La Cible Zéro. Джек Марс
Чтение книги онлайн.
Читать онлайн книгу La Cible Zéro - Джек Марс страница 6
“Salut, ma puce.” Reid referma la porte à clés derrière eux et tapa de nouveau le code de l’alarme, avant de se retourner vers Maya. “Trafic ou pas, je veux être prévenu si vous devez avoir du retard.”
“Tu es névrosé,” murmura-t-elle.
“Pardon ?” Reid cligna des yeux, surpris. “Tu sembles confondre névrose et inquiétude.”
“Oh, je t’en prie,” rétorqua Maya. “Tu ne nous as pas quitté des yeux depuis des semaines. Pas une fois depuis que tu es rentré.”
Comme d’habitude, elle avait raison. Reid avait toujours été un père protecteur, et il l’était devenu encore plus depuis le décès de sa femme et de leur mère, Kate, survenu deux ans plus tôt. Mais, depuis ces quatre dernières semaines, il était devenu un véritable père hélicoptère, constamment en vol stationnaire et, s’il était tout à fait honnête envers lui-même, peut-être légèrement autoritaire.
Mais il n’était pas près de l’admettre.
“Ma chère et tendre enfant,” dit-il d’un air taquin, “à l’aube de l’âge adulte, tu vas devoir apprendre une vérité très dure à encaisser… à savoir que, parfois, tu as tort. Et là, tout de suite, tu as tort.” Il esquissa un sourire, mais pas elle. Il était dans sa nature de tenter de dissiper les tensions avec ses filles par de l’humour, mais Maya n’était pas dupe.
“Peu importe.” Elle se dirigea de l’entrée vers la cuisine. Elle avait seize ans et elle était sacrément intelligente pour son âge… parfois même, peut-être, trop intelligente pour son propre bien. Elle avait les cheveux bruns de Reid et son penchant pour les discours dramatiques mais, dernièrement, elle semblait avoir été contaminée par la propension qu’ont les adolescents à l’angoisse, tout du moins à la mauvaise humeur… découlant certainement d’un mélange entre les errements constants de Reid et l’absence évidente d’informations sur les événements qui étaient survenus le mois précédent.
Sara, la plus jeune des deux, monta à l’étage. “Je vais me mettre à mes devoirs,” dit-elle tranquillement.
Resté seul dans le couloir de l’entrée, Reid soupira et s’adossa contre le mur blanc. Il avait le cœur serré à cause de ses filles. Sara avait quatorze ans, était généralement gaie et douce, mais quand le sujet de ce qui s’était passé en février était abordé, elle devenait silencieuse ou quittait la pièce. Elle n’avait tout simplement pas envie d’en parler. À peine quelques jours plus tôt, Reid avait essayé de l’inciter à voir un thérapeute, une tierce personne neutre à qui elle pourrait parler. (Bien sûr, il faudrait que ce soit un docteur affilié à la CIA) Sara avait refusé d’un simple et succinct “non merci” et s’était dépêchée de quitter la pièce avant que Reid puisse prononcer un mot de plus.
Il détestait cacher la vérité à ses filles, mais c’était nécessaire. En dehors de l’agence et d’Interpol, personne ne devait connaître la vérité : à savoir que, depuis un peu plus d’un mois, il avait retrouvé une partie de ses souvenirs en tant qu’agent de la CIA sous le pseudonyme Kent Steele, également connu de ses pairs et de ses ennemis sous le nom d’Agent Zéro. Un suppresseur de mémoire expérimental dans sa tête lui avait fait complètement oublier Kent Steele et son métier d’agent pendant près de deux ans, jusqu’à ce que le dispositif soit retiré de son crâne.
La plupart de ses souvenirs en tant que Kent n’étaient toujours pas revenus. Ils étaient là, emprisonnés quelque part dans les tréfonds de son cerveau, coulant au goutte à goutte comme un robinet qui fuit, en général quand une stimulation visuelle ou orale les délivrait. Le retrait sauvage du suppresseur de mémoire avait causé un choc à son système limbique qui empêchait les souvenirs de revenir tout d’un coup… et Reid en était plutôt soulagé. En se basant sur le peu qu’il savait de sa vie en tant qu’Agent Zéro, il n’était pas sûr de vouloir se souvenir de tout. Sa plus grosse inquiétude était de se rappeler de quelque chose dont il ne voudrait pas se souvenir, un regret douloureux ou un acte horrible dont Reid Lawson aurait du mal à vivre en le sachant.
En outre, il avait été extrêmement occupé en permanence depuis les événements de février. La CIA l’avait aidé à reloger sa famille. À son retour aux États-Unis, il avait été envoyé avec ses filles à Alexandria, en Virginie, pas très loin de Washington, DC. L’agence l’avait également aidé à trouver un poste de professeur adjoint à l’Université de Georgetown.
Depuis, il avait été pris dans un tourbillon de choses à faire : inscrire les filles dans leur nouvelle école, s’acclimater à son nouveau boulot et déménager dans cette nouvelle maison en Virginie. Mais Reid y avait grandement contribué en s’occupant constamment l’esprit avec de nouvelles tâches qu’il se créait lui-même. Il avait repeint les pièces. Il avait amélioré la domotique. Il avait acheté de nouveaux meubles et de nouveaux vêtements pour l’école des filles. Il pouvait se le permettre : la CIA lui avait alloué une belle somme pour son implication à stopper l’organisation terroriste appelée Amon. C’était plus que son salaire annuel en tant que professeur. La somme lui était versée mensuellement pour éviter toute suspicion. Les chèques arrivaient sur son compte bancaire en tant que frais de consultation pour une fausse société d’édition censée créer une série de livres d’histoire à publier.
Entre l’argent et une bonne dose de temps libre (il ne donnait que quelques cours par semaine pour le moment), Reid essayait de s’occuper autant que possible. En effet, s’arrêter ne serait-ce qu’un petit moment signifiait penser. Et pensait signifiait réfléchir, non seulement à sa mémoire en morceaux, mais aussi à d’autres choses désagréables.
Comme les neuf noms qu’il avait mémorisés. Les neuf visages qu’il avait observés. Les neuf vies qui avaient été perdues à cause de son échec.
“Non,” murmura-t-il tout bas, seul dans le couloir d’entrée de leur nouvelle maison. “Ne t’inflige pas ça.” Il ne voulait pas se souvenir de ça maintenant. Aussi, il se dirigea vers la cuisine où Maya farfouillait dans le réfrigérateur pour trouver quelque chose à manger.
“Je crois que je vais commander des pizzas,” annonça-t-il. Comme elle ne répondait pas, il ajouta, “Qu’est-ce que tu en penses ?”
Elle referma le frigo en soupirant et s’adossa contre ce dernier. “Ça me va,” se contenta-t-elle de répondre. Puis, elle regarda autour d’elle. “La cuisine est plus jolie. J’adore la lucarne au plafond. La cour est plus grande aussi.”
Reid sourit. “Je parlais des pizzas.”
“Je sais,” répliqua-t-elle en haussant les épaules. “Mais comme on dirait que tu préfères éviter certains sujets ces derniers temps, je me suis dit que j’allais faire pareil.”
Il fut une nouvelle fois saisi par sa dureté. À plusieurs reprises, elle avait réclamé des informations sur ce qui lui était arrivé quand il avait disparu, mais il mettait toujours un terme à la conversation en insistant sur le fait que son histoire de couverture était la vérité, ce qui la mettait en colère car elle savait bien qu’il mentait. Ensuite, elle lâchait l’affaire pendant une semaine environ, avant que le cercle vicieux ne reprenne.
“Tu n’as pas besoin de te comporter ainsi, Maya,” dit-il.
“Je vais aller voir ce que fait Sara.” Maya tourna les talons et quitta la cuisine. L’instant d’après,