Les bijoux indiscrets. Dénis Diderot

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Les bijoux indiscrets - Dénis Diderot

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yeux en ont menti, répondit brusquement le sultan; vous m'impatientez avec votre Phédime: ne dirait-on pas qu'il n'y ait que ce bijou à questionner?

      —Mais peut-on, sans offenser Votre Hautesse, ajouta Mirzoza, lui demander quel est celui qu'elle honorera de son choix?

      —Nous verrons tantôt, dit Mangogul, au cercle de la Manimonbanda (c'est ainsi qu'on appelle dans le Congo la grande sultane). Nous n'en manquerons pas si tôt, et lorsque nous serons ennuyés des bijoux de ma cour, nous pourrons faire un tour à Banza: peut-être trouverons-nous ceux des bourgeoises plus raisonnables que ceux des duchesses.

      —Prince, dit Mirzoza, je connais un peu les premières, et je peux vous assurer qu'elles ne sont que plus circonspectes.

      —Bientôt nous en saurons des nouvelles: mais je ne peux m'empêcher de rire, continua Mangogul, quand je me figure l'embarras et la surprise de ces femmes aux premiers mots de leurs bijoux; ah! ah! ah! Songez, délices de mon cœur, que je vous attendrai chez la grande sultane, et que je ne ferai point usage de mon anneau que vous n'y soyez.

      —Prince, au moins, dit Mirzoza, je compte sur la parole que vous m'avez donnée.»

      Mangogul sourit de ses alarmes, lui réitéra ses promesses, y joignit quelques caresses, et se retira.

       Table des matières

      ALCINE.

       Table des matières

      [17] Jeu de hasard fort à la mode, un peu dans le genre du biribi et de notre loto. Voyez Promenade du Sceptique, t. I.

      «Soyez la bienvenue, lui dit le sultan à l'oreille. J'ai jeté mon plomb en vous attendant.

      —Et sur qui? lui demanda Mirzoza.

      —Sur ces gens que vous voyez folâtrer dans cette croisée, lui répondit Mangogul du coin de l'œil.

      —Bien débuté,» reprit la favorite.

      Alcine (c'est le nom de la jeune dame) était vive et jolie. La cour du sultan n'avait guère de femmes plus aimables, et n'en avait aucune de plus galante. Un émir du sultan s'en était entêté. On ne lui laissa point ignorer ce que la chronique avait publié d'Alcine; il en fut alarmé, mais il suivit l'usage: il consulta sa maîtresse sur ce qu'il en devait penser. Alcine lui jura que ces calomnies étaient les discours de quelques fats qui se seraient tus, s'ils avaient eu des raisons de parler: qu'au reste il n'y avait rien de fait, et qu'il était le maître d'en croire tout ce qu'il jugerait à propos. Cette réponse assurée convainquit l'émir amoureux de l'innocence de sa maîtresse. Il conclut, et prit le titre d'époux d'Alcine avec toutes ses prérogatives.

      Le sultan tourna sa bague sur elle. Un grand éclat de rire, qui était échappé à Alcine à propos de quelques discours saugrenus que lui tenait son époux, fut brusquement syncopé par l'opération de l'anneau; et l'on entendit aussitôt murmurer sous ses jupes: «Me voilà donc titré; vraiment j'en suis fort aise; il n'est rien tel que d'avoir un rang. Si l'on eût écouté mes premiers avis, on m'eût trouvé mieux qu'un émir; mais un émir vaut encore mieux que rien.»

      A ces mots, toutes les femmes quittèrent le jeu, pour chercher d'où partait la voix. Ce mouvement fit un grand bruit.

      «Silence, dit Mangogul; ceci mérite attention.»

      «Rien n'est plus vrai, mesdames; j'en ai usé, moi qui vous parle, pour une déperdition de substance.

      —Une déperdition de substance! Monsieur le marquis, reprit une jeune personne, qu'est-ce que cela?

      —Madame,

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