Les Merveilles de la Locomotion. Ernest Deharme

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Les Merveilles de la Locomotion - Ernest Deharme

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série d'hypothèses, d'ailleurs très-naturelles, se trouve parfaitement justifiée par la forme des roues des premiers chars dans l'antiquité, forme rudimentaire que l'on retrouve encore aujourd'hui, dans toute sa simplicité, aux roues des chariots catalans entre autres. Ces roues sont de simples disques ferrés, ayant 4 ou 5 centimètres de largeur, assujettis d'une façon grossière au véhicule qu'ils supportent et produisant dans les chemins montueux des Pyrénées un bruit strident et criard que prolonge encore la lente allure des bœufs qui y sont attelés.

      Le traîneau, cet état primitif du plus somptueux de nos carrosses ou de nos wagons d'aujourd'hui, est d'ailleurs utilisé avec avantage dans plusieurs pays, et notamment dans les contrées septentrionales et dans les pays de montagnes.

      Dans les contrées septentrionales, deux raisons principales en ont maintenu et en maintiendront l'usage: la dureté de la terre glacée et l'absence ou la rareté des voies de communication. Quel que soit l'objet qu'on ait à faire mouvoir sur le sol, on favorisera son mouvement en réduisant le frottement qui se produit lorsqu'on cherche à le déplacer, frottement qui dépend tout d'abord de la nature des surfaces en contact. Le sol glacé des pays du Nord se prête merveilleusement à ce déplacement. Les surfaces du patin et du sol acquièrent par l'usage un poli essentiellement favorable au mouvement. Qu'arriverait-il si des roues étaient substituées aux longs patins de glissement? Elles pénétreraient dans la neige au lieu de rester à la surface et deviendraient un obstacle à la marche. Le véhicule procéderait par ressauts et par saccades, se fatigant lui-même, fatigant ceux qui y seraient placés et la bête qui le tirerait. Le traîneau, en abaissant le centre de gravité du véhicule presque au niveau du sol, et en lui fournissant une large base de sustentation, empêche ces accidents de se produire. Le traîneau passe partout, la roue sur les bons chemins seulement.

      Tout le monde connaît le sabot qu'employaient nos anciennes diligences. À la montée d'une côte, tous les voyageurs descendaient et suivaient au pas le véhicule pesamment chargé. À la cime, on remontait en voiture, le sabot était assujetti sous l'une des roues de derrière pour descendre le versant et les chevaux partaient. La voiture devenait momentanément un traîneau: trois des roues conservaient leur liberté et le frottement de roulement de la quatrième était transformé en frottement de glissement. C'est en traîneau qu'on faisait une partie de la traversée du Mont-Cenis, avant que le chemin de fer de Fell, qui a précédé l'ouverture du souterrain, fût établi.

      Les forêts, dans les pays de montagnes, sont exploitées de la sorte. De jeunes arbres, ou même des branches à peine dégrossies, réunis par quelques liens tordus, servent à improviser un traîneau, qui est démembré à l'arrivée ou que le charbonnier remonte sur ses épaules. Le lit d'un ravin est le chemin suivi; les pierres roulent sous le véhicule et descendent avec lui. C'est en traîneau qu'on fait parcourir aux touristes certains passages rapides des Alpes ou des Pyrénées. Une de ces descentes renommées est celle de Brame-Farine, près d'Allevard, dans le département de l'Isère.

      Avant de décrire la première de ces voitures à roues dont l'invention a été un progrès considérable demeuré sans date dans l'histoire de la locomotion, arrêtons-nous pour esquisser rapidement les faits si intéressants qui expliquent l'avantage de la voiture sur le traîneau, puis du wagon de nos chemins de fer sur la voiture elle-même.

      B. – Frottement entre le véhicule et la voie qui le porte. – Le dé et la bille d'ivoire. – Frottement de glissement et de roulement. – Ce qu'on sait des lois du frottement. – Difficultés inhérentes aux observations. – Impressionnabilité de la matière. – Moyens de diminuer le frottement. – Lubrifaction des parties frottantes. – Accroissement du diamètre des roues

      Tous les progrès de la locomotion reposent sur les améliorations apportées aux deux surfaces en contact durant le mouvement: patin et roue d'une part, chaussée ou rail d'une autre. Les améliorations introduites dans la construction du véhicule lui-même n'ont été que la conséquence des premières. L'emploi de la vapeur comme moteur a marqué une nouvelle étape que nous décrirons avec tous les développements qu'elle comporte.

      Lorsqu'on examine à la loupe les objets les mieux polis, on aperçoit à leur surface une innombrable quantité d'aspérités et de cavités, qui forment, entre deux objets rapprochés, comme autant de petites dents d'engrenage s'enchevêtrant les unes dans les autres. Chacun des deux objets agit sur celui qui lui est opposé comme un morceau de pierre ponce sur notre main. Il y a entre eux:

      1o Production d'une résistance au mouvement qu'on veut déterminer et qui est le frottement;

      2o Destruction des aspérités existantes, polissage des surfaces, d'où usure.

      C'est l'effet qui se produit lorsqu'on pousse un dé d'ivoire sur le drap d'un billard. L'impulsion cessant, le dé s'arrête; mais si au dé on substitue une bille, la moindre impulsion produit un mouvement qui se prolonge encore après que l'action a cessé d'être exercée. Le frottement n'est pas détruit, il est seulement réduit par le changement de forme de la surface. Dans le premier cas, il y avait frottement de glissement, dans le second, il y a frottement de roulement.

      Si, au lieu de placer cette bille d'ivoire sur une table recouverte de drap, nous la plaçons sur une table polie de bois ou de métal, une impulsion bien moindre que la première suffira à lui faire parcourir le même chemin.

      Ces faits, tout simples et tout familiers, que nous venons d'observer sur une petite échelle, se produisent en grand.

      Qu'un traîneau glisse sur le sol, qu'une voiture roule sur une chaussée, ou un wagon sur des rails, qu'un bateau se meuve sur l'eau ou un ballon dans l'air, il y a frottement. Une force se développe, au moment où le mouvement commence, de la part du sol, de l'eau ou de l'air avec lequel le véhicule est en contact. Elle est faible, presque insignifiante dans l'air, elle n'est pas négligeable dans l'eau, ou à sa surface, et prend des valeurs très-diverses et parfois considérables sur le sol. En somme, on peut dire, d'une manière générale, que toutes les fois que deux corps, en contact, viennent à être animés de vitesses variables, – ou l'un d'une certaine vitesse, l'autre restant à l'état de repos, – il se produit une force retardatrice du mouvement, et il y a frottement.

      Quelles sont les lois du frottement? Les géomètres et les ingénieurs ont cherché beaucoup et longtemps, et cherchent encore, car les opinions les plus opposées se sont produites. Nous n'avons pas l'intention de les relater toutes ici; mais il convient d'indiquer les faits principaux, ceux sur lesquels on est généralement tombé d'accord et qui sont, par suite, hors de conteste.

      Amontons est le premier qui s'occupa de la recherche des lois du frottement. Il se servait, pour ses expériences, d'un plan mobile autour d'une charnière et dont il faisait varier l'inclinaison. Mais les résultats auxquels il fut conduit paraissent contradictoires. Coulomb, en 1781, reprit ces recherches.

      Sur deux madriers horizontaux juxtaposés était fixé un troisième madrier en chêne, long de 8 pieds, large de 16 pouces. Un traîneau, en forme de caisse, de 18 pouces de large, qu'il chargeait de poids, pouvait glisser sur ce dernier madrier et le parcourir dans sa longueur. Une corde flexible, attachée au traîneau, venait, dans une direction horizontale, s'enrouler sur la gorge d'une poulie très-mobile. Un plateau attaché à son extrémité recevait des poids et pouvait descendre dans un puits de 4 pieds de profondeur. Les poids, successivement placés dans le plateau, déterminaient le mouvement du traîneau. Un pendule, battant les demi-secondes, permettait d'étudier ainsi la loi du mouvement. La nature et l'étendue des surfaces frottantes, modifiées tour à tour, donnaient le moyen de varier à l'infini les conditions de ces expériences.

      Le général Morin, en 1831, M. J. Poirée, en 1851, M. Bochet, en 1856 d'abord, puis en 1861, ont repris et étendu les études commencées par

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