Le Collier de la Reine, Tome II. Dumas Alexandre

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Le Collier de la Reine, Tome II - Dumas Alexandre

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comme pour le remercier de toutes ses délicatesses.

      Le soir, ces quatre valets qu'il avait si rudement éconduits lors de leur première tentative emportèrent Charny jusqu'à son carrosse, qui l'attendait au guichet des communs.

      Le roi, ayant chassé toute la journée, venait de souper et dormait. Charny, un peu préoccupé de partir sans prendre congé, fut pleinement rassuré par le docteur, qui promit d'excuser le départ en le motivant par un besoin de changement.

      Charny, avant d'entrer dans son carrosse, se donna la douloureuse satisfaction de regarder jusqu'au dernier moment les fenêtres de l'appartement de la reine. Nul ne pouvait le voir. Un des laquais, portant un flambeau à la main, éclairait le chemin, sans éclairer la physionomie.

      Charny ne rencontra sur les degrés que plusieurs officiers, ses amis, prévenus assez à temps pour que le départ n'eût pas l'air d'une fuite.

      Escorté jusqu'au carrosse par ces joyeux compagnons, Charny put permettre à ses yeux d'errer sur les fenêtres: celles de la reine resplendissaient de lumière. Sa Majesté, un peu souffrante, avait reçu les dames dans sa chambre à coucher.

      Celles d'Andrée, mornes et noires, cachaient derrière le pli des rideaux de damas une femme tout anxieuse, toute palpitante, qui suivait sans être aperçue jusqu'au mouvement du malade et de son escorte.

      Le carrosse partit enfin, mais si lentement qu'on entendait chaque fer des chevaux sur le pavé sonore.

      – S'il n'est pas à moi, murmura Andrée, il n'est plus à personne, du moins.

      – S'il lui reprend des envies de mourir, dit le docteur en entrant chez lui, au moins ne mourra-t-il ni chez moi ni dans mes mains. Diantre soit des maladies de l'âme! On n'est pas le médecin d'Antiochus et de Stratonice pour guérir ces maladies-là.

      Charny arriva sain et sauf à sa maison. Le docteur lui vint rendre visite le soir, et le trouva si bien, qu'il se hâta d'annoncer que ce serait la dernière visite qu'il lui ferait.

      Le malade soupa d'un blanc de poulet et d'une cuillerée de confitures d'Orléans.

      Le lendemain, il reçut la visite de son oncle, monsieur de Suffren, la visite de monsieur de La Fayette, celle d'un envoyé du roi. Il en fut à peu près de même le surlendemain, et puis on ne s'occupa plus de lui.

      Il se levait et marchait dans son jardin.

      Au bout de huit jours, il pouvait monter un cheval de paisible allure; ses forces étaient revenues. Sa maison n'étant pas encore assez délaissée, il demanda au médecin de son oncle et fit demander au docteur Louis l'autorisation de partir pour ses terres.

      Louis répondit de confiance que la locomotion était le dernier degré de la médication des blessures; que monsieur de Charny avait une bonne chaise, et que la route de Picardie était unie comme un miroir, et que demeurer à Versailles, quand on pouvait si bien et si heureusement voyager, serait folie.

      Charny fit charger un gros fourgon de bagages; il offrit ses adieux au roi, qui le combla de bontés, pria monsieur de Suffren de présenter ses respects à la reine, ce soir-là malade, et qui ne recevait pas. Puis, montant dans sa chaise à la porte même du château royal, il partit pour la petite ville de Villers-Cotterêts, d'où il devait gagner le château de Boursonnes, situé à une lieue de cette petite ville qu'illustraient déjà les premières poésies de Demoustier.

      Chapitre LV

      Deux cœurs saignants

      Le lendemain du jour où la reine avait été surprise par Andrée fuyant Charny, agenouillé devant elle, mademoiselle de Taverney entra suivant son habitude dans la chambre royale, à l'heure de la petite toilette, avant la messe.

      La reine n'avait pas encore reçu de visite. Elle venait seulement de lire un billet de madame de La Motte, et son humeur était riante.

      Andrée, plus pâle encore que la veille, avait dans toute sa personne ce sérieux et cette froide réserve qui appelle l'attention, et force les plus grands à compter avec les plus petits.

      Simple, austère pour ainsi dire dans sa toilette, Andrée ressemblait à une messagère de malheur, ce malheur fût-il pour elle ou pour d'autres.

      La reine était dans ses jours de distractions; aussi ne prit-elle point garde à cette démarche lente et grave d'Andrée, à ses yeux rougis, à la blancheur de ses tempes et de ses mains.

      Elle tourna la tête tout juste autant qu'il fallait pour faire entendre son salut amical.

      – Bonjour, petite.

      Andrée attendit que la reine lui donnât une occasion de partir. Elle attendit, bien sûre que son silence, que son immobilité, finiraient par attirer les yeux de Marie-Antoinette.

      Ce fut ce qui arriva. Ne recevant point de réponse autre qu'une grande révérence, la reine se tourna, et obliquement, aperçut ce visage frappé de douleur et de rigidité.

      – Mon Dieu! qu'y a-t-il, Andrée? fit-elle en se retournant tout à fait; est-ce qu'il t'arrive malheur?

      – Un grand malheur, oui, madame, répondit la jeune femme.

      – Quoi donc?

      – Je vais quitter Votre Majesté.

      – Me quitter! Tu pars?

      – Oui, madame.

      – Où vas-tu donc? Quelle cause peut avoir ce départ précipité?

      – Madame, je ne suis pas heureuse dans mes affections…

      La reine leva la tête.

      – De famille, ajouta Andrée en rougissant.

      La reine rougit à son tour, et l'éclair de leurs deux regards se croisa en brillant comme un choc d'épées.

      La reine se remit la première.

      – Je ne vous comprends pas bien, dit-elle; vous étiez heureuse, hier, ce me semble?

      – Non, madame, répondit fermement Andrée; hier fut encore un des jours infortunés de ma vie.

      – Ah! fit la reine devenue rêveuse.

      Et elle ajouta:

      – Expliquez-vous.

      – Il faudrait me résigner à fatiguer Votre Majesté de détails au-dessous d'elle. Je n'ai aucune satisfaction dans ma famille; je n'ai rien à attendre des biens de la terre, et je viens demander un congé à Votre Majesté pour m'occuper de mon salut.

      La reine se leva, et bien que cette demande parût coûter à son orgueil, elle vint prendre la main d'Andrée.

      – Que signifie cette résolution de mauvaise tête? dit-elle; n'aviez vous pas hier un frère, un père, comme aujourd'hui? Étaient-ils moins gênants et moins nuisibles qu'aujourd'hui? Me croyez-vous capable de vous laisser dans l'embarras, et ne suis-je plus la mère de famille qui rend une famille à ceux qui n'en ont pas?

      Andrée se mit à trembler comme une coupable, et, s'inclinant devant la reine, elle dit:

      – Madame, votre

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