Champavert. Borel Pétrus

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Champavert - Borel Pétrus

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esclaves, flambeaux;

      Le riche épand sa joie et les pauvres gémissent,

      Honteux sous leurs lambeaux!

      Autour de moi ce n’est que palais, joie immonde,

      Biens, somptueuses nuits,

      Avenir, gloire, honneurs: au milieu de ce monde,

      Pauvre et souffrant je suis

      Comme entouré des grands, du roi, du saint office,

      Sur le quémadero,

      Tous en pompe assemblés pour humer un supplice,

      Un juif au brazero!

      Car tout m’accable enfin: néant, misère, envie,

      Vont morcelant mes jours!

      Mes amours brochaient d’or le crêpe de ma vie,

      Désormais plus d’amours.

      Pauvre fille! c’est moi qui t’avais entraînée

      Au sentier de douleur;

      Mais, d’un poison plus fort, avant qu’il t’eût fanée,

      Tu tuas le malheur!

      Eh! moi, plus qu’une enfant, capon, flasque, gavache,

      De ce fer acéré

      Je ne déchire pas avec ce bras trop lâche

      Mon poitrail ulcéré!

      Je rumine mes maux: son ombre est poursuivie

      D’un regret coutumier.

      Qui donc me rend si veule et m’enchaîne à la vie?..

      Pauvre Job au fumier.

HYMNE AU SOLEIL

      Là, dans ce sentier creux, promenoir solitaire

      De mon clandestin mal,

      Je viens tout souffreteux, et je me couche à terre

      Comme un brute animal.

      Je viens couver ma faim, la tête sur la pierre

      Appeler le sommeil,

      Pour étancher un peu ma brûlante paupière;

      Je viens user mon écot de soleil!

      Là-bas, dans la cité, l’avarice sordide

      Du roi, sur tout Champart,

      Au mouton-peuple, on vend le soleil et le vide;

      J’ai payé; j’ai ma part!

      Mais sur tous, tous égaux devant toi, soleil juste,

      Tu verses tes rayons,

      Qui ne sont pas plus doux au front d’un prince auguste,

      Qu’au sale front d’une gueuse en haillons.

FRAGMENT DE LA PIÈCE INTITULÉEHEUR ET MALHEUR

      C’est un oiseau, le barde! il doit rester sauvage;

      La nuit sous la ramure, il gazouille son chant;

      Le canard tout boueux se pavane au rivage,

      Saluant tout soleil, ou levant ou couchant.

      C’est un oiseau, le barde! il doit vieillir austère,

      Sobre, pauvre, ignoré, farouche, soucieux,

      Ne chanter pour aucun, et n’avoir rien sur terre,

      Qu’une cape trouée, un poignard et les cieux!

      Mais le barde aujourd’hui, c’est une voix de femme,

      Un habit bien collant, un minois relavé,

      Un perroquet juché, chantonnant pour madame,

      Dans une cage d’or, un canari privé;

      C’est un gras merveilleux, versant de chaudes larmes

      Sur des maux obligés après un long repas,

      Portant un parapluie, et jurant par ses armes,

      Et, l’élixir en main, invoquant le trépas.

      Joyaux, bal, fleur, cheval, château, fine maîtresse,

      Sont les matériaux de ses poëmes lourds:

      Rien pour la pauvreté, rien pour l’humble en détresse;

      Toujours les souffletant de ses vers de velours.

      Par merci! voilez-nous vos airs autocratiques;

      Heureux si vous cueillez les biens à pleins sillons!

      Mais ne galonnez pas comme vos domestiques,

      Vos vers qui font rougir nos fronts ceints de haillons.

      Eh! vous, de ces soleils, moutonnier parélie!

      De cacher vos lambeaux ne prenez tant de soin,

      Ce n’est qu’à leur abri que l’esprit se délie;

      Le barde ne grandit qu’enivré de besoin!

      J’ai caressé la mort, riant au suicide,

      Souvent et volontiers, quand j’étais plus heureux;

      Maintenant je la hais, et d’elle suis peureux,

      Misérable et miné par la faim homicide.

MISÈRE

      A mon air enjoué, mon rire sur la lèvre,

      Vous me croyez heureux, doux, azyme et sans fièvre,

      Vivant, au jour le jour, sans nulle ambition,

      Ignorant le remords, vierge d’affliction;

      A travers les parois d’une haute poitrine,

      Voit-on le cœur qui sèche et le feu qui le mine?

      Dans une lampe sourde on ne saurait puiser,

      Il faut, comme le cœur, l’ouvrir ou la briser.

      Aux bourreaux, pauvre André! quand tu portais ta tête,

      De rage tu frappais ton front sur la charrette;

      N’ayant pas assez fait pour l’immortalité,

      Pour ton pays, sa gloire et pour sa liberté.

      Que de fois, sur le roc qui borde cette vie,

      Ai-je frappé du pied, heurté du front d’envie,

      Criant contre le ciel mes longs tourments soufferts;

      Je sentais ma puissance, et je sentais des fers!

      Puissance… fers… quoi donc? – Rien! encore un poète

      Qui ferait du divin, mais sa muse est muette,

      Sa puissance est aux fers: – Allons! on ne croit plus

      En ce siècle voyant qu’aux talens révolus;

      Travaille, on ne croit plus aux futures merveilles. —

      Travaille!.. Eh! le besoin qui me hurle aux oreilles,

      Etouffant tout penser qui se dresse en mon sein!

      Aux accords de mon luth que répondre?.. J’ai faim!

      Ah! tout cela fait saigner le cœur!.. Passons.

      Son allure indépendante, son amour violent de la liberté, l’avaient fait désigner comme républicain redoutable. Il crut devoir répondre à cette accusation dans la préface de ses Rhapsodies: – Je suis républicain, dit-il, comme l’entendrait un loup cervier: mon républicanisme, c’est de la lycanthropie! – Si je parle de république, c’est parce que ce mot me représente la plus large indépendance que puissent laisser l’association et la civilisation. Je suis républicain parce que je ne puis pas être Caraïbe; j’ai besoin d’une somme énorme de liberté: la république me la donnera-t-elle? Je n’ai

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