Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
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ÉCOLE DU PÉRIGORD. Son type primitif se trouve à Périgueux dans l'ancienne cathédrale de cette ville, et dans l'église abbatiale de Saint-Front; c'est une importation byzantine 74. Le principe de cette école est celui de la coupole portée sur pendentifs. Dans un temps où la plupart des écoles romanes en France ne savaient trop comment résoudre le problème consistant à poser des voûtes sur les plans de la basilique antique, cette importation étrangère dut avoir et eut en effet un grand succès. On abandonna donc, dans les provinces de l'Ouest, pendant les XIe et XIIe siècles, sauf de rares exceptions, le plan romain pour adopter le plan byzantin. Les provinces plus particulièrement attachées aux traditions latines, comme l'Île-de-France, la Champagne et la Bourgogne, résistèrent seules à cette nouvelle influence et poursuivirent la solution du problème posé, ce qui les conduisit au système de construction gothique. Outre les deux types que nous venons de citer, l'école du Périgord présente une quantité prodigieuse d'exemples d'églises dérivées de ces types. Nous nous bornerons à en citer quelques-uns: la cathédrale de Cahors, l'église abbatiale de Souillac (XIe siècle), celle de Solignac, la cathédrale d'Angoulême, les églises de Saint-Avit-Seigneur, du Vieux-Mareuil, de Saint-Jean de Cole, de Trémolac, l'église abbatiale de Fontevrault (XIIe siècle), et la majeure partie des petites églises de la Charente.
ÉCOLE NORMANDE. Les églises normandes antérieures au XIIe siècle étaient couvertes par des charpentes apparentes, sauf les sanctuaires, qui étaient voûtés en cul-de-four. C'est d'après ce principe que furent élevées les deux églises abbatiales de Saint-Étienne et de la Trinité à Caen 75, fondées par Guillaume le Bâtard et Mathilde sa femme. Ces dispositions primitives se retrouvent dans un assez grand nombre d'églises d'Angleterre, tandis qu'en France elles ont été modifiées dès le XIIe siècle; les voûtes remplacèrent les anciennes charpentes. Les Normands furent bientôt d'habiles et actifs constructeurs; aussi leurs églises des XIe et XIIe siècles sont-elles grandes, si on les compare aux églises de l'Île-de-France; les nefs sont allongées, ainsi que les transsepts; les choeurs ne furent enveloppés de bas-côtés que vers le milieu du XIIe siècle.
Ces écoles, diverses par leurs origines et leurs travaux, progressent chacune de leur côté jusqu'au moment où se fait sentir l'influence de la nouvelle architecture de l'Île-de-France et de la Champagne, l'architecture gothique.
L'architecture gothique est une des expressions les plus vives des sentiments des populations vers l'unité. En effet, peu après sa naissance, nous voyons les écoles romanes (dont nous n'avons indiqué que les divisions principales) s'éteindre et accepter les nouvelles méthodes adoptées par les architectes du domaine royal. Cependant, au commencement du XIIIe siècle, on distingue encore trois écoles bien distinctes: l'école de l'Île-de-France, qui comprend le bassin de la Seine entre Montereau et Rouen, ceux de l'Oise et de l'Aisne entre Laon, Noyon et Paris, le bassin de la Marne entre Meaux et Paris et une partie du bassin de la Somme; l'école champenoise, qui a son siége à Reims, et l'école bourguignonne, qui a son siége à Dijon.
L'école gothique normande ne se développe que plus tard, vers 1240, et son véritable siége est en Angleterre.
La passion de bâtir des églises, de 1200 à 1250, fut telle au nord de la Loire, que non-seulement beaucoup de monuments romans furent détruits pour faire place à de nouvelles constructions, mais encore que l'on modifia, sans autre raison que l'amour de la nouveauté, la plupart des édifices rebâtis pendant le XIIe siècle; les cathédrales de Paris, de Senlis, de Soissons, de Laon, de Rouen, du Mans, de Chartres, de Bayeux, nous présentent des exemples frappants de ce besoin de changer ce qui venait d'être achevé à peine. Les monastères, avec plus de réserve cependant, suivirent ce mouvement vers un renouvellement de l'architecture; quant aux paroisses, celles qui étaient riches ne manquèrent pas de jeter bas leurs vieilles églises pour en construire de neuves. Si bien qu'on ne peut s'expliquer comment il se trouva, pendant un espace de cinquante années à peine, assez d'ouvriers de bâtiment, de sculpteurs, de statuaires, de peintres verriers, pour exécuter un nombre aussi prodigieux d'édifices sur un territoire qui ne comprend à peu près que le tiers de la France actuelle. Bientôt même les provinces du Centre, de l'Est et de l'Ouest suivirent l'impulsion, et ces ouvriers se répandirent en dehors des contrées où l'architecture gothique avait pris naissance. Bien qu'on ait démoli plus de la moitié des églises anciennes depuis la fin du dernier siècle, il reste encore en France une quantité considérable de ces édifices. Nous nous bornons à donner ici un catalogue de celles qui présentent assez d'intérêt au point de vue de l'art pour être mises au rang des monuments historiques, comme cathédrales, églises conventuelles ou paroissiales.
Afin de faciliter les recherches, nous classons ces églises par départements et arrondissements, en suivant l'ordre alphabétique.
AIN.
Arrond. de Bourg. Église de Brou 76, ég. de Saint-André de Bagé.
Arrond. de Nantua. Ég. de Nantua 77.
Arrond. de Trévoux. Ég. de Saint-Paul de Varax.
AISNE.
Arrond. de Laon. Ég. Notre-Dame de Laon (ancienne cathédrale) 78, ég. Saint-Martin de Laon 79, ég. Saint-Julien de Royaucourt, ég. de Nouvion-le-Vineux, ég. de Marle.
Arrond. de Château-Thierry. Ég. de Mezy-Moulins, ég. d'Essomes, ég. de La Ferté-Milon.
Arrond. de Saint-Quentin. Ég. collég. de Saint-Quentin 80.
Arrond. de Soissons. Ég. cathédrale de Soissons 81, ég. abb. de Saint-Médard à Soissons, ég. abb. de Saint-Jean-des-Vignes, id. 82, ég. abb. de Saint-Julien, id., ég. abb. de Saint-Yved
73
Voy. ARCHITECTURE RELIGIEUSE, fig. 10.
74
Voy. l'
75
Au XIIe siècle, les nefs de ces églises furent voûtées; le choeur de l'église de Saint-Étienne fut rebâti au XIIIe siècle.
76
Architecture du commencement du XVIe siècle; cette église fut bâtie par la soeur de Charles-Quint; elle contient de belles verrières et de magnifiques tombeaux. Aujourd'hui elle sert de chapelle au séminaire.
77
Curieuse église du XIIe siècle, voûtée au XIIIe. Style de la Haute-Saône.
78
L'un des plus beaux spécimens de l'architecture du commencement du XIIIe siècle (voy. CATHÉDRALE, fig. 9; CLOCHER, fig. 73). Dans l'origine, la cathédrale de Laon, possédait une abside circulaire, avec bas-côté. Vers 1230, cette abside fut démolie pour être remplacée par une abside carrée. Il est difficile de se rendre compte des motifs de ce changement. Les fondations du choeur circulaire ont été retrouvées par l'architecte M. Boeswilwald, et des chapiteaux faisant partie de ce sanctuaire primitif ont été replacés dans l'abside carrée. La sculpture de la cathédrale de Laon est fort belle. Villard de Honnecourt cite les clochers de Laon et en donne un figuré.
79
Église du XIIe siècle, d'un beau style, avec chapelles dans le transsept. La façade est un des meilleurs exemples de l'architecture du XIVe siècle.
80
Église à doubles transsepts, de la fin du XIIIe siècle.
81
L'un des bras de croix est semi-circulaire comme ceux des églises cathédrales de Tournay et de Noyon (voy. ARCHITECTURE RELIGIEUSE, fig. 30 et 31). Le choeur date des premières années du XIIIe siècle (voy. ARC-BOUTANT, fig. 52).
82
Cette église est en grande partie détruite aujourd'hui; la façade et ses deux clochers existent seuls.