Les Merveilles de la Locomotion. Ernest Deharme

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Les Merveilles de la Locomotion - Ernest Deharme

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selon la nature et l'état des surfaces en contact, et qu'il était indépendant de la vitesse et de l'étendue de ces surfaces.

      M. Poirée a démontré que pour des vitesses supérieures à 4 ou 5 mètres par seconde, le frottement diminuait à mesure que la vitesse augmentait.

      Dans un mémoire fort intéressant, et à la suite de nombreuses expériences exécutées sur le chemin de fer de l'Ouest avec un wagon-traîneau du système Didier, M. Bochet a réfuté les premières lois admises et a conclu:

      1o Que le frottement diminue à mesure que la vitesse augmente;

      2o Que le frottement n'est plus proportionnel à la pression et, par suite, n'est plus indépendant de l'étendue des surfaces frottantes, dès que la pression cesse d'être petite;

      3o Qu'il n'y a pas, en général, de frottement spécial au départ.

      Ces nouvelles lois viennent renverser les opinions précédemment admises. Est-ce à dire, pour cela, qu'elles sont la dernière expression de la vérité et qu'elles ne souffriront pas de modification? Nous n'oserions pas l'affirmer.

      On ne peut se faire une idée exacte des difficultés qui entourent l'exécution de ces expériences: les circonstances, en apparence les plus insignifiantes, exercent souvent une influence considérable, qui échappe même aux yeux les plus perspicaces, à l'attention la plus vigilante. L'observation de ces phénomènes, où la constitution moléculaire des corps est immédiatement en jeu, présente bien autrement d'obstacles que celle des faits chimiques où les qualités et les affinités particulières de ces mêmes molécules se révèlent.

      Nombre d'opérations exécutées dans des circonstances en apparence complètement identiques, donnent des résultats différents et déroutent l'expérimentateur; nous disons: en apparence identiques, car nos yeux ou nos moyens de mesure ou de contrôle doivent nous égarer. Les deux morceaux de fer que nous faisons frotter l'un contre l'autre, bien qu'ils soient pris dans une masse que nous croyons homogène et qui a subi les mêmes opérations préparatoires, peuvent présenter, et présentent sans doute, des différences de contexture que nous ne pouvons saisir. Les fibres de tel morceau de bois ne sont pas dirigées comme celles de tel autre; les parties tendres sont plus nombreuses dans celui-ci que dans celui-là; l'état hygroscopique des deux échantillons est différent. En somme, l'homogénéité, l'identité, dans le sens le plus absolu et le plus général que l'on accorde à ces deux mots, n'existent pas. Les différences constatées n'offrent donc rien de surprenant.

      Il en est absolument, de ce qui se passe entre ces deux morceaux de matière, comme de ce qui se produit entre deux individus de mœurs, de caractères et d'esprits bien définis et entraînés dans une action commune. Doutez-vous que les circonstances les plus inappréciables ne puissent agir sur leurs tempéraments à tous deux ou sur celui de l'un des deux seulement, et modifier d'une manière très-sensible le résultat auquel ils concourent tous deux? Est-il déraisonnable de croire que des influences d'une autre nature, mais tout aussi bien modificatrices, aient pu agir sur la constitution moléculaire des deux échantillons mis en contact, et n'est-il pas permis de supposer à ces atomes matériels et inertes une impressionnabilité que nous constatons chez les êtres vivants et matériels aussi?

      Lorsque nous modifions, par l'interposition d'un nouveau corps ou par une altération quelconque des surfaces en contact, les conditions de ces expériences, nous obtenons les résultats les plus divers. Des aspérités, des stries, la juxtaposition sur l'une des surfaces de bandes de cuir ou de caoutchouc, en multipliant les points de connexion et d'enchevêtrement, créent un obstacle au mouvement, tandis que l'interposition d'un corps gras, de plombagine, de suif ou de telle ou telle huile, en unissant et en polissant les surfaces rapprochées, diminue le frottement. De là, l'avantage que l'on retire de l'emploi des matières lubrifiantes.

      Le cri strident des chars catalans, dont nous avons parlé, celui de toutes les voitures dont les roues sont insuffisamment graissées, résultent d'une attaque plus ou moins profonde des surfaces en contact. Ce grincement est accompagné d'un échauffement de ces surfaces, qui, s'il n'y est porté remède, peut avoir les conséquences les plus graves.

      Les faits que l'on constate dans l'étude du frottement de glissement s'observent dans celle du frottement de roulement, mais avec cette différence qu'ils sont moins accusés. Les aspérités de la surface roulante s'engrènent dans les cavités de la surface fixe et réciproquement, et le mouvement s'opère sans déterminer ces arrachements et ces érosions particulaires qui constituent, en grande partie, le frottement et qui exigent sans cesse, de la part du moteur, une production de force additionnelle. Les deux surfaces s'épousent successivement l'une l'autre, les petites aspérités abandonnent leur mutuelle étreinte avec d'autant plus de facilité qu'elles se sont plus facilement réunies, et que la pénétration a eu lieu dans une direction plus normale à la surface fixe, ou que le diamètre de la surface roulante a été choisi de plus grande dimension.

      L'accroissement du diamètre des roues des véhicules, est, en effet, le but vers lequel tendent les constructeurs, mais divers obstacles les arrêtent, entre autres l'instabilité de la machine de transport, accrue par l'élévation de son centre de gravité. Ils cherchent alors des artifices pour abaisser la charge, ils la placent parfois en dessous des essieux, ainsi que cela s'est fait pour certaines voitures et pour quelques fardiers, destinés au transport des matériaux de construction, réalisant ainsi des combinaisons plus ou moins ingénieuses, et qui répondent d'une manière plus ou moins satisfaisante à des besoins déterminés.

      C. – La Voie. – Chaussées empierrées, pavées, à ornières de bois et de métal. – Les anciennes voies de communication. – Les chaussées romaines, les chaussées de Brunehaut. – Les rues sous Philippe Auguste et les voies sous Colbert. – Les routes impériales, départementales; les chemins vicinaux et ruraux. – Importance de la circulation. – Le personnel des ponts et chaussées et celui des chemins de fer. – Ce que coûte un ingénieur des ponts et chaussées et des mines, d'après M. Flachat

      Des préoccupations de l'ingénieur, la principale est celle qui a pour objet la diminution des aspérités des deux surfaces en contact. Tel est le but que remplissent les cercles garnissant les roues des véhicules, les semelles métalliques fixées aux patins des traîneaux. Pour diminuer les aspérités de la surface de roulement, on emploie les pavés de granit ou de grès ou les cailloux fichés dans une forme incompressible en sable et que les lourdes charges et les temps alternativement secs et pluvieux ne peuvent facilement déformer. On choisit les cailloux de la meilleure qualité pour les chaussées empierrées ou macadamisées, et avant de les livrer à la circulation des voitures, on a soin d'en comprimer la surface à l'aide de ces rouleaux tantôt en pierre, tantôt en métal, chargés de sable, de pavés ou d'eau et que remorquent péniblement de longs attelages de chevaux, ou, plus aisément, une machine à vapeur superposée. À cette chaussée imparfaite, aux ornières, aux aspérités ou aux dépressions plus ou moins profondes, on substitue des poutres ou longrines en bois, des morceaux de fonte ou des lames de fer et d'acier, et on a le merveilleux moyen de transport qui s'appelle un chemin de fer.

      Adieu les durs cahots avec les vieilles pataches dans les mauvais chemins! adieu la musique des grelots au collier des chevaux, interrompue de temps en temps par les coups de fouet du postillon ou par la trompette du conducteur! adieu ces relations qui se nouaient au cours du voyage et se prolongeaient parfois après lui! On ne met plus que dix heures au lieu de onze jours, pour aller de Paris à Strasbourg. Quelques coups de sifflet et, comme en un songe, durant une nuit, on passe du Nord au Sud ou du Levant au Couchant.

      Voyez-vous ce tombereau qui ne contient qu'une tonne de cailloux? Un cheval a peine à le tirer sur cette route bien entretenue. Voyez à côté: un même cheval fait avancer sur ces rails un wagon chargé de 8 à 10 tonnes.

      Mais

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