La dame de Monsoreau — Tome 3. Dumas Alexandre
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— Je suis pris, pensa Bussy.
— Madame, dit-il, trop heureux de pouvoir plaire à Votre Majesté, je m'en y vais.
— Attends, murmura-t-il. Tu ne connais pas les portes ici comme au Louvre, je vais revenir.
Et il sortit, sans avoir pu adresser même un signe au duc. Catherine s'en défiait; elle ne le perdit pas de vue une seconde.
Catherine chercha tout d'abord à savoir si son fils était malade ou feignait seulement la maladie. Ce devait être toute la base de ses opérations diplomatiques.
Mais François, en digne fils d'une pareille mère, joua miraculeusement son rôle. Elle avait pleuré, il eut la fièvre.
Catherine, abusée, le crût malade; elle espéra donc avoir plus d'influence sur un esprit affaibli par les souffrances du corps. Elle combla le duc de tendresse, l'embrassa de nouveau, pleura encore, et à tel point, qu'il s'en étonna et en demanda la raison.
— Vous avez couru un si grand danger, répliqua-t-elle, mon enfant!
— En me sauvant du Louvre, ma mère?
— Oh! non pas, après vous être sauvé.
— Comment cela?
— Ceux qui vous aidaient dans cette malheureuse évasion...
— Eh bien?..
— Étaient vos plus cruels ennemis...
— Elle ne sait rien, pensa-t-il, mais elle voudrait savoir.
— Le roi de Navarre! dit-elle tout brutalement, l'éternel fléau de nôtre race... Je le reconnais bien.
— Ah! ah! s'écria François, elle le sait.
— Croiriez-vous qu'il s'en vante, dit-elle, et qu'il pense avoir tout gagné?
— C'est impossible, répliqua-t-il, on vous trompe, ma mère.
— Pourquoi?
— Parce qu'il n'est pour rien dans mon évasion, et qu'y fût-il pour quelque chose, je suis sauf comme vous voyez... Il y a deux ans que je n'ai vu le roi de Navarre.
— Ce n'est pas de ce danger seulement que je vous parle, mon fils, dit Catherine sentant que le coup n'avait pas porté.
— Quoi encore, ma mère? répliqua-t-il en regardant souvent dans son alcôve la tapisserie qui s'agitait derrière la reine.
Catherine s'approcha de François, et d'une voix qu'elle s'efforçait de rendre épouvantée:
— La colère du roi! fit-elle, cette furieuse colère qui vous menace!
— Il en est de ce danger comme de l'autre, madame; le roi mon frère est dans une furieuse colère, je le crois; mais je suis sauf.
— Vous croyez? fit-elle avec un accent capable d'intimider les plus audacieux.
La tapisserie trembla.
— J'en suis sûr, répondit le duc; et c'est tellement vrai, ma bonne mère, que vous êtes venue vous-même me l'annoncer.
— Comment cela? dit Catherine inquiète de ce calme.
— Parce que, continua-t-il après un nouveau regard à la cloison, si vous n'aviez été chargée que de m'apporter ces menaces, vous ne fussiez pas venue, et qu'en pareil cas le roi aurait hésité à me fournir un otage tel que Votre Majesté.
Catherine effrayée leva la tête.
— Un otage, moi! dit-elle.
— Le plus saint et le plus vénérable de tous, répliqua-t-il en souriant et en baisant la main de Catherine, non sans un autre coup d'oeil triomphant adressé à la boiserie.
Catherine laissa tomber ses bras, comme écrasée; elle ne pouvait deviner que Bussy, par une porte secrète, surveillait son maître et le tenait en échec sous son regard, depuis le commencement de l'entretien, lui envoyant du courage et de l'esprit à chaque hésitation.
— Mon fils, dit-elle enfin, ce sont toutes paroles de paix que je vous apporte, vous avez parfaitement raison.
— J'écoute, ma mère, dit François, vous savez avec quel respect; je crois que nous commençons à nous entendre.
CHAPITRE VIII
LES PETITES CAUSES ET LES GRANDS EFFETS
Catherine avait eu, dans cette première partie de l'entretien, un désavantage visible. Ce genre d'échecs était si peu prévu, et surtout si inaccoutumé, qu'elle se demandait si son fils était aussi décidé dans ses refus qu'il le paraissait, quand un tout petit événement changea tout à coup la face des choses.
On a vu des batailles aux trois quarts perdues être gagnées par un changement de vent, et vice versa; Marengo et Waterloo en sont un double exemple. Un grain de sable change l'allure des plus puissantes machines.
Bussy était, comme nous l'avons vu, dans un couloir secret, aboutissant à l'alcôve de M. le duc d'Anjou, placé de façon à n'être vu que du prince; de sa cachette, il passait la tête par une fente de la tapisserie aux moments qu'il croyait les plus dangereux pour sa cause.
Sa cause, comme on le comprend, était la guerre à tout prix: il fallait se maintenir en Anjou tant que Monsoreau y serait, surveiller ainsi le mari et visiter la femme.
Cette politique, extrêmement simple, compliquait cependant au plus haut degré toute la politique de France; aux grands effets les petites causes.
Voilà pourquoi, avec force clins d'yeux, avec des mines furibondes, avec des gestes de tranche-montagne, avec des jeux de sourcils effrayants enfin, Bussy poussait son maître à la férocité. Le duc, qui avait peur de Bussy, se laissait pousser, et on l'a vu effectivement on ne peut plus féroce.
Catherine était donc battue sur tous les points et ne songeait plus qu'à faire, une retraite honorable, lorsqu'un petit événement, presque aussi inattendu que l'entêtement de M. le duc d'Anjou, vint à sa rescousse.
Tout à coup, au plus vif de la conversation de la mère et du fils, au plus fort de la résistance de M. le duc d'Anjou, Bussy se sentit tirer par le bas de son manteau. Curieux de ne rien perdre de la conversation, il porta, sans se retourner, la main à l'endroit sollicité, et trouva un poignet; en remontant le long de ce poignet, il trouva un bras, et après le bras une épaule, et après l'épaule un homme.
Voyant alors que la chose en valait la peine, il se retourna.
L'homme était Remy.
Bussy voulait parler, mais Remy posa un doigt sur sa bouche, puis il attira doucement son maître dans la chambre voisine.
— Qu'y a-t-il donc, Remy? demanda le comte très-impatient, et pourquoi