La race future. Эдвард Бульвер-Литтон
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–Zee,—dit mon hôte avec douceur,—tu appartiens au Collège des Sages et tu dois être plus savante que je ne le suis; mais comme Directeur du Conseil de la Conservation des Lumières, il est de mon devoir de ne rien croire que sur le témoignage de mes propres sens.
Alors, se tournant vers moi, il m'adressa plusieurs questions sur la surface de la terre et sur les corps célestes; quelque soin que je prisse de lui répondre de mon mieux, je ne parus ni le satisfaire ni le convaincre. Il secoua tranquillement la tête et, changeant un peu brusquement de sujet, il me demanda comment, de ce qu'il se plaisait à appeler un monde, j'étais descendu dans un autre monde. Je répondis que sous la surface de la terre il y avait des mines contenant des minéraux ou métaux nécessaires à nos besoins et à nos progrès dans les arts et l'industrie; je lui expliquai alors brièvement comment, en explorant une de ces mines, mon malheureux ami et moi avions aperçu de loin les régions dans lesquelles nous étions descendus et comment notre tentative lui avait coûté la vie. Je donnai comme témoins de ma véracité la corde et les grappins que l'enfant avait rapportés dans l'édifice où j'avais d'abord été reçu.
Mon hôte se mit alors à me questionner sur les habitudes et les mœurs des races de la surface de la terre, surtout de celles que je regardais comme les plus avancées dans cette civilisation qu'il définissait volontiers: «l'art de répandre dans une communauté le tranquille bonheur qui est l'apanage d'une famille vertueuse et bien réglée.» Naturellement désireux de représenter sous les couleurs les plus favorables le monde d'où je venais, je passai légèrement, quoique avec indulgence, sur les institutions antiques et déjà en décadence de l'Europe, afin de m'étendre sur la grandeur présente et la prééminence future de cette glorieuse République Américaine, dans laquelle l'Europe cherche, non sans jalousie, un modèle et devant laquelle elle tremble en prévoyant son destin. Choisissant comme exemple de la vie sociale aux États-Unis la ville où le progrès marche avec le plus de rapidité, je me lançai dans une description animée des mœurs de New-York. Mortifié de voir, à la physionomie de mes auditeurs, que je ne produisais pas l'impression favorable à laquelle je m'attendais, je m'élevai plus haut; j'insistai sur l'excellence des institutions démocratiques, sur la manière dont elles faisaient régner un tranquille bonheur par le gouvernement d'un parti, et sur la façon dont elles répandaient ce bonheur dans les masses en préférant, pour l'exercice du pouvoir et l'acquisition des honneurs, les citoyens les plus infimes sous le rapport de la fortune, de l'éducation et du caractère. Je me souvins heureusement de la péroraison d'un discours sur l'influence purifiante de la démocratie américaine et sur sa propagation future dans le monde entier; discours prononcé par un certain sénateur éloquent (pour le vote sénatorial duquel une compagnie de chemin de fer, à laquelle appartenaient mes deux frères, venait de payer 20,000 dollars), et je terminai en répétant ses brillantes prédictions sur l'avenir magnifique qui souriait à l'humanité, quand le drapeau de la liberté flotterait sur tout un continent, alors que deux cents millions de citoyens intelligents, habitués dès l'enfance à l'usage quotidien du revolver, appliqueraient à l'Univers épouvanté les doctrines du patriote Monroë.
Quand j'eus fini, mon hôte secoua doucement la tête et tomba dans une rêverie profonde, en faisant signe à sa fille et à moi de rester silencieux pendant qu'il réfléchissait. Au bout d'un certain temps, il dit d'un ton sérieux et solennel:
–Si vous pensez, comme vous le dites, que, quoique étranger, vous avez été bien traité par moi et les miens, je vous adjure de ne rien révéler de votre monde à aucun de mes concitoyens, à moins que, après réflexion, je ne vous permette de le faire. Consentez-vous à cette demande?
–Je vous donne ma parole de me conformer à vos désirs,—dis-je un peu surpris.
Et j'étendis ma main droite pour saisir la sienne. Mais il plaça doucement ma main sur son front et sa main droite sur ma poitrine, ce qui est, pour cette race, une manière de s'engager pour toute espèce de promesse ou d'obligation verbale. Puis, se tournant vers sa fille, il dit:—
–Et toi, Zee, tu ne répéteras à personne ce que l'étranger a dit, ou pourra dire, soit à toi, soit à moi, d'un monde autre que celui où nous vivons.
Zee se leva et baisa son père sur les tempes, en disant avec un sourire:—
–La langue d'une Gy est légère, mais l'amour peut la lier. Et, mon père, si tu crains qu'un mot de toi ou de moi puisse exposer l'État au danger, par le désir d'explorer un monde inconnu, une vague du vril, convenablement arrangée, n'effacera-t-elle pas de notre mémoire ce que l'étranger nous a dit?
–Qu'est-ce que le vril?—demandai-je.
Là-dessus Zee commença une explication dont je compris fort peu de chose, car il n'y a dans aucune langue que je connaisse aucun mot qui soit synonyme de vril. Je l'appellerais électricité, si ce n'est qu'il embrasse dans ses branches nombreuses d'autres forces de la nature, auxquelles, dans nos nomenclatures scientifiques, on assigne différents noms, tels que magnétisme, galvanisme, etc. Ces peuples croient avoir trouvé dans le vril l'unité des agents naturels, unité que beaucoup de philosophes terrestres ont soupçonnée et dont Faraday parle sous le nom plus réservé de corrélation.
«Je suis depuis longtemps d'avis,» dit cet illustre expérimentateur, «et mon opinion est devenue presque une conviction commune, je crois, à beaucoup d'autres amis des sciences naturelles, que les formes variées sous lesquelles les forces de la matière nous sont manifestées ont une commune origine; ou, en d'autres termes, qu'elles sont en corrélation directe et dans une dépendance mutuelle, de sorte qu'elles sont pour ainsi dire convertibles les unes dans les autres, et que leur action peut être ramenée à une commune mesure, à un équivalent commun.»
Les philosophes souterrains affirment que par l'effet du vril, que Faraday appellerait peut-être le magnétisme atmosphérique, ils ont une influence sur les variations de la température, ou, en langage vulgaire, sur le temps; que par d'autres effets, voisins de ceux qu'on attribue au mesmérisme, à l'électro-biologie, à la force odique, etc., mais appliqués scientifiquement par des conducteurs de vril, ils peuvent exercer sur les esprits et les corps animaux ou végétaux un pouvoir qui dépasse tous les contes fantastiques de nos rêveurs. Ils donnent à tous ces effets le nom commun de vril. Zee me demanda si, dans mon monde, on ne savait pas que toutes les facultés de l'esprit peuvent être surexcitées à un point dont on n'a pas l'idée pendant la veille, au moyen de l'extase ou vision, pendant laquelle les pensées d'un cerveau peuvent être transmises à un autre et les connaissances s'échanger ainsi rapidement. Je répondis qu'on racontait parmi nous des histoires relatives à ces extases ou visions, que j'en avais beaucoup entendu parler et que j'avais vu quelque chose de la façon dont on les produisait artificiellement, par exemple, dans la clairvoyance magnétique; mais que ces expériences étaient tombées dans l'oubli ou dans le mépris, en partie à cause des impostures grossières auxquelles elles donnaient lieu, en partie, parce que, même quand les effets sur certaines constitutions anormales se produisaient sans charlatanisme, cependant lorsqu'on les examinait de près et qu'on les analysait, les résultats en étaient peu satisfaisants; qu'on ne pouvait s'y appuyer pour établir un système de connaissances vraies, ou s'en servir dans un but pratique; de plus, que ces expériences étaient dangereuses pour les personnes crédules par les superstitions qu'elles tendaient à faire naître. Zee écouta ma réponse avec une attention pleine de bonté et me dit que des exemples semblables de tromperie et de crédulité avaient été fréquents dans leurs expériences scientifiques, quand la science était encore dans l'enfance, alors qu'on redoutait les propriétés du vril, mais qu'elle réservait une discussion plus approfondie de ce sujet pour le moment où je serais plus en état d'y prendre part. Elle se contenta d'ajouter que c'était par le moyen du vril, tandis que j'avais été mis en extase, qu'on m'avait enseigné les rudiments de leur langue; et que son père et elle, qui, seuls de la famille, s'étaient donné la peine de