Les esclaves de Paris. Emile Gaboriau

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Les esclaves de Paris - Emile Gaboriau страница 16

Автор:
Серия:
Издательство:
Les esclaves de Paris - Emile Gaboriau

Скачать книгу

raisonné! approuva le docteur.

      —En conséquence, Toto et moi, nous avons examiné tous les débits devant lesquels nous passions. Bien nous en a pris. Arrivés rue du Petit-Carreau, nous avons aperçu notre Caroline chez un marchand de tabac qui vend des liqueurs.

      —Et Toto a pris la piste!

      —C'est-à-dire, patron, qu'il a juré qu'il marcherait dans son ombre jusqu'à ce qu'on lui crie: assez! De plus, il nous fera parvenir un rapport tous les jours.

      M. Mascarot se frottait les mains.

      —Bonne revanche! prononça-t-il. Beaumar, je suis content de toi.

      Le compliment parut enchanter l'ancien sous-officier. Il s'essuya le front, mais ne se retira pas.

      —Ce n'est pas tout, patron, commença-t-il.

      —Quoi encore?

      —J'ai rencontré en bas La Candèle, qui revenait de la place du Petit-Pont, vous savez?...

      —Ah!... qu'a-t-il vu?

      —Il a vu la jeune personne s'envoler dans un coupé à deux chevaux. Naturellement, il l'a suivie. Elle est maintenant installée rue de Douai, dans un appartement qui est tout ce qu'on peut voir de plus splendide, a dit le concierge. Ah! patron, il paraît qu'elle est supérieurement jolie, cette jeune personne! La Candèle était comme un fou, en en parlant. Il prétend qu'elle a des yeux!... Oh! mais des yeux... à faire descendre un homme de l'impériale d'un omnibus.

      A cette description, le regard du docteur pétilla.

      —C'est donc vrai, demanda-t-il, ce que nous a conté ce vieux roquentin de Tantaine?

      Mais ce n'est pas l'austère placeur qui s'arrête jamais aux bagatelles.

      —C'est vrai, répondit-il en fronçant le sourcil, et cela prouve, Hortebize, la justesse de ton objection de tout à l'heure. Oui, c'est un danger qu'une fille si furieusement belle, que tout le monde la remarque. Poussé par elle, le jeune idiot qui l'a enlevée pourrait bien devenir très gênant.

      M. Beaumarchef osa toucher le bras de son patron, il était en veine; une idée lui venait encore.

      —S'il ne s'agit que de se débarrasser du petit crevé, dit-il, ce n'est pas bien difficile.

      —Comment?

      Au lieu de répondre, l'ancien sous-officier tomba en garde, fit deux appels du pied et se fendit en criant d'un ton de prévôt de régiment:

      —Une, deux!... Du liant, donc!... Une, deux, dégagez, filez droit!... Et voilà.

      —Une querelle de Prussien, murmura le placeur, un duel!... La fille ne nous en resterait pas moins sur les bras. D'ailleurs, les moyens violents me répugnent, ils sont compromettants.

      Il réfléchit un moment, puis, relevant lentement ses lunettes, il chercha des yeux les yeux du docteur. Quand il les eût rencontrés:

      —Que n'avons-nous, fit-il en donnant à chaque mot une valeur particulière, que n'avons-nous à nos ordre une bonne épidémie? Suppose, docteur, cette belle fille atteinte de la petite vérole!... La voilà défigurée.

      Ce fut autour du docteur de se recueillir.

      —En l'état de la science, répondit-il enfin, on peut donner un coup d'épaule à l'épidémie. Mais après? Rose défigurée n'en sera que plus acharnée après Paul. La ténacité d'une femme croit en raison de sa laideur.

      —Ceci est à examiner, dit M. Mascarot. En attendant, il doit y avoir quelque mesure à prendre, pour écarter tout danger immédiat. Voyons, Beaumar, je t'ai dit ces jours-ci de préparer le dossier de ce Gandelu, qu'elle est sa situation?

      —Il est criblé de dettes, patron, mais ses créanciers le ménagent à cause d'un héritage prochain; Clichy, d'ailleurs n'existe plus.

      L'honorable placeur haussa les épaules.

      —Tu n'es qu'un sot, Beaumar, interrompit-il. Un gaillard de la trempe de ce Gaudelu, endetté et amoureux d'une fille comme Rose, donnera tête baissée dans tous les traquenards. Il est impossible que parmi ses créanciers il n'y ait pas deux ou trois de nos gens prêts à agir selon mes volontés. Étudie cela, tu me rendras réponse ce soir. Et sur ce... laisse-nous.

      Une fois seuls, les deux amis restèrent assez longtemps enfoncés dans leurs réflexions. L'instant était décisif. Ils étaient maîtres encore de leurs résolutions, mais ils savaient qu'une première démarche les engagerait irrémissiblement. Or, ils étaient assez forts, l'un et l'autre, pour regarder bien en face et pour mesurer le péril.

      L'éternel sourire du docteur Hortebize, pâlissait, et c'est d'une main fiévreuse qu'il tracassait son médaillon.

      B. Mascarot le premier domina la torpeur qui l'envahissait.

      —Assez de réflexions, fit-il, fermons les yeux et marchons... Tu as entendu les promesses du marquis de Croisenois? Il se donne à notre œuvre, mais non sans conditions. Pour lui comme pour nous, il faut qu'il soit le mari de Mlle de Mussidan.

      —C'est un mariage qui n'est pas fait.

      —Mais qui se fera, puisque nous le voulons. Et la preuve, c'est qu'avant deux heures, les projets de mariage qui existent entre Mlle Sabine et le baron de Breulh-Faverlay seront rompus. Nous tenons le comte et la comtesse de Mussidan, n'est-ce pas?...

      Le docteur, tant bien que mal, étouffa un gros soupir.

      —Vrai! murmura-t-il, je comprends les scrupules de Catenac. Ah! si comme lui j'avais un million!...

      Pendant ces dernières phrases, B. Mascarot, allant et venant de son cabinet à sa chambre à coucher, remplaçait par sa tenue de ville son costume d'intérieur. Quand il eut terminé:

      —Es-tu prêt? demanda-t-il au docteur.

      —Il le faut bien!

      —Partons alors.

      Et, entrebâillant la porte de son cabinet, B. Mascarot cria:

      —Beaumar, une voiture!

       Table des matières

      S'il est à Paris un quartier privilégié, c'est assurément celui qui se trouve compris entre la rue du Faubourg-Saint-Honoré d'un côté, et la Seine de l'autre, qui commence à la place de la Concorde et finit à l'avenue du bois de Boulogne.

      Dans ce coin béni de la grande ville, les millionnaires s'épanouissent naturellement, comme les rhododendrons à certaines altitudes.

      Aussi, que de somptueuses demeures, avec leurs vastes jardins, leurs massifs fleuris, leurs pelouses toujours vertes, leurs grands arbres peuplés de merles familiers, de rossignols et de fauvettes!

      Mais,

Скачать книгу