Ida et Carmelita. Hector Malot
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—Non, répondit le colonel; il n'y a que des sentiers pour les piétons.
—Ne me demande pas de t'accompagner, dit le prince; tu sais que les ascensions sont impossibles pour moi.
—Oh! quand je voudrai faire cette promenade, ce ne sera pas à vous que je m'adresserai, mon cher oncle, dit-elle en riant; ce sera au colonel.
III
Le colonel, le lendemain matin, était parti en excursion de manière à n'être pas exposé à refuser Carmelita, ce qui était presque impossible, ou à l'accompagner, ce qui n'était pas pour lui plaire dans les conditions morales où il se trouvait présentement.
Il resta absent pendant deux jours, et ne revint qu'assez tard dans la soirée, bien décidé à repartir le lendemain matin. Il n'y avait pas deux minutes qu'il était dans sa chambre, lorsqu'il entendit frapper deux ou trois petits coups à la porte cloison; en même temps une voix,—celle de Carmelita—l'appela:
—Vous rentrez?
—A l'instant.
—Vous avez fait bon voyage?
—Très bon, je vous remercie.
—Est-ce que vous êtes mort de fatigue?
—Pas du tout.
—Ah! tant mieux. Est-ce que la porte est condamnée de votre côté!
—Elle est fermée à clef.
—Et vous avez la clef?
—Elle est sur la serrure.
—De sorte que, si vous voulez, voue pouvez ouvrir cette porte?
—Mais pas du tout; il y a un verrou de votre côté?
—Je sais bien. Je dis seulement que, si vous voulez tourner la clef en même temps que je pousse le verrou, la porte s'ouvre.
—Parfaitement.
—Eh bien! alors, si vous n'êtes pas mort de fatigue, vous plaît-il de tourner la clef? moi, je pousse le verrou.
Carmelita apparut, le visage souriant, la main tendue:
—Bonsoir, voisin, dit-elle.
—Bonsoir, voisine.
Et ils restèrent en face l'un de l'autre durant quelques secondes.
—Ma mère est endormie, et son premier sommeil est ordinairement difficile à troubler; cependant, en parlant ainsi à travers les cloisons, nous aurions pu la réveiller. Voilà pourquoi je vous ai demandé d'ouvrir cette porte.
Elle ne montrait nul embarras et paraissait aussi à son aise dans cette chambre qu'en plein jour, au milieu d'un salon.
—Depuis plus d'une heure je guettais votre retour, dit-elle, et je croyais déjà qu'il en serait aujourd'hui comme il en avait été hier.
—Hier j'ai été surpris par la nuit à une assez grande distance, et je n'ai pas pu rentrer.
—Et où avez-vous couché?
—Sur un tas de foin dans un chalet de la montagne.
—Mais c'est très amusant, cela.
—Cela vaut mieux que de coucher à la belle étoile, car les nuits sont fraîches dans la montagne; mais il y a quelque chose qui vaut encore beaucoup mieux qu'un tas de foin, c'est un bon lit.
—Vous aimez ces courses dans la montagne.
—J'aime la vie active, la fatigue; ces courses me délassent de la vie sédentaire que j'ai menée en ces derniers temps.
—Ah! vous êtes heureux.
Comme il ne répondait pas, elle continua:
—J'entends que vous êtes heureux de faire ce que vous voulez, d'aller où vous voulez, sans avoir à consulter personne. Savez-vous que depuis que je ne suis plus une toute petite fille, je n'ai pu faire un pas sans la permission de mon oncle, et il faut dire que presque toutes les fois que je lui ai demandé d'aller à gauche il m'a permis d'aller à droite.
Elle s'avança dans la chambre, et, prenant une chaise, elle s'assit.
—Je vous donne l'exemple, dit-elle, car je ne veux pas tenir sur ses jambes un homme qui a marché toute la journée.
Il s'assit alors près d'elle, assez intrigué par la tournure que prenait cet entretien bizarre.
—Quel but pensez-vous que j'aie eu en vous priant d'ouvrir cette porte? demanda-t-elle.
—Dame!... je n'en sais rien... à moins que ce ne soit pour causer un instant.
—Vous n'y êtes pas du tout: j'ai une prière à vous adresser.
—A moi?
—Et qui me rendra très heureuse si vous ne la repoussez point.
—Alors il est entendu d'avance que ce que vous souhaitez sera fait.
—Non, rien à l'avance: écoutez-moi d'abord, et puis, selon que ce que je vous demanderai vous plaira ou ne vous plaira point, vous me répondrez. Vous souvenez vous d'un mot que j'ai dit l'autre jour, à notre retour de notre promenade en voiture?
—A propos de quoi ce mot?
—A propos d'une excursion dans la montagne.
—Parfaitement.
—Eh bien! ce mot m'a valu une vive remontrance de mon oncle, et, quand je dis remontrance, c'est pour ne pas employer une expression plus forte. Cependant cela ne m'a pas fait renoncer à mon idée, et plus mon oncle m'a dit que j'avais commis une sottise et une inconvenance en manifestant le désir de vous accompagner dans une de vos excursions, plus ce désir a été ardent. Cet aveu va peut-être vous donner une assez mauvaise idée de mon caractère, mais au moins il vous prouvera que je suis franche. Et puis ce désir n'est-il pas bien justifiable, après tout? Je suis enfermée dans cet hôtel; ma mère est empêchée de sortir par sa maladie, mon oncle est retenu par son horreur de la fatigue et de la marche. Moi, qui ne suis pas malade et qui n'ai pas horreur de la marche, j'ai envie de voir ce qu'il y a derrière ces rochers qui se dressent du matin au soir devant mes yeux comme des points d'interrogation. N'est-ce pas tout naturel? Et voilà pourquoi je veux vous demander de vous accompagner quelquefois. Voilà ma prière. Enfin voilà comment j'ai été amenée à pousser ce verrou.
—Je