l'hôte en laissant échapper ces paroles de sa bouche aussi lentement que si elles eussent été distillées.

      – Sans doute, dit Durward d'un ton vif et impérieux. Quel est ce maître Pierre qui se donne les airs d'être si libéral? et qui est cette espèce de boucher qu'il a envoyé en avant pour ordonner le déjeuner?

      – Ma foi, monsieur, quant à ce qu'est maître Pierre, vous auriez dû lui faire cette question à lui-même; et pour celui qui est venu donner ordre de préparer le déjeuner, Dieu nous préserve de faire connaissance de plus près avec lui.

      – Il y a quelque mystère dans tout cela! Ce maître Pierre m'a dit qu'il est marchand.

      – S'il vous l'a dit, c'est que c'est la vérité.

      – Et quel genre de commerce fait-il?

      – Oh! un très-beau commerce. Entre autres choses, il a été établi ici des manufactures de soieries qui peuvent le disputer à ces riches étoffes que les Vénitiens apportent de l'Inde et du Cathay. Vous avez vu de grandes plantations de mûriers en venant ici: elles ont été faites par ordre de maître Pierre, pour nourrir les vers à soie.

      – Et cette jeune personne qui a apporté ce plateau, qui est-elle, mon cher ami?

      – Ma locataire, ainsi qu'une tutrice plus âgée, qui est quelque tante ou quelque cousine, à ce que je pense.

      – Et êtes-vous dans l'usage d'employer vos locataires à servir vos hôtes? J'ai remarqué que maître Pierre ne voulait rien recevoir ni de votre main ni de celle de votre garçon.

      – Les gens riches ont leurs fantaisies, parce qu'ils peuvent les payer. Ce n'est pas la première fois que maître Pierre a trouvé le moyen de se faire servir par des nobles.

      Le jeune Écossais se trouva un peu offensé de cette observation; mais, déguisant son humeur, il demanda à son hôte s'il pouvait avoir un appartement chez lui pour la journée, et peut-être pour plus long-temps.

      – Sans contredit, et pour tout le temps que vous le désirerez.

      – Et comme je vais loger sous le même toit que ces deux dames, pourrait-il m'être permis de leur présenter mes respects?

      – Je n'en sais trop rien. Elles ne sortent point, et ne reçoivent aucune visite.

      – À l'exception de celle de maître Pierre, sans doute?

      – Il ne m'est pas permis de citer aucune exception? répondit l'aubergiste avec une assurance respectueuse.

      Quentin avait une idée assez haute de son importance, si on considère le peu de moyens qu'il avait pour la soutenir. Un peu mortifié par la réponse de l'hôte, il n'hésita pas à se prévaloir d'un usage assez commun dans ce siècle.

      – Portez à ces dames, lui dit-il, un flacon de vernat[29]; offrez-leur mes très-humbles respects, et dites-leur que Quentin Durward, de la maison de Glen-Houlakin, honorable cavalier Écossais, et logeant en ce moment comme elles dans cette hôtellerie, leur demande la permission de leur présenter personnellement ses hommages.

      L'hôte sortit, revint presque au même instant, et annonça que les dames offraient leurs remerciemens au cavalier Écossais, ne croyaient pas devoir accepter le rafraîchissement offert, et regrettaient de ne pouvoir recevoir sa visite, attendu la retraite dans laquelle elles vivaient.

      Quentin se mordit les lèvres; puis, se versant un coup du vernat qu'on avait refusé, et que l'hôte avait placé sur la table, il dit en lui-même: – Par la messe! voici un pays bien étrange. Des marchands et des ouvriers y ont les manières et la munificence de grands seigneurs, et de petites filles qui tiennent leur cour dans un cabaret, se donnent des airs comme si elles étaient des princesses déguisées! Je reverrai pourtant cette belle aux sourcils noirs, ou les choses iraient bien mal.

      Ayant pris cette sage résolution, il demanda à être conduit dans l'appartement qui lui était destiné.

      L'aubergiste le fit monter par un escalier tournant qui aboutissait à une galerie sur laquelle donnaient plusieurs portes, comme celles des cellules d'un couvent; cette ressemblance n'excita pas une grande admiration en notre héros, qui se souvenait avec beaucoup d'ennui de l'avant-goût qu'il avait eu de bonne heure de la vie monastique. L'hôte s'arrêta au bout de la galerie, choisit une clef dans le trousseau qu'il portait à sa ceinture, ouvrit une porte et montra à Durward une chambre formant l'intérieur d'une tourelle. Elle était étroite à la vérité, mais fort propre, un peu écartée des autres, garnie d'un fort beau lit, et de meubles fort supérieurs à ceux qu'on trouve ordinairement dans les auberges; elle lui parut, au total, un petit palais.

      – J'espère, monsieur, que vous trouverez votre appartement agréable, lui dit l'hôte en se retirant. C'est un devoir pour moi de satisfaire tous les amis de maître Pierre.

      – L'heureux plongeon que j'ai fait ce matin! s'écria Quentin, qui en parlant ainsi pirouetta de contentement dans sa chambre, dès que l'hôte fut parti; il n'y eut jamais bonheur si grand,

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<p>28</p>

Espèce de coupe. Ce vieux mot français est employé par l'auteur. – (Note de l'éditeur.)

<p>29</p>

Espèce de liqueur. – (Note de l'éditeur.)