Les AA en prison : d’un détenu à l’autre. Anonyme

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Les AA en prison : d’un détenu à l’autre - Anonyme

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rel="nofollow" href="#ueeb448ad-d385-5879-a7c1-bcc8033746a2">Les Douze Traditions

      TUER LE DRAGON

      J’ai été « l’invitée » du Service correctionnel de l’État de New York à trois reprises en trois ans. Chaque fois qu’ils m’ont remise en liberté, je n’étais « pas prête à faire face au monde ». Loin de là. La prison n’a rien appris à cette membre des AA. La seule chose que j’ai apprise a été de me sentir honteuse et sale. C’était normal pour une victime d’inceste.

      Je suis arrivée au Mouvement en 1988, j’avais 36 ans. Je n’avais pas encore de dossier criminel. J’ai compris que j’étais alcoolique après mon premier verre. Après ma première réunion des AA, je ne pouvais plus le nier. J’ai éprouvé de la reconnaissance. J’ai cru que j’avais enfin trouvé ma place. Le conférencier à cette réunion a raconté mon histoire. Ce fut ma première expérience spirituelle dans le programme.

      Avec l’aide du conférencier, je me suis rendue au centre de traitement le lendemain. Je ne savais pas que le traitement m’obligerait à abandonner mes jumeaux, âgés de cinq ans. J’ai été absente pendant quatre mois. Si j’avais su cela, je ne serais pas allée en traitement. Mais, en y pensant bien, c’était mieux pour moi de ne pas le savoir.

      Avec l’aide des AA et grâce à Dieu, je suis restée abstinente pendant six ans. Mes problèmes d’inceste ont été mis en veilleuse. Pendant les cinq premières années, je mangeais, je dormais, je respirais AA. C’était la colle qui me tenait en vie.

      La sixième année, j’ai décidé de faire mon cours d’infirmière. Cela prenait beaucoup de mon temps. L’école a pris le pas sur mon abstinence. Puis, je me suis perdue. Les AA sont devenus partie de mon passé.

      Pendant mon cours, j’ai commencé à ressentir des douleurs atroces dans mon bassin. Un médecin m’a prescrit des analgésiques. (Évidemment, je n’ai jamais révélé mon véritable passé médical.) Je suis devenue amoureuse de ce médicament. Il n’y a pas d’autre façon de le dire. Il me rendait intelligente. Il me donnait de l’énergie et je devenais « Super maman ». J’ai terminé mes études en tête de ma classe : enfin, infirmière!

      Je ne pensais qu’à ce médicament : comment l’obtenir, comment m’en procurer plus, et comment m’assurer de ne pas en manquer? Au cours de ma première année comme infirmière, j’ai été arrêtée pour avoir fait de fausses ordonnances.

      Chez les AA, nous disons que la folie, c’est « refaire toujours les mêmes choses en espérant des résultats différents. » Ma première arrestation m’a valu une mise en liberté surveillée. Ma seconde m’a conduit à une prison de style camp d’entraînement militaire du service correctionnel de l’état de New York. Il en fut de même à ma troisième arrestation. J’ai été arrêtée une quatrième fois pour conduite criminelle en état d’ivresse et violation de liberté conditionnelle. J’ai été condamnée à une année à la prison Albion. Tout cela s’est produit en moins de trois ans. Ça, madame, ça s’appelle de la « volonté déchaînée »!

      Pendant mes années de prison, j’ai perdu ma famille. Mes parents sont décédés, et mes frères et soeurs ont décidé qu’ils en avaient assez. Mes fils vivaient seuls. En liberté sous condition, je n’avais pas le droit de vivre avec eux. Cela me donnait une autre raison de boire.

      Un alcoolique ne connaît pas la peur – certainement pas cette alcoolique-ci. Pas question de me « casser par la peur ». À ma libération en 1999, je me suis soûlée. Je suis allée à mon rendez-vous avec mon officier de libération. On m’a testée et j’ai enregistré 0,01, une violation de mes conditions. J’aurais pu retourner en prison. Au lieu de cela, grâce à Dieu et avec l’aide des AA, je me suis retrouvée dans un centre de traitement dès le lendemain.

      Cette fois, je me suis concentrée sur moi. J’ai rouvert le dossier de l’inceste et avec l’aide d’une femme superbe, je l’ai vidé pour de bon.

      Ce fut un voyage dans le noir et la terreur. J’ai eu des crampes à l’estomac. J’ai vomi. J’ai tremblé à me faire mal aux dents, mais j’ai persévéré. Cette femme n’a jamais abandonné. Elle ne m’a laissé aucune chance. J’ai pleuré, je l’ai suppliée. J’ai quémandé un verre « pour passer au travers les moments difficiles ». Toujours, elle a refusé. Je lui ai dit que j’en mourrais, mais nous avons continué. Je l’ai haïe, mais ma colère ne l’a pas découragée. Les autres femmes dans le programme ne savaient pas comment me traiter. Mais leurs peurs ne m’ont pas arrêtée.

      On m’a donné un livre : « Strong in the Broken Places ». Nuit après nuit, je l’ai lu et relu. Après des semaines de ce régime, ma conseillère m’a prise dans ses bras. Elle m’a murmuré : « Carol, ce n’est pas de ta faute. Mais c’est ta responsabilité. » Par la suite, je n’ai jamais plus voulu abandonner. Je m’étais libérée de mes démons. Je savais que c’était terminé.

      On a mis un miroir devant ma face. On y voyait plusieurs images. Mais, en fin de compte, toutes étaient bonnes : j’ai aperçu une femme avec beaucoup de force et d’expérience. C’était une force qui m’a libérée d’une enfance damnée. J’avais survécu à l’inceste. J’avais survécu au service correctionnel de l’état de New York. J’étais une femme prête à faire face à sa vie, à l’assumer. J’étais maintenant une femme qui pouvait remercier Dieu pour tout le bien et tout le mal qu’elle avait vécu. Tout cela avait contribué à mon réveil.

      Il y a bientôt quatre ans que j’ai quitté la prison. Sans exception, les promesses des AA se sont réalisées. J’ai récemment terminé ma période de probation, mais cela n’a pas beaucoup d’importance. Je sais qu’elle était attribuable à ma consommation.

      Mes deux jumeaux de fils sont en troisième année de collège. Nous nous voyons souvent et nous nous parlons presque chaque jour. Dieu veille toujours sur eux. J’ai une bonne relation avec une de mes soeurs et une relation boiteuse avec l’autre. Mon frère a choisi de rester loin de ma vie.

      Mon partenaire de vie s’avère être un membre du Mouvement. Ce fut une belle surprise. Je ne l’aurais jamais rencontré si je n’étais pas devenue abstinente. Nous ne prenons pas la responsabilité de l’abstinence de l’autre. Nous sommes responsables de notre propre abstinence et demandons l’aide d’autres personnes dans les moments difficiles.

      Je téléphone à ma marraine et je la vois souvent. Je suis toujours amie avec les femmes que j’ai rencontrées à mon arrivée dans le programme. J’ai aussi de nouveaux amis. Les AA m’ont sauvée. Il m’arrive de me pincer, car mes rêves les plus fous se réalisent chaque jour. Je sais que je demeure abstinente par la grâce de Dieu et des gens dans le programme.

      Je suis en contact avec une femme qui doit sortir de prison en mars. Je peux lui offrir mon expérience, ma force et mon espoir.

      Il y a encore des moments difficiles. Il y a des difficultés et même des tragédies. Prendre la vie comme elle est est parfois désagréable. Les gens dans les salles de réunion me soutiennent, m’apprennent des choses et m’aiment. Je suis toujours têtue. Je résiste toujours à l’autorité. Et je laisse toujours la peur s’installer. Mais, c’est correct. J’ai de l’aide dans mon coeur et partout autour de moi. Je n’ai qu’à tendre la main et celle des AA est là.

      Je vais aux réunions et je partage quand on me le demande. Dans mon message, je parle toujours

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