Champavert. Borel Pétrus
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Ses derniers compagnons, dont les noms sont cités dans les Rhapsodies, qui l’ont connu dans la plus grande intimité, auraient pu donner sur lui des renseignemens exacts et positifs; mais, comme il n’approuva pas cette publication, ils nous ont fermé leurs portes.
Ce fut vers la fin de 1831 que parurent les essais poétiques de Champavert, sous le titre de Rhapsodies, par Pétrus Borel. Jamais petit livre n’avait fait plus grand scandale, du reste, scandale que fera toujours toute œuvre écrite avec l’âme et le cœur, sans politesse pour un temps où l’on fait de l’art et de la passion avec la tête et la main, et en se battant les flancs à tant la page. Pour juger ces poésies, nous sommes trop favorablement disposés, on ne nous croirait pas impartiaux; or, nous dirons seulement qu’elles nous semblent abruptes, souffertes, senties, pleines de feu, et, qu’on nous passe l’expression, quelquefois fleurette, mais bien plus souvent barre de fer; c’est un livret empreigné de fiel et de douleur, c’est le prélude du drame qui le suivit, et que les plus simples avaient pressenti; une œuvre comme celle-là n’a pas de second tome: son épilogue, c’est la mort.
Nous allons, pour nos lecteurs qui ne les connaîtraient point, en donner quelques extraits, à l’appui de ce que nous venons d’avancer.
Voici la pièce qui ouvre le recueil; nous la citons préférablement parce qu’elle est pleine de douleur et d’une franchise rare, et qu’elle contient quelques circonstances de sa vie dont nous n’avons pu parler: elle est adressée à un ami qui lui avait donné l’hospitalité, à ce qu’il paraîtrait, dans un temps où, comme Métastase, il n’avait pour abri que le ciel et le pavé.
Quand ton Pétrus ou ton Pierre
N’avait pas même une pierre
Pour se poser, l’œil tari;
Un clou sur un mur avare
Pour suspendre sa guitare:
Tu me donnas un abri.
Tu me dis: – Viens, mon Rhapsode,
Viens chez moi finir ton ode;
Car ton ciel n’est pas d’azur,
Ainsi que le ciel d’Homère
Ou du provençal trouvère;
L’air est froid, le sol est dur.
Paris n’a point de bocage;
Viens donc, je t’ouvre ma cage,
Où, pauvre, gaîment je vis;
Viens, l’amitié nous rassemble,
Nous partagerons ensemble
Quelques grains de chenevis.
– Tout bas, mon âme honteuse
Bénissait ta voix flatteuse
Qui caressait son malheur;
Car toi seul, au sort austère
Qui m’accablait solitaire,
Léon, tu donnas un pleur.
Quoi! ma franchise te blesse?
Voudrais-tu que, par faiblesse,
On voilât sa pauvreté?
Non! non! nouveau Malfilâtre,
Je veux, au siècle parâtre,
Etaler ma nudité!
Je le veux, afin qu’on sache,
Que je ne suis point un lâche,
Car j’eus deux parts de douleur
A ce banquet de la terre,
Car, bien jeune, la misère
N’a pu briser ma verdeur.
Je le veux, afin qu’on sache
Que je n’ai que ma moustache,
Ma guitare, et puis mon cœur
Qui se rit de la détresse;
Et que mon âme maîtresse
Contre tout surgit vainqueur.
Je le veux, afin qu’on sache
Que, sans toge et sans rondache,
Ni chancelier, ni baron,
Je ne suis point gentilhomme,
Ni commis à maigre somme,
Parodiant lord Byron.
A la cour, dans ses orgies,
Je n’ai point fait d’élégies,
Point d’hymne à la déité;
Sur le flanc d’une duchesse,
Barbotant dans la richesse,
De lai sur ma pauvreté.
Voici encore quelques autres vers et quelques fragmens pris pour ainsi dire au hasard, tous pleins pareillement de chagrin et de fiel, et de la pensée qui le minait sourdement et qui, peu de temps plus tard, devait le perdre.
Son joyeux, importun, d’un clavecin sonore,
Parle, que me veux-tu?
Viens-tu dans mon grenier pour insulter encore
A ce cœur abattu?
Son joyeux, ne viens plus; verse à d’autres l’ivresse;
Leur vie est un festin
Que je n’ai point troublé; tu troubles ma détresse,
Mon râle clandestin!
Indiscret, d’où viens-tu? Sans doute une main blanche,
Un beau doigt prisonnier
Dans de riches joyaux, a frappé sur ton anche
D’ivoire et d’ébénier;
Accompagnerais-tu d’une enfant angélique,
La timide leçon?
Si le rythme est bien sombre et l’air mélancolique,
Trahis-moi sa chanson.
Non: j’entends les pas sourds d’une foule ameutée,
Dans un salon étroit;
Elle vogue en tournant,