La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits. Rosette

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La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits - Rosette

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allongea la main, à m’effleurer les cheveux avec une caresse, les doigts plus légères que les plumes.

      “Les rêves nous échappent, Mélisande. Ils naissent de nous, mais ils nous n’appartiennent pas complètement. Ils ont leur propre volonté et ils terminent quand ils le décident”.

      J’insistais, comme une petite fille. “Je ne l’aime pas”.

      Une gravité insolite traversa son visage. “Personne ne l’aime, mais le monde est injuste par antonomase”.

      Je cherchai à retenir le rêve, mais mes bras étaient trop faibles, et mon cri fut seulement un souffle. Il disparait vite, comme la première fois. Je me trouvai réveillée, les oreilles étourdies par un bruit sourd. Puis je compris, choquée, qu’ils étaient les coups arythmiques de mon cœur. Lui-même était en train de s’en aller tout seul, comme si rien ne m’appartenait. Je n’avais plus le contrôle sur aucune partie de mon corps.

      A me choquer c’était le fait que je n’en avais plus néanmoins sur mon esprit, et mes sentiments.

      La lettre arriva ce matin, et il eut l’effet dérompent d’une pierre jetée dans un étang. Elle finit dans un point précis, mais elle a des effets sur les points circonstants, en cercles concentriques et très étendus.

      Mon humeur était élevée, et je commençai la journée en chantonnant. Sans doute ça ne me ressemblait pas.

      Madame Mc Millian servit le petit déjeuner en silence religieux, occupée à faire semblant de n’être pas curieuse à propos du diner du soir précédent.

      Je décidai de ne pas trainer les choses en longueur. Je devais clarifier ses doutes avant qu’elle se créât des fausses certitudes propres, et délétères pour ma réputation, et peut-être même pour celui de Monsieur Mc Laine. Tout espoir sentimental à ses égards était exclusivement le résultat de mes rêves, et je ne devais pas céder à leur magnificence évanescente.

      “Madame Mc Millian...”

      “Oui, Mademoiselle Bruno?” Elle était en train de beurrer le pain grillé, et elle posa la question sans soulever les yeux.

      “Monsieur Mc Laine se sentait seul hier soir, et il m’a demandé de lui faire compagnie. Si je n’étais pas, il l’aurait demandé à vous. Ou à Kyle” dis-je déterminée.

      Elle se mit les lunettes sur le nez et hocha la tête. “Mais bien-sûr mademoiselle. Je n’ai jamais pensé du mal. Il est évident qu’il s’agissait d’un épisode isolé ”.

      Sa sureté me frappa, bien qu’elle fût raisonnable. Au fond moi aussi je le pensais. Il n’y avait aucune raison d’espérer que l’ambitionné célibataire de la région pouvait tomber amoureux de moi. Il était sur un fauteuil roulant, non pas aveugle. Mon monde en blanc et noir était l’épreuve vivante et constante de ma diversité. Je ne pouvais pas m’autoriser le luxe de l’oublier.

      Jamais. Ou il serait même volé en éclats.

      Je montai les escaliers comme tous les jours. Je me sentais agitée, en dépit de la tranquillité que j’étalais.

      Sébastian Mc Laine souriait déjà quand j’ouvris la porte, et il envoya mon cœur directement au ciel. J’espérai de ne le devoir jamais aller à reprendre.

      “Bonjour monsieur” je lui saluai calme.

      “Comme tu es formelle, Mélisande” il le dit au ton de reproche, comme si nous avions partagé une intimité plus grande qu’un simple diner.

      Mes joues brulèrent, et je fus sûre d’être rougies, même si je n’avais pas l’idée du signifié réel de ce mot. Le rouge était une couleur sombre, identique au noir dans mon monde.

      “C’est seulement respect, monsieur” dis-je, en mitigeant mon ton formel avec un sourire.

      “Je n’ai fait pas beaucoup pour me le mériter” réfléchit-il. “Au contraire, je t’aurais semblé odieux quelque fois”.

      “Non, monsieur” répondis-je, en marchant sur un terrain miné. Le danger de faire éclater sa colère était toujours latente, présent dans tout notre échange verbal, et je ne pouvais pas baisser la garde. Même si mon cœur l’avait déjà fait.

      “Ne pas mentir. Je ne le supporte pas” répliqua-t-il, sans perdre son sourire merveilleux.

      Je m’assis face de lui, prête à dérouler les tâches pour lesquelles j’étais payée. Sans doute je ne l’étais pas pour tomber amoureuse de lui. C’était hors de question.

      Il m’indiqua un paquet de correspondance sur son bureau. “Subdivise la correspondance personnelle de celle de travail, s’il vous plait”.

      Détourner mes yeux de siens, pleins d’une douceur nouvelle, fut un effort. Je continuai à les sentir sur moi, chauds et irrésistibles, et je fatiguai à me concentrer.

      Une lettre attira mon attention, puisqu’il n’y avait le nom de l’expéditeur et la calligraphie sur l’enveloppe m’était bien connue. Comme s’il n’était pas suffisant, le destinataire n’était pas mon aimé écrivain, mais moi-même.

      Je restai paralysée, l’enveloppe entre les doigts, la tête encombre de pensées contrastantes.

      “Quelque chose ne marche pas?”

      Mon regard se souleva à rencontrer le sien. Il me regardait, et je m’aperçus qu’il ne s’était jamais arrêté de le faire.

      “Non, je... ça va tout bien... C’est seulement que...” J’étais perdue dans un dilemme labyrinthique: lui confier ou non de la lettre? Si je m’étais tu, il y avait le danger que plus tard Kyle lui l’aurait dit. C’était lui qui retirait la correspondance et la posait sur le bureau. Ou peut-être qu’il ne s’était pas aperçu qu’une lettre avait un autre destinataire. Je pouvais compter sur cela, et mettre à part la lettre pour la récupérer plus tard? Non, on ne pouvait pas le proposer. Mc Laine était trop analytique, et il ne laissait pas passer grand-chose. Le poids de mon mensonge s’opposa entre nous.

      Il tendit la main, en me mettant au pied du mur. Il avait perçu mon indécision, et il prétendait de voir avec ses yeux.

      Je lui passai l’enveloppe en soupirant fort.

      Ses yeux se détachèrent des miens seulement pendant une seconde, juste le temps de lire le nom sur l’enveloppe, donc ils retournèrent sur les miens. L’hostilité revint en eux, dense comme le brouillard, visqueuse comme le sang, noire comme méfiance.

      “Qui t’a écrit, Mélisande Bruno? Un fiancé loin? Un parent? Ah, non, quel stupide. Tu m’as dit qu’ils sont tous morts. Et alors? Un ami peut-être?”

      Je saisis la balle au bond, en poursuivant dans le mensonge. “Il sera ma vielle collocatarie. Jessica. Je savais qu’elle m’aurait écrit et je lui avais dit mon adresse” dis-je, surprise de la manière avec laquelle les mots me sortaient de la bouche, naturels dans leur fausseté.

      “Lis-la donc. Tu seras anxieuse de le faire. N’hésite pas, Mélisande”. Son ton était mielleux, savouré par une cruauté épouvantable. Dans ce moment je m’aperçus que mon cœur y

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