LUPIN: Les aventures complètes. Морис Леблан
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– En effet… Alors c’est que mon frère aura retiré les lettres.
Daspry revint vers l’homme et lui dit :
– Ne joue pas au plus fin avec moi. Il y a une autre cachette. Où est-elle ?
– Il n’y en a pas.
– Est-ce de l’argent que tu veux ? Combien ?
– Dix mille.
– Monsieur Andermatt, ces lettres valent-elles dix mille francs pour vous ?
– Oui, dit le banquier d’une voix forte.
Varin ferma le coffre, prit le sept de cœur non sans une répugnance visible, et l’appliqua sur le glaive, contre la garde, et juste au même endroit. Successivement, il enfonça le poinçon à l’extrémité des sept points de cœur. Il se produisit un second déclenchement, mais cette fois, chose inattendue, ce ne fut qu’une partie du coffre qui pivota, démasquant un petit coffre pratiqué dans l’épaisseur même de la porte qui fermait le plus grand.
Le paquet de lettres était là, noué d’une ficelle et cacheté. Varin le remit à Daspry. Celui-ci demanda :
– Le chèque est prêt, monsieur Andermatt ?
– Oui.
– Et vous avez aussi le dernier document que vous tenez de Louis Lacombe, et qui complète les plans du sous-marin ?
– Oui.
L’échange se fit. Daspry empocha le document et le chèque et offrit le paquet à M. Andermatt.
– Voici ce que vous désiriez, monsieur.
Le banquier hésita un moment, comme s’il avait peur de toucher à ces pages maudites qu’il avait cherchées avec tant d’âpreté. Puis, d’un geste nerveux, il s’en empara.
Auprès de moi, j’entendis un gémissement. Je saisis la main de Mme Andermatt : elle était glacée.
Et Daspry dit au banquier :
– Je crois, monsieur, que notre conversation est terminée. Oh ! Pas de remerciements, je vous en supplie. Le hasard seul a voulu que je puisse vous être utile.
M. Andermatt se retira. Il emportait les lettres de sa femme à Louis Lacombe.
– À merveille, s’écria Daspry d’un air enchanté, tout s’arrange pour le mieux. Nous n’avons plus qu’à boucler notre affaire, camarade. Tu as les papiers ?
– Les voilà tous.
Daspry les compulsa, les examina attentivement, et les enfouit dans sa poche.
– Parfait, tu as tenu parole.
– Mais…
– Mais quoi ?
– Les deux chèques ?… l’argent ?…
– Eh bien ! Tu as de l’aplomb, mon bonhomme. Comment, tu oses réclamer !
– Je réclame ce qui m’est dû.
– On te doit donc quelque chose pour des papiers que tu as volés ?
Mais l’homme paraissait hors de lui. Il tremblait de colère, les yeux injectés de sang.
– L’argent… les vingt mille… bégaya-t-il.
– Impossible… j’en ai l’emploi.
– L’argent !…
– Allons, sois raisonnable, et laisse donc ton poignard tranquille.
Il lui saisit le bras si brutalement que l’autre hurla de douleur, et il ajouta :
– Va-t’en, camarade, l’air te fera du bien. Veux-tu que je te reconduise ? Nous nous en irons par le terrain vague, et je te montrerai un tas de cailloux sous lequel…
– Ce n’est pas vrai ! Ce n’est pas vrai !
– Mais oui, c’est vrai. Cette petite plaque de fer aux sept points rouges vient de là-bas. Elle ne quittait jamais Louis Lacombe, tu te rappelles ? Ton frère et toi vous l’avez enterrée avec le cadavre… et avec d’autres choses qui intéresseront énormément la justice.
Varin se couvrit le visage de ses poings rageurs. Puis il prononça :
– Soit. Je suis roulé. N’en parlons plus. Un mot cependant… un seul mot, je voudrais savoir…
– J’écoute.
– Il y avait dans ce coffre, dans le plus grand des deux, une cassette ?
– Oui.
– Quand vous êtes venu ici, la nuit du 22 au 23 juin, elle y était ?
– Oui.
– Elle contenait ?…
– Tout ce que les frères Varin y avaient enfermé, une assez jolie collection de bijoux, diamants et perles, raccrochés de droite et de gauche par lesdits frères.
– Et vous l’avez prise ?
– Dame ! Mets-toi à ma place.
– Alors… c’est en constatant la disparition de la cassette que mon frère s’est tué ?
– Probable. La disparition de votre correspondance avec le major von Lieben n’eût pas suffi. Mais la disparition de la cassette… Est-ce là tout ce que tu avais à me demander ?
– Ceci encore : votre nom ?
– Tu dis cela comme si tu avais des idées de revanche.
– Parbleu ! La chance tourne. Aujourd’hui vous êtes le plus fort. Demain…
– Ce sera toi.
– J’y compte bien. Votre nom ?
– Arsène Lupin.
– Arsène Lupin !
L’homme chancela, assommé comme par un coup de massue. On eût dit que ces deux mots lui enlevaient toute espérance. Daspry se mit à rire.
– Ah ! Ca, t’imaginais-tu qu’un monsieur Durant ou Dupont aurait pu monter toute cette belle affaire ? Allons donc, il fallait au moins un Arsène Lupin. Et maintenant que tu es renseigné, mon petit, va préparer ta revanche, Arsène Lupin t’attend.
Et il le poussa dehors, sans un mot de plus.
– Daspry, Daspry ! criai-je, lui donnant encore et malgré moi, le nom sous lequel je l’avais connu.
J’écartai