L'hôtel hanté. Уилки Коллинз

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L'hôtel hanté - Уилки Коллинз

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particulière, entre gens de condition, cela fait tant d'effet.» Elle s'arrêta encore une fois, et soupira de nouveau en regardant le tapis comme si elle avait quelque raison secrète d'être honteuse d'elle-même.

      Agnès commençait à se fatiguer du ton persistant de mystère avec lequel son ancienne femme de chambre lui parlait.

      «Si vous voulez un mot de moi pour un de mes amis, lui dit-elle, pourquoi ne pas m'en dire le nom?»

      La femme du courrier se mit à pleurer.

      «Je suis honteuse de vous le dire, mademoiselle.»

      Agnès, irritée, lui parla sévèrement pour la première fois.

      «Vous êtes absurde, Émilie. Dites-moi le nom immédiatement ou n'en parlons plus. Qu'est-ce que vous préférez?»

      Émilie fit un dernier effort. Elle tordit son mouchoir sur ses genoux, et lança le nom comme si elle avait fait partir un fusil chargé:

      «Lord Montbarry!»

      Agnès se leva et la regarda.

      «Vous me surprenez, répondit-elle tranquillement, mais avec un regard que la femme du courrier ne lui avait jamais vu auparavant.

      —Sachant ce que vous savez, vous deviez bien penser qu'il m'est impossible d'écrire à lord Montbarry. Je supposais que vous aviez quelque délicatesse de sentiments. Je suis fâchée de voir que je m'étais trompée.»

      Toute simple qu'elle était, Émilie n'en comprit pas moins fort bien la réprimande. Elle se dirigea sans bruit vers la porte, et avec ses petites manières pleines de douceur:

      «Je vous demande pardon, mademoiselle, je ne suis pas si mauvaise que vous croyez. Mais je vous demande pardon tout de même,» dit-elle.

      Elle ouvrit la porte. Agnès la rappela.

      Il y avait quelque chose dans l'excuse de cette femme qui frappa la nature juste et généreuse de son ancienne maîtresse.

      «Venez, lui dit-elle, il ne faut pas nous quitter comme cela. Faites-vous bien comprendre. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse?»

      Émilie fut assez sage pour répondre cette fois-ci sans réticence.

      «Mon mari va envoyer ses certificats, mademoiselle, à lord Montbarry, en Écosse. Je voulais seulement que vous lui permettiez de dire dans sa lettre que sa femme est connue de vous depuis son enfance, et que vous vous intéressez un peu à lui à cause d'elle. Je ne le demande plus maintenant, mademoiselle, puisque vous m'avez fait comprendre que j'avais tort.»

      Avait-elle réellement tort? Les souvenirs du passé, aussi bien que les chagrins du présent, plaidèrent puissamment auprès d'Agnès pour la femme du courrier, «Ce n'est pas une bien grosse faveur que vous me demandez là, dit-elle, se laissant aller à un sentiment de bonté qui prévalait dans toutes les actions de sa vie. Mais je ne sais si je dois permettre que mon nom soit mentionné dans la lettre de votre mari. Redites-moi encore exactement ce qu'il désire écrire.»

      Émilie répéta sa demande et fit une proposition qui lui sembla fort importante, comme à toutes les personnes qui n'ont pas l'habitude de tenir une plume.

      «Supposons que vous écriviez vous-même, mademoiselle, pour voir ce que cela donnera une fois sur le papier?»

      Quoique enfantine, l'idée fut mise à exécution par Agnès.

      «Si je vous laisse prononcer mon nom, dit-elle, il faut en effet que nous décidions au moins ce que vous direz.»

      Elle écrivit donc une phrase la plus brève et la plus simple qu'elle put trouver:

      «J'ose dire que ma femme est connue depuis son enfance par Mlle Agnès Lockwood, qui, par cette raison, porte quelque intérêt à ma réussite en cette circonstance.»

      Réduite à cette seule phrase, il n'y avait sûrement rien dans la mention de son nom qui pût signifier qu'Agnès eût donné une autorisation quelconque ou même qu'elle en eût eu connaissance. Elle hésita cependant encore un peu et tendit le papier à Émilie.

      «Il faut que votre mari le copie exactement sans rien y changer, dit-elle. À cette condition, je consens à ce que vous voulez.»

      Émilie n'était pas seulement reconnaissante, elle était réellement touchée. Agnès congédia vivement la petite femme.

      «Ne me donnez pas le temps de me repentir et de le reprendre,» dit-elle.

      Émilie disparut.

      «Le lien qui nous a jadis unis est-il complètement brisé? Suis-je aussi désintéressée de ce qui peut lui arriver d'heureux ou de malheureux que si nous ne nous étions jamais rencontrés et jamais aimés?»

      Agnès regarda la pendule. Il n'y avait pas dix minutes qu'elle s'était posé ces questions, et elle était presque honteuse en songeant à la réponse qu'elle venait d'y faire.

      Le courrier de cette nuit la rappellerait une fois de plus au souvenir de Montbarry, et à quel propos? À propos du choix d'un domestique.

      Deux jours après, elle reçut quelques lignes pleines de reconnaissance d'Émilie. Son mari avait obtenu la place. Ferraris était engagé pour six mois en qualité de courrier de lord Montbarry.

       Table des matières

      V

      Après une semaine de voyage en Écosse, milord et milady revinrent subitement à Londres. Sa visite aux montagnes et aux lacs écossais n'avait point donné à milady le désir de faire plus ample connaissance avec eux. Quand on lui en demanda la raison, elle répondit laconiquement:

      «J'ai déjà vu la Suisse.»

      Pendant une semaine encore, les nouveaux mariés restèrent à Londres, vivant en véritables reclus. Un jour, la vieille nourrice qui revenait de faire une commission dont Agnès l'avait chargée rentra dans un état d'excitation difficile à décrire. En passant devant la porte d'un dentiste à la mode, elle avait rencontré lord Montbarry qui en sortait. La bonne femme dépeignit cette rencontre avec un malin plaisir, représentant lord Montbarry comme affreusement malade.

      «Ses joues se creusent, ma chérie, sa barbe est grise. J'espère que le dentiste lui aura fait beaucoup de mal!»

      Sachant que sa vieille et fidèle servante haïssait de tout son son coeur l'homme qui l'avait abandonnée, Agnès fit la part d'une grande exagération dans le récit qu'elle venait d'entendre, et néanmoins sa première impression fut celle d'un véritable malaise. Elle risquait, en effet, elle aussi, de rencontrer dans la rue lord Montbarry: il était même possible qu'elle se trouvât face à face avec lui la première fois qu'elle sortirait. Elle resta deux jours entiers chez elle, honteuse de cette crainte ridicule. Le troisième jour, les nouvelles du monde, dans les journaux, annoncèrent le départ pour Paris de lord Montbarry se rendant en Italie.

      Mme

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