Le Visage du Meurtre. Блейк Пирс
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Le coroner haussa les épaules, d’une manière suggérant qu’elle pensait que c’était inutile, et se dirigea vers un autre casier de l’armoire métallique qui servait de dernière demeure provisoire. Elle tira dessus, le tiroir s’ouvrant dans un fort grincement de métal contre métal, et elle recula pour leur permettre d’accéder au résidant.
L’étudiant paraissait encore plus jeune que sur les photos, ainsi allongé sur le plateau métallique froid, avec tout le sang drainé hors de ses joues et la couleur avec. Le sommet de sa tête était un carnage, ouvert et écrasé vers l’intérieur. Il était respectueusement couvert d’un drap, mais le respect n’était dans ce cas-là qu’un obstacle pour Zoe. Zoe s’approcha et le tira sur le côté, notant la réticence de Shelley à faire cela.
Durant une longue seconde, Zoe le fixa du regard, incapable de comprendre ce qu’elle voyait. Puis elle se demanda s’ils n’avaient pas sorti le mauvais corps, mais elle reconnut son visage d’après les photos de la scène de crime. Finalement, le doute régna et elle se tourna vers le coroner en lui lançant un regard si noir que l’autre femme dut reculer.
« Où sont les équations ? » demanda Zoe d’un ton bas et lisse, assez menaçant pour prévenir quiconque de la rage qui se cachait derrière.
« Eh bien, nous avons effectué l’autopsie, » bégaya le coroner, en cherchant une table métallique derrière elle pour se maintenir. « Nous lavons toujours les corps afin d’effectuer l’autopsie.
– Vous avez effacé les preuves. »
Shelley s’approcha et posa gentiment sa main sur le bras de Zoe, peut-être pour l‘inviter à se calmer. Zoe l’ignora. Elle bouillonnait, chaque muscle dans son corps prêt à exploser en une tornade d’énergie et à balancer quelque chose contre le mur. Peut-être contre le coroner.
La seule raison pour laquelle elle ne le fit pas était que c’était évidemment contraire au code déontologique. Comment auraient-ils toléré quelque chose de pareil ?
« Qui a autorisé le nettoyage ? » demanda Shelley d’une voix calme et posée. Elle avança légèrement devant Zoe, comme pour la protéger.
Le coroner fouilla dans ses papiers, toujours bégayant, le visage devenu pâle. Zoe ne pouvait plus le supporter. Elle sortit précipitamment de la pièce avec un grognement guttural, et claqua la porte derrière elle pour couronner le tout. Mais la porte étant battante, le mouvement perdit un peu de son effet, contribuant tout de même à relâcher une partie de la tension accumulée dans son corps.
Shelley la rejoignit quelques minutes plus tard, la trouvant faisant les cent pas au bout du couloir.
« Il faudrait qu’on leur fasse un rapport pour avoir manipulé les preuves, » dit Zoe une fois que Shelley fut assez proche pour l’entendre.
« Ils ont agi dans les limites de leurs prérogatives, » soupira Shelley, haussant les épaules. « Le photographe a considéré qu’ils avaient tout pris. Il va falloir leur faire confiance.
– Ils devraient quand même être punis. Ils n’ont pas de bon sens ? C’était évidemment une preuve. Et les enquêteurs principaux n’avaient même pas encore vu le corps !
– Bon, à vrai dire, c’était une affaire locale quand ils ont effectué l’autopsie, et non une fédérale. Ce qui est fait est fait. On n’a qu’à travailler avec ce qu’on a. »
Shelley était rationnelle ; trop rationnelle. Zoe n’aimait pas cela. Elle voulait une justification pour la frustration qu’elle ressentait, bon sang, un sentiment commun entre les deux. Elle détestait qu’on la fasse se sentir comme étant la folle de service, avec son problème. Les choses mal faites étaient un problème. Les gens étaient censés faire le boulot pour lequel ils étaient payés. C’était ainsi que la société fonctionnait.
« Une chose pareille aurait dû leur paraître d’une importance évidente, » dit Zoe, essayant dans une dernière tentative de communiquer un faux sentiment de rage à Shelley.
Cela ne marcha pas. « Nous devons avancer de toute façon, » dit Shelley en sortant et jetant un coup d’œil derrière elle pour s’assurer que Zoe la suivait. « Devrions-nous aller parler avec la femme du professeur ? »
Zoe acquiesça d’un signe de tête, capitulant. Elle exagérait peut-être. On lui avait dit qu’elle pouvait le faire de temps à autre.
Dans cette affaire, il y avait bien plus à découvrir que les simples preuves physiques sur les corps. Bien sûr, le côté mathématique était captivant, de même que de cibler une université renommée. Mais il y avait toujours une autre version à entendre de la part des familles des victimes, les personnes qui les avaient connues.
Peut-être que Mme Henderson pouvait les aider à mieux comprendre la mort de son mari – et à refermer cette enquête frustrante le plus vite possible.
CHAPITRE CINQ
Shelley prit le volant, un événement rare quand elle se déplaçait avec sa partenaire. Shelley savait que normalement, Zoe avait le mal des transports, mais aujourd’hui elle était tellement préoccupée par ses équations qu’elle semblait à peine remarquer les routes qui se succédaient rapidement. Elle ne s’était même pas agrippée à sa ceinture, sa façon à elle de manifester son inconfort.
Shelley lui jeta un coup d’œil à chaque fois qu’elle en avait l’occasion –aux carrefours ou arrêtée dans les bouchons. Ce que Zoe griffonnait frénétiquement sur plusieurs pages de son calepin n’avait aucun sens pour elle. Cela aurait très bien pu être des hiéroglyphes.
Zoe avait un réel talent en matière de chiffres, mais il y avait également d’autres aspects liés à cela. Une obsession tenace pouvait parfois s’emparer d’elle, comme à présent. Autant Shelley aurait voulu l’aider, elle n’avait aucune idée de ce qu’il fallait faire – et Zoe n’allait pas le lui dire. Et elle était ainsi bien souvent. Silencieuse, renfermée. Shelley avait entendu des histoires sur ses anciens partenaires et il n’était pas difficile d’en déduire que Zoe avait peut-être renoncé depuis bien longtemps à confier ses pensées aux autres.
Zoe avait l’habitude de travailler seule. C’était sa façon de fonctionner. Shelley allait changer cela. Seulement, cela risquait de prendre un bon moment. Cependant, elle devait continuer à la motiver et à lui rappeler de partager ses pensées.
Peut-être pas seulement à propos des mathématiques. Shelley pouvait lui faire confiance de travailler là-dessus toute seule.
Le professeur d’anglais avait habité de l’autre côté de la ville, dans l’une des banlieues chics avec ces maison blanches dotées de vastes pelouses et des clôtures blanches assorties. Shelley gara la voiture devant, coupa le moteur et attendit que Zoe s’en rende compte.
Elle ne leva même pas la tête.
Il y avait des moments où Shelley sentait qu’elle devait marcher sur la pointe des pieds autour de Zoe – de la considérer avec précaution. Avec des pincettes. Ce qui était assez ironique, sachant que Shelley passait tout son temps à être un parent à la maison. Plus d’une fois, elle eut l’impression de faire la même chose au travail, bien que Zoe fût la plus âgée entre elles.
« Nous y sommes, » dit Shelley doucement, ne voulant pas interrompre Zoe en plein