Le Suicide: Etude de Sociologie. Durkheim Émile

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Le Suicide: Etude de Sociologie - Durkheim Émile

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campagnes. Il semble donc croître et décroître comme elle; ce qui pourrait faire croire qu'il en dépend. Mais ce parallélisme n'exprime pas nécessairement un rapport de cause à effet; il peut très bien être le produit d'une simple rencontre. L'hypothèse est d'autant plus permise que les causes sociales dont dépend le suicide sont elles-mêmes, comme nous le verrons, étroitement liées à la civilisation urbaine et que c'est dans les grands centres qu'elles sont le plus intenses. Pour mesurer l'action que les états psychopathiques peuvent avoir sur le suicide, il faut donc éliminer les cas où ils varient comme les conditions sociales du même phénomène; car quand ces deux facteurs agissent dans le même sens, il est impossible de dissocier, dans le résultat total, la part qui revient à chacun. Il faut les considérer exclusivement là où ils sont en raison inverse l'un de l'autre; c'est seulement quand il s'établit entre eux une sorte de conflit, qu'on peut arriver à savoir lequel est déterminant. Si les désordres mentaux jouent le rôle essentiel qu'on leur a parfois prêté, ils doivent révéler leur présence par des effets caractéristiques, alors même que les conditions sociales tendent à les neutraliser; et inversement, celles-ci doivent être empêchées de se manifester quand les conditions individuelles agissent en sens inverse. Or les faits suivants démontrent que c'est le contraire qui est la règle:

      1° Toutes les statistiques établissent que, dans les asiles d'aliénés, la population féminine est légèrement supérieure à la population masculine. Le rapport varie selon les pays, mais, comme le montre le tableau suivant, il est, en général, de 54 ou 55 femmes pour 46 ou 43 hommes:

      /* +——————————————————————————————————+ | |Années| SUR 100 | |Années| SUR 100 | | | | ALIÉNÉS | | | ALIÉNÉS | | | | combien d' | | | combien d' | | | | | | | | | | |Hommes|Femmes| | |Hommes|Femmes| +——————————————————————————————————+ | Silésie | 1858 | 49 | 51 | New-York | 1855 | 44 | 56 | +—————-+———+———+———+———————+———+———+———+ | Saxe | 1861 | 48 | 52 | Massachussets| 1854 | 46 | 54 | +—————-+———+———+———+———————+———+———+———+ | Wurtemberg| 1853 | 45 | 55 | Maryland | 1850 | 46 | 54 | +—————-+———+———+———+———————+———+———+———+ | Danemark | 1847 | 45 | 55 | France | 1890 | 47 | 53 | +—————-+———+———+———+———————+———+———+———+ | Norwège | 1855 | 45 | 56 | " | 1891 | 48 | 52 | +——————————————————————————————————+ */

      Koch a réuni les résultats du recensement effectué dans onze États différents sur l'ensemble de la population aliénée. Sur 166.675 fous des deux sexes, il a trouvé 78.584 hommes et 88.091 femmes, soit 1,18 aliénés pour 1.000 habitants du sexe masculin et 1,30 pour 1.000 habitants de l'autre sexe[29]. Mayr de son côté a trouvé des chiffres analogues.

      Tableau IV[30]

       Part de chaque sexe dans le chiffre total des suicides.

      /* +———————————————-+————————-+—————————+ | | NOMBRES ABSOLUS | SUR 100 SUICIDES | +———————————————-+————————-+—————————+ | | des suicides. | combien d' | | | | | | | Hommes.| Femmes.| Hommes.| Femmes. | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Autriche (1873-77). | 11.429 | 2.478 | 82,1 | 17,9 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Prusse (1831-40). | 11.435 | 2.534 | 81,9 | 18,1 | +———————————————-+————+————+————+————-+ | " (1871-76). | 16.425 | 3.724 | 81,5 | 18,5 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Italie (1872-77). | 4.770 | 1.195 | 80 | 20 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Saxe (1851-60). | 4.004 | 1.055 | 79,1 | 20,9 | +———————————————-+————+————+————+————-+ | " (1871-76). | 3.625 | 870 | 80,7 | 19,3 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |France (1836-40). | 9.561 | 3.307 | 74,3 | 25,7 | +———————————————-+————+————+————+————-+ | " (1851-55). | 13.596 | 4.601 | 74,8 | 25,2 | +———————————————-+————+————+————+————-+ | " (1871-76). | 25.341 | 6.839 | 78,7 | 21,3 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Danemark (1845-56). | 3.324 | 1.106 | 75,0 | 25,0 | +———————————————-+————+————+————+————-+ | " (1870-76). | 2.485 | 748 | 76,9 | 23,1 | +———————————————-+————+————+————+————-+ |Angleterre (1863-67). | 4.905 | 1.791 | 73,3 | 26,7 | +——————————————————————————————————+ */

      On s'est, demandé, il est vrai, si cet excédent de femmes ne venait pas simplement de ce que la mortalité des fous est supérieure à celle des folles. En fait, il est certain que, en France, sur 100 aliénés qui meurent dans les asiles, il y a environ 55 hommes. Le nombre plus considérable de sujets féminins recensés à un moment donné ne prouverait donc pas que la femme a une plus forte tendance à la folie, mais seulement que, dans cette condition comme d'ailleurs dans toutes les autres, elle survit mieux que l'homme. Mais il n'en reste pas moins acquis que la population existante d'aliénés compte plus de femmes que d'hommes; si donc, comme il semble légitime, on conclut des fous aux nerveux, on doit admettre qu'il existe à chaque moment plus de neurasthéniques dans le sexe féminin que dans l'autre. Par conséquent, s'il y avait entre le taux des suicides et la neurasthénie un rapport de cause à effet, les femmes devraient se tuer plus que les hommes. Tout au moins devraient-elles se tuer autant. Car même en tenant compte de leur moindre mortalité et en corrigeant en conséquence les indications des recensements, tout ce qu'on en pourrait conclure, c'est qu'elles ont pour la folie une prédisposition sensiblement égale à celle de l'homme; leur plus faible dîme mortuaire et la supériorité numérique qu'elles accusent dans tous les dénombrements d'aliénés se compensent, en effet, à peu près exactement. Or, bien loin que leur aptitude à la mort volontaire soit ou supérieure on équivalente à celle de l'homme, il se trouve que le suicide est une manifestation essentiellement masculine. Pour une femme qui se tue, il y a, en moyenne, 4 hommes qui se donnent la mort (V. Tableau IV, ci-dessus). Chaque sexe a donc pour le suicide un penchant défini, qui est même constant pour chaque milieu social. Mais l'intensité de cette tendance ne varie aucunement comme le facteur psychopathique, qu'on évalue ce dernier d'après le nombre des cas nouveaux enregistrés chaque année ou d'après celui des sujets recensés au même moment.

      2° Le tableau V permet de comparer l'intensité de la tendance à la folie dans les différents cultes.

      Tableau

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