Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome I. Constantin-François Volney

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Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome I - Constantin-François Volney

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chronologistes veulent trouver ici un interrègne qui aurait retardé le couronnement d'Ozias; mais cette hypothèse est détruite par l'expression formelle d'un passage qui dit: «Amasias étant mort, le peuple prit Ozias, dit Azarias, son fils, âgé de 16 ans, et il l'établit roi.» (Ibid. ch. 14, v. 21).

      Cette faute de 27 ans se corrige en l'attribuant au copiste, qui aurait dû écrire 17: mais immédiatement après, une autre faute semblable se reproduit; car Jéroboam II ayant régné 41 ans, dont 15 ans du temps d'Amasias, il lui en doit rester 26 sur le régne d'Ozias; par conséquent Zakarie, fils de Jéroboam, lui sùccede l'an 27 (pour 28) d'Ozias, et cependant le texte dit l'an 38 (Reg. II, ch. 15, v. 8). Ce n'est pas tout; la confusion est telle dans ces comparaisons de règne à règne, que par suite de dates énoncées un prince se trouve engendrer à l'âgé de 10 ans.

      «Rég. II, c. 16, V. 2.: «Achaz, fils de Joathan, lui succède âgé de 20 ans, et il en règne 16;» donc il vécut 36 ans.... Son fils Ézéqiah lui succède âgé de 26 ans.... Donc Achaz aurait été père à 11 ans, et eût engendré à 10 ans; ce qui en histoire serait si étrange, qu'on en eût sûrement fait la rémarque.

      Il faut en convenir de bonne foi; presque toutes les dates comparées du Livre des Rois sont inexactes, et leur inexactitude forme un système tellement lié, qu'on ne saurait l'attribuer tout entier à la négligence des copistes.... Il est bien plutôt l'ouvrage d'u rédacteur même, qui composa cet extrait abrégé des archives officielles après le retour de Babylone. Nous n'entrerons pas dans les détails fastidieux et péu importants de tous les articles: nous nous bornerons à proposër pour les 23 ans de la Section III, deux corrections qui la redressent presque entièrement.

      La première de ces corrections, admise déjà par plusieurs chronologistes, porte sur le règne d'Ozias, qui a reçu 10 ans de trop par suite d'une phrase équivoque, et qui a compté 52 au lieu de 42. Le texte dit3, «qu'après plusieurs années d'un règne glorieux, Ozias, surnommé Azarias, fut frappé de la lèpre; qu'il la garda jusqu'à sa mort, et que (selon là loi) il vécut séparé dans une maison écartée. Pendant ce temps Joathan, son fils, jugea le peuple à sa place [dans le palais du roi4].» En style hébraïque, juger c'est régner: ainsi Joathan régna à la place de son père encore vivant. Et combien de temps jugea-t-il? et auquel du père ou du fils le temps de ce règne a-t-il été compté? Plusieurs critiques ont fait cette question; en la répétant après eux, nous pensons que ce temps équivoque fut de 10 années, et que c'est lui qui, compté au père et au fils, a introduit un quiproquo de 10 ans; qui se montre partout. L'état primitif et vrai est qu'Azarias régna 42 ans seul, et 10 ans avec son fils: total 52. Joathan régna 6 ans seul et 10 avec son père: total 16. Mais pour ne l'avoir pas distingué, le rédacteur s'est jeté dans un dédale de contradictions: ces 10 ans et ces 6 ans sont si bien le nœud de la difficulté et le vrai moyen de solution, que sans cesse on les voit reparaître dans l'analyse et la décomposition des règnes: ce sont ces 10 ans qui ont occasioné la fausse date de l'avènement d'Ozias, placé à l'an 27 de Jéroboam au lieu de l'an 17 (ci-dessus). Ce sont eux qui ensuite ont réagi sur Zacharias, et l'ont fait succéder à Jéroboam l'an 38 au lieu de l'an 28 d'Ozias. Ce sont encore ces 10 ans qui, soustraits à l'âge de Joathan, âgé de 35 ans au lieu de 25, quand il règne avec son père, lui font engendrer à 16 ans, au lieu de 26, son successeur Achaz, qui à son tour resserré de ces 10 ans, engendra à 10 ans au lieu de 20. En rétablissant le règne d'Ozias seul à 42, et celui de Joathan, son fils, à 16, dont 10 du vivant d'Osias, tout rentre dans l'ordre; mais il reste encore aux rois de Juda un excès de 13 ans.

      Ici l'autorité du célèbre manuscrit alexandrin, que nous verrons par la suite restituer au règne d'Amon, fils de Josiah, 10 ans qui lui ont été mal à propos enlevés, nous fournit le moyen d'en regagner 8 sur le règne de Phakée 1er; car au lieu de 2 ans que les textes vulgaires donnent à ce prince, fils de Manahem, ce manuscrit lit 10 ans. Cette même lecture se trouve dans Eusèbe (Chronicon, page 24) et, qui plus est, dans le Syncelle (page 202). Cette fois-ci il la préfère à celle d'Africanus, qu'il remarque ne donner que 2 ans à ce prince (comme le texte hébreu). Par conséquent beaucoup de manuscrits grecs des plus anciens se sont accordés à donner 10 ans à Phakée Ier; ce qui restitue 8 ans de plus à la branche d'Israël, et ne lui laissé plus qu'un déficit de 5 ans, ou plutôt de 3 ans et demi vis-à-vis celle de Juda; et parce que les deux premières sections d'Israël ont un excès de 4 ans, il se trouve que les trois sommes additionnées et compensées donnent 249 ans, ce qui ne différe que d'une seule année de la somme des rois de Juda, laquelle est de 250.

      Ici se presentent quelques réflexions dictées par le sujet. Comment concilier, par exemple, les hautes idées que l'on a voulu se faire de l'origine et de la nature de ces livres juifs avec l'inexactitude, les négligences, les fautes matérielles de leur rédaction? et ces vices, l'on ne peut les mettre tous à la charge des copistes: si les calculs eussent été clairs et bien ordonnés, si les sommes partielles eussent été contrôlées par une addition résumée, les copistes n'eussent point commis tant de divagations. Ce désordre de la Chronique des Rois est une preuve sensible qu'aucune autorité publique n'a présidé à sa confection; qu'elle n'est point un ouvrage officiel, mais le travail volontaire d'un ou de plusieurs individus, sans caractère authentique, et dont le nom, par cela même, n'a point été apposé. Il est facile de concevoir comment les choses ont pu se passer. Tant que la puissance nationale subsista, les registres royaux, cités dans la Chronique, furent tenus avec plus ou moins d'exactitude, et il y eût des annales régulières et authentiques; mais quand les étrangers eurent violé le trône et brisé le sceptre; lorsque le roi d'Égypte, Nekos, maître de Jérusalem, eut déposé le roi et fouillé le trésor; lorsque le roi de Babylone, surtout, eut enlevé les vases, les ornements, pillé tous les genres de richesses et de monuments conservés; lorsqu'il eut déporté toutes les principales familles, on sent que dans la dévastation d'une ville prise d'assaut, d'un palais saccagé, d'un temple brûlé, la conservation des livres fut un soin secondaire, abandonné au zèle personnel et gratuit de quelque lettré, et par suite livré à tous les hasards qu'un ou plusieurs individus courent au milieu des calamités d'une guerre terrible..... Nombre de livres durent être vendus, brûlés, dispersés. Au retour de la captivité, tout débris échappé au naufrage devint plus précieux; mais des manuscrits volumineux et dispendieux durent exciter peu d'intérêt, et trouver peu d'amateurs dans une nation ignorante et ruinée. Il fallut que le sort suscitât quelque individu qui, réunissant le goût de la chose et les moyens d'exécution, fit l'abrégé où l'extrait que nous possédons: quels furent ses matériaux et quel fut son art d'en user? Voilà ce dont on ne peut juger que par l'induction de ce qui nous reste. Si cet individu eût été un homme de marque comme Esdras, il eût été connu et cité; si ses matériaux eussent été complets et passablement en ordre, il n'eût eu qu'à les classer; s'il eût eu l'esprit méthodique et la critique nécessaire à éclaircir les difficultés, il eût rédigé son travail avec une clarté qui n'eût pas permis tant de divagations aux copistes. Par exemple, s'il eût exprimé la durée positive du règne de Saül, cette durée se trouverait-elle en lacune dans tous les manuscrits sans exception et dans toutes les versions, à commencer par la version grecque sous Ptolomée? et s'il eût exprimé la durée totale des rois de Jérusalem, éprouverions-nous les variantes et les discordances où nous la voyons flotter? Cette omission capitale est la cause de tout le désordre de leur liste, en même temps qu'elle semble l'effet de l'hésitation et de l'incertitude du compilateur, qui n'a osé prononcer. Des copies premières ayant été faites de son manuscrit, ses premiers lecteurs en auront fait la remarque: l'on aura fait quelque calcul, quelques recherches; une opinion orale se sera établie entre les docteurs; quelque savant aura coté sur sa copie la somme qu'il aura crue vraie..... Supposons 473: par le laps du temps, par les effets des guerres et la dispersion

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<p>3</p>

Paralipom., II, chap. 26, v. 21. Reg. II, chap. 15, v. 5.

<p>4</p>

Super domum regis constitutus.